Amanda se promène comme à son habitude, au fond de la mer, au milieu des rochers et des algues.

Quel endroit idéal, les proies y sont abondantes !

Elle a un amoureux, Hercule, sans doute le plus beau mâle de cette partie du fond de l’océan. Quelle femelle pourrait résister à la majesté de son déplacement, à cette carapace qui personnifie la puissance d’un crustacé, son port altier ? Amanda, moins impressionnante, a aussi tout ce qu’il faut pour attirer l’attention des garçons langouste. Elle est fine et gracieuse.

La langouste, au contraire du homard, n’a pas de pinces.

Il faut donc qu’elle soit capable de se défendre contre ses prédateurs pour leur faire peur, elle a un aspect particulièrement effrayant grâce à une multitude d’excroissances réparties sur tout l’avant du corps.

En plus la langouste se sert notamment de ses antennes pour émettre des bruits très caractéristiques, en frottant leurs bases contre la carapace, ce qui peut faire fuir les prédateurs.

La langouste est omnivore se nourrissant d’algues, de mollusques, de vers, de petits crustacés, d’oursin, etc. Elle est également nécrophage…

Amanda et Hercule font un beau couple qui aura une belle progéniture, si le milieu marin particulièrement hostile leur prête vie.

Au détour d’un rocher, l’odorat de la langouste, extraordinairement performant, identifie une odeur forte. Sans aucun doute, une charogne en train de se décomposer… Au bout de quelques mètres, elle aperçoit un objet singulier qu’elle n’a jamais rencontré. Une sorte de boîte avec des barreaux. L’odeur vient de là ! Au fond de la boîte, un morceau de viande en décomposition. En approchant, elle constate que les barreaux l’empêchent d’accéder à la charogne. Il lui faut trouver une ouverture à cette cage. Lentement, elle grimpe le long des barreaux et sur la partie supérieure, elle voit une ouverture. Bingo !

Elle s’engage dans le trou et tombe sur la viande. Elle peut enfin se régaler de ce festin inattendu.

C’est là que commence son drame. Elle a beau, se déplacer en tous sens : impossible de sortir !

Combien de temps la langouste demeure enfermée dans la cage ? Elle ne peut estimer le temps, tant elle est perturbée par son emprisonnement.

À un certain moment, elle sent sa prison s’élever vers la surface. Elle n’a pas le temps de réaliser ce qui lui arrive. Elle est éblouie par la lumière vive et oppressée par l’air. Quelque chose la saisit, et la projette dans une boîte pleine d’eau.

Le calvaire se poursuit. Elle est enfermée dans un immense aquarium, en compagnie, d’autres langoustes et de quelques homards, dont les pinces ont été attachées.

Après une nuit dans l’obscurité, au matin, des êtres mystérieux s’emparent d’Amanda et de quelques-uns de ses compagnons. Sans savoir exactement ce qui se passe, et après un ballottement sans fin de sa boîte, dans un engin à moteur, elle est déversée dans un immense aquarium.

Elle croit un instant avoir retrouvé l’océan. Mais elle déchante vite, car, malgré la présence d’algues et le mouvement de courants d’eau, elle comprend que c’est encore une prison plus grande, certes, que les autres, mais qui reste une prison…

 

Les animaux pleurent-ils ?

Je ne peux l’affirmer, car je ne suis pas spécialiste des langoustes, mais j’ai la certitude qu’Amanda tomba dans un profond désespoir. D’autant qu’avec l’instinct de son espèce, elle sentait que la mer n’était pas loin…

Son désespoir atteignit son paroxysme, lorsqu’une autre langouste présente depuis longtemps dans l’aquarium, lui expliqua que serait son avenir ou plutôt son non-avenir.

Ces êtres mystérieux qui maintenant géraient leur vie s’emparaient parfois de quelques langoustes. À travers la paroi de verre, elle avait vu les crustacés, jetés dans une immense bassine fumante. Son ouïe fine à travers la paroi lui permit de distinguer les cris de détresse, des pauvres bêtes. Celles-ci n’étaient jamais revenues.

La vie d’Amanda était devenue un véritable enfer. Elle avait perdu tout espoir. Avec le temps l’aquarium se dépeuplait. Dès qu’elle voyait les êtres mystérieux s’approcher de l’aquarium, elle essayait de se nicher le plus loin possible, cachée par les algues.

Elle sentait que cela serait bientôt la fin. Plus jamais elle ne reverrait Hercule, l’insouciance de ses fonds marins. Elle avait atteint le désespoir total, tout était perdu !

Un instant, elle ressentit des vibrations, suivi de craquements. L’eau de son aquarium pencha, et elle fut entraînée vers l’une des parois. Les êtres mystérieux devant elle couraient dans tous les sens. De l’eau de mer envahit la pièce submergeant peu à peu l’habitacle. Comme elle était glacée et revigorante !

Elle put enfin sortir, se laisser emporter par le courant.

Elle retrouve enfin le fond de l’océan…

Moralité de cette histoire.

Rien n’est jamais perdu. Tout peut arriver. Quand tout espoir a disparu, pensez aux langoustes et aux homards du Titanic…