Le rôti

Lundi de Pâques c’est rituel

chez Marie-Pierre et Jean-Michel

on reçoit pour le déjeuner

les amis Alain et Audrey.

 

Réunions de condisciples

tout au long de leur périple

de la maternelle au lycée

vieux souvenirs à ressasser.

 

Nous sommes un peu en avance…

Non, non, Marie-Pierre relance

le dialogue où elles l’avaient

au printemps dernier arrêté.

 

Les hommes partent au séjour

et d’exploits sportifs font le tour

Mapie cisèle en parlant l’ail

larde le rôti de ripaille.

 

Audrey loue du boucher l’adresse

pour avoir décoré la pièce

d’un exsangue fleuron de lard

décolleté avec grand art.

 

Une blanche et fine ficelle

applique la barde en dentelle

cercle l’écarlate bavette

chaque tour noué en rosette.

 

Quand Audrey voit son amie amputer

le rôti d’une des extrémités

la déposer sur un côté du plat

Quel dommage, pourquoi coupes-tu ça ?

 

J’ai toujours vu belle-maman le faire

pour Jean-Mi les recettes de sa mère…

C’est vrai qu’Irène est un cordon-bleu

resté toujours sans pareil à mes yeux.

 

En a-t-elle préparé de bons mets

à des gamins plus gourmands que gourmets

pour faire oublier les ratas ordinaires

servis en semaine aux pensionnaires ?

 

À pas de loup les hommes s’avancent

ils ont appris à force d’expérience

ne trouble point ta femme en cuisine

si elle papote avec une copine.

 

Ah Jean-Mi te voilà ! Tu tombes à pic…

Pour une fois… Je voudrais que tu m’expliques

pourquoi couper dit Audrey étonnée

le bout du rôti avant d’enfourner ?

 

Jean-Mi signifie les yeux grands ouverts

ignorer la technique de sa mère

Alain du regard semble le défier

Le copain n’arrive qu’à bafouiller.

 

Elle vient nous retrouver tout à l’heure

de sa pratique dira la teneur

je ne pense pas que c’est le secret

qu’elle veuille dans la tombe emporter.

 

Une demi-heure plus tard Irène

accueillie par le quatuor en reine

aux bons souvenirs des vraies bombances

quand potaches ils étaient en vacances.

 

Maman, avant d’appeler les enfants

peux-tu nous délivrer de ce tourment

qui ferait obstacle à notre appétit

pourquoi coupais-tu le bout du rôti ?

 

Irène s’attendait à plus embarrassant

pour profiter de l’absence des garnements

après un franc éclat de rire elle répond

Té, grand sot, si mon plat avait été plus long…