De notre envoyé spécial au sein d’un nuage d’étourneaux.

J-1 : L’essor

Nono m’attendait donc en cet après midi d’automne. Comme convenu nous nous sommes retrouvés sur la rive de l’étang à l’endroit où il avait l’habitude de venir s’ébattre. « Tu le comprendras, je ne peux m’attarder trop longtemps loin de mes congénères, nous autres les étourneaux sommes des grégaires. Tu vas me suivre, nous allons retrouver ma bande dans un grand figuier, nous ne serons que quelques centaines. De là nous rejoindrons tous les autres ». Vous imaginez tout de suite, chers lecteurs, la difficulté insurmontable devant laquelle je me trouvais déjà : Un canard ne peut aller se poser dans un arbre. Tous ceux qui s’y sont essayés ont fini piteusement, nos ailes sont trop grandes pour passer entre les feuilles et nos pattes palmées ne peuvent enserrer les branches. Merci Nono, lui répondis-je sur un ton amicalement ironique, c’est comme si je te donnais rendez-vous là bas au milieu de l’étang ! Finalement il fut convenu que j’attende l’envol au pied du figuier pour, en quelques coups d’ailes, m’insérer dans le groupe en espérant qu’aucun d’entre eux ne rejette le « vilain petit canard ».

Me voici donc posté près du tronc couvert de lierre avec au dessus de moi un feuillage peuplé d’une foule bruissante. Et vas-y que je te piaille, que je te volette d’une branche à l’autre dans un assourdissant et joyeux gazouillis collectif, présageant déjà le somptueux ballet qui allait se dessiner dans le ciel. Et là, je dois vous l’avouer j’ai beaucoup regretté que la nature n’ait pas pourvu les canards d’une morphologie leur permettant de se percher au plus haut des arbres car, excusez ce détail que je ne pourrai effacer de ma mémoire, une averse de fientes s’est abattue sur moi ! Croyez le, si nos plumes sont aptes à laisser glisser l’eau, fournissant même aux humains une image de l’indifférence, elles ne le sont pas à détourner les déjections gluantes et puantes de nos amis les étourneaux, et je dûs vite m’écarter.

Mais déjà les premiers individus quittaient le figuier suivis d’un coup par toute la colonie dans un impressionnant « froufrou » d’innombrables battements d’ailes. Je pris donc mon envol, difficilement, on est plus à l’aise sur l’eau, et les rattrapais sans peine.

Au loin, au dessus des toits de la ville on apercevait une masse noire, mouvante, changeante, vers laquelle nous nous dirigions à tire d’aile.

Un grand frisson parcourut mon plumage.

Dans la prochaine édition le troisième et dernier épisode : Le nuage.