Écris ce qui se passe et repasse

comme des lueurs étranges dans les trous de ta tête

Écris à ton cri, toujours là dans ta gorge,

écris lui, juste à lui et dis lui que tu l’aimes

Écris à tes nausées, à ton crâne en tambour,

à ton vomi hurlant, à ton passé strident,

écris à tes souvenirs d’arrêter de bavasser…

Écris tes yeux ouverts dans la pénombre grise

dis-leur de regarder la lumière douce absente

Écris à tes doigts pour saisir l’Essentiel,

qu’ ils se tendent et s’allongent pour caresser le ciel…

Écris n’importe quoi, peu importe comment

Écris, écris encore toujours

écris ton cœur qui brûle,

écris ton âme qui nage,

écris tout cet amour que tu ne sais pas dire…

Écris que tu l’attends sans la chercher vraiment,

sur le bord de ses seins, sur le cul de l’instant

Écris que tu la sens,

baignée par les chaleurs vivantes

dans l’espoir dessiné en esquisse tremblante…

Écris le café noir, le bleu de l’oiseau fou,

écris les feuilles mortes et pourtant si jolies,

écris ce que ton esprit crie,

cette arabesque insolente et têtue,

écris ce qui s’égare avant qu’il ne se perde,

écris tout ce bonheur avant qu’il ne se meurt…

Écris à ton amour, écris lui, écris lui !

Écris lui qu’il te manque, que tu penses fort à lui

Écris à tout ton être, tatoué de désirs

écris tes labyrinthes, tes supplices de tantale,

écris les océans de ton cœur de nuage

et les relents fétides des bas fonds de ton âme…

Écris toute la beauté,

inaccessible ardeur de cette main offerte

qui s’ouvre et s’éloigne en disant au revoir,

écris l’illusion absurde de ton corps triste et vide,

écris ta solitude, ondulante et fidèle,

écris la paix lunaire quand le soleil s’endort…

Écris les sourires et les larmes partout,

écris tout ce monde là, si vilain et si beau,

écris, merde, écris…

Écris pour faire danser les tacs de la pendule,

écris ta déception de n’être que toi-même,

écris ta joie aussi d’être parfois toi-même,

écris à ton reflet et dis lui qu’il est moche,

écris ce que tu vois, écris ce que tu sens,

écris, écris, c’est tout ce que tu sais faire,

et même si c’est grinçant,

et même si ça ennuie,

ça occupe tes nuits longues dans le vent en colère,

quand le lit est trop mou et les draps suintants,

quand l’Amour est parti acheter des cigarettes

et que la chambre s’enfonce tout doucement

dans l’odeur insistante du silence forteresse…

Écris…

Écris…