Il est aussi difficile de vivre sans femme, que de vivre avec une femme (proverbe moldave)

L’intrigue

De la difficulté pour les couples de se retrouver face à face, aux différents moments de la vie quand l’ambiance n’est pas au beau fixe.

Mêmes causes, mêmes effets, seuls les termes employés diffèrent suivant le milieu social, à fortiori pour les cas extrêmes.

Acte I

La scène se passe dans le salon de monsieur et de madame le comte. Madame vient de rentrer, donne son manteau et son chapeau à un serviteur. Monsieur est assis dans un fauteuil et boit un whisky.

Monsieur

  • Bonjour très chère je vois que vous venez de votre coiffeur. Cette nouvelle coiffure vous va à ravir !

Madame

  • Merci mon bon. Ce compliment me va droit au cœur. Vous n’êtes pas coutumier de la chose.

Monsieur

  • Vous êtes bien dure avec moi très chère, vous savez fort bien que vous fûtes et que vous serez toujours l’élue de mon cœur.

Madame

  • Ne vous fatiguez pas mon bon ami, j’ai toujours su que vous m’aviez épousé pour ma dot.

Monsieur

  • Mais……. !

Madame

  • Brisons-la ! Cela m’indiffère, je veux plutôt vous entretenir d’un sujet plus important.

Monsieur

  • Lequel ma douce ?

Madame

  • J’ai trouvé un mari pour notre fille Sidonie.

Monsieur

  • Quoi un mari ? Qui est-ce ? Précisez !

Madame

  • Il s’agit de Hubert Eugène…

Monsieur

  • Quoi ce godelureau ! Jamais je ne donnerai ma fille à ce bellâtre, ce coureur de jupons !

Madame

  • Taisez-vous mon ami. Vous n’avez pas de leçon à donner à ce garçon. Quand je vous ai épousé, je savais bien que vous couriez la gueuse. D’ailleurs je ne suis pas dupe, vous avez continué après. Heureusement qu’avec l’âge les choses se sont calmées.

Monsieur

  • Vous ne pouvez pas dire cela ma mie… En tout cas de mon vivant jamais ma fille n’épousera ce garçon. Il est laid et sans intelligence.

Madame

  • Taisez-vous ! Vous n’êtes qu’un rustre. Heureusement que vous m’avez épousé sinon vous traîneriez encore dans la misère. Certes Hubert Eugène n’est pas très beau et ne brille pas par son intelligence, mais qu’importe ! Il est riche et un riche est forcément beau et intelligent. Et que dire de sa noblesse ? Ses aïeux ont fait les croisades avec Saint Louis et il est affilié aux Hasbourg par sa mère. Il n’est pas d’une noblesse douteuse comme vous.

Monsieur

  • Noblesse douteuse ! Vous n’êtes qu’une insolente, je suis quand même Comte de Marengo !

Madame

  • C’est bien ce que je disais votre noblesse date de Bonaparte, ce complice des régicides. Moi, ma noblesse date d’avant l’an 1000. Taisez-vous à la fin, occupez-vous de vos chevaux de course, que j’ai payés, d’ailleurs je vous le rappelle, et laissez-moi m’occuper des affaires sérieuses. Notre entretien est clos ! Demain nous recevons Hubert Eugène et son père !

 

Acte II

Le décor représente une espèce de cache aménagée sous le périphérique parisien : deux ou trois caisses, des couvertures crasseuses, des bouteilles de vin, vides, sur le sol des emballages divers, mégots, trognons de pain, boites de conserve vides. Dans une odeur de mélange d’urine, de vinasse, de camembert, un homme est vautré sur un vieux matelas, une bouteille de vin à la main.

Lui

  • Salut ma poule, tu sais que t’es gironde aujourd’hui. Cela serait ti qu’ta été chez le coupe tif ?

Elle

  • Merci ducon ! Pour une fois qu’un compliment sort de ta gueule d’ivrogne faut le noter. Mais non, c’est seulement qu’il pleut !

Lui

  • T’es vraiment vacharde avec moi, tu sais bien ma salope que j’tai dans la peau et que tu m’as toujours fait bander.

Elle

  • Arrête ton char Benhur je sais bien que tu t’aies mis à la colle avec moi parce que j’avais hérité de mon vieux.

Lui

  • Mais …. !

Elle

  • Ferme ton clapet, j’m’en bat l’œil, je veux te causer, ouvre tes mirettes.

Lui

  • J’t’esgourde salope.

Elle

  • J’ai trouvé un jules pour notre fille Bertha.

Lui

  • De quoi un jules ? De quoi que tu causes ?

Elle

  • J’te cause d’Emile…

Lui

  • De quoi ce mecton ! Jamais je ne fourguerai ma fille à ce sac à merde, ce suceur de croupions !

Elle

  • Ferme ta gueule connard ! T’es gonflé de jacter comme tu le fais. Quand je me suis mis à la colle avec toi j’savais bien que t’allais foutre ta grosse queue dans toutes les pouffiasses du coin. Je suis pas conne j’sais bien qu’après tu as continué à aller aux putes. Si tes burnes n’étaient pas tombées en carafe tu continuerais encore.

Lui

  • T’es givrée poufiasse… En tout cas tant j’serais vivant jamais ma fille ne se mettra à la colle avec ce mecton. T’as vu sa tronche et en plus il est con comme un balai.

Elle

  • Ferme ta gueule tu pues la vinasse. Tu peux remercier le père Jésus de m’avoir connu, sans moi tu serais déjà crevé comme une merde que tu es. D’accord l’Emile a la gueule de travers et n’a pas inventé l’eau chaude, mais on s’en bat l’œil ! Il touche une pension d’invalidité de 100 euros. Et quel démerdard. Cela fait perpète que ses vieux et lui ont le monopole des poubelles du coin. Ce ne sont pas des minables comme toi mon salaud.

Lui

  • Minable ! Tu n’es qu’un sac à merde moi je travaille sur la décharge !

Elle

  • Ben oui ! C’est bien ce que j’ai dit, tu es un minable, un sac à vin, une lopette toutes les ordures sont déjà triées quand elles arrivent sur la décharge. Moi mon vieux il savait se débrouiller, il n’avait pas son pareil pour faire la fin des marchés. Toi à part de picoler et de cuver t’es bon à rien. Ferme ta gueule, regarde courir tes cafards sur ton matelas et laisse ta régulière s’occuper des choses sérieuses, je n’ai pas une merde de chien à la place du cerveau comme toi. Demain j’invite l’Emile et son vieux à boire un coup de rouquin !