Je vais vous conter ci-dessous un petite aventure dont je me suis souvenu pour écrire ce poème
que j’ai intitulé “Silence” et où cette dame blanche vous a bien intrigués.

 

Dans ma prime jeunesse, j’avais trouvé mon premier emploi dans le Lot-et-Garonne et j’avais pour me loger loué un vieux moulin désaffecté sur un petit ruisseau en pleine campagne. Mon premier voisin était fermier et habitait à 500m, derrière la colline. La propriétaire, malicieuse, m’avait indiqué qu’il y avait l’eau courante “au pas gymnastique“… c’est-à-dire à la pompe dans le petit jardin et que le moulin était seulement chauffé par une cheminée. Mais bon, c’était l’époque bénie du retour à la nature, à poil sur les plages et gardarem lou Larzac, et cela me convenait tout à fait.

Les nuits étaient parfaitement silencieuses car le ruisseau ne faisait aucun bruit en coulant.

Une de ces nuits, au début du printemps, je venais d’éteindre depuis dix minutes mon tourne-disque sur lequel j’écoutais en boucle Eva/Le cœur battant, et d’éteindre aussi la lumière pour m’appréter à dormir. Le silence était absolu lorsque je commençai à entendre des pas dans le grenier : plop, plop, plop. Ce ne pouvait être une gouttière, le temps était absolument sec. Ce n’était pas non plus un robinet qui fuyait, il n’y avait pas l’eau courante au moulin, sauf dans le ruisseau qui était toujours silencieux. C’était l’époque où l’on croyait beaucoup aux phénomènes paranormaux, où je venais de lire Le matin des magiciens, où l’on s’inquiétait des disparitions dans le Triangle des Bermudes, où l’on se souvenait encore de la Marie Céleste… and so on and so forth. Et les plus anciens se souviendront peut-être même de David Vincent dans la série culte Les envahisseurs.

Bref, vous voyez le contexte. J’étais terrifié ! Sans compter bien sûr la présence possible d’un malfaiteur (tiens, on ne dit pas malfaitrice ?) en chair et en os ! Ou encore, ce qui était le plus probable, d’un fantôme… Peut-être celui du meunier…

Dès que je rallumais la lumière, les pas s’arrêtaient dans le grenier. Je l’éteignais de nouveau et après quelques minutes les pas recommençaient. La nuit, on le sait, amplifie les sons. Je n’osais pas monter dans le grenier, et au bout d’un bon moment à entendre ainsi des pas : plop, plop, plop, je décidai de sortir et d’aller dormir enfermé dans ma voiture, une 4L blanche garée juste devant le moulin.

Dès que j’ouvris la lourde porte de bois, j’endendis un bruit d’aile et un gros oiseau vint planer au dessus de moi avant d’aller se perdre dans la nuit, un nuit vraiment noire, un vol que je pris vraiment pour un très mauvais présage… Je passai le reste de la nuit inconfortablement installé dans mon duvet sur la banquette avant de ma 4L, après l’avoir garée loin de ce moulin hanté.

Au matin, je pris mon courage à deux mains et je revins au logis pour déjeuner, me laver (à la pompe) et m’habiller pour la journée. Avec le jour naissant j’étais déjà beaucoup moins inquiet. Je travaillais dans le service informatique d’un grosse usine de chaussures, un job vraiment technique qui ne laissait pas place à des élucubrations fantaisistes ou à des croyances ésotériques.

J’étais tout de même terrorisé à l’idée de passer une nouvelle nuit dans mon moulin, et j’expliquai ma mésaventure à mes collègues. Les plus anciens, qui étaient des gens de la campagne me dirent que c’était peut-être une dame blanche, qu’il y en avait souvent dans les greniers des vieilles maisons, mais néanmoins je n’étais pas rassuré. Philippe, un des jeunes collègues de mon âge accepta de venir passer la nuit avec moi au moulin pour essayer de comprendre ce qu’il en était. En arrivant nous visitâmes aussitôt le grenier dans lequel je n’avais pas osé monter seul, tout paraissait très poussiéreux mais en ordre, seule une petite fenêtre de toit était ouverte, que nous avons fermée, mais pas la moindre trace du passage de quelqu’un. Mon collègue et ami dormit au grenier sur un petit divan et moi dans mon lit (à baldaquin !) dans la salle principale en bas près de la cheminée. Il ne se passa rien durant la nuit, il ne se passa plus rien non plus par la suite et mon inquiétude finit par disparaitre complètement.

Je crois que le plop, plop, plop, que j’avais entendu venait bien de cette dame blanche dont on m’avait parlé et que j’avais vue s’enfuir à tire-d’aile lorsque j’étais sorti du moulin en pleine nuit.

Et voilà comment on a une histoire à raconter à ses petits-enfants – qui s’en foutent un peu d’ailleurs, il faut bien le dire – et un ou deux pauvres textes à déposer au creux de l’Oasis cinquante ans plus tard !

Merci à vous d’avoir lu mon aventure jusqu’ici !