Texte de Christian, atelier d’écriture du 28 mai 2018.            https://www.oasisdepoesie.org/forums/topic/personnages-si-jetais/

     

Si j’étais Michel-Ange, j’aimerais que les autres me connaissent vraiment car je suis un autre. Je ne suis pas celui qu’on croit !

Certains pensent que je n’aime que peindre et sculpter de jeunes éphèbes, mais je n’ai fait cela que pour gagner mon pain. Ne croyez pas que tartiner le plafond de la Sixtine soit une sinécure !

Si j’étais Michel-Ange, je me croirais immortel, car c’est vrai, je le SUIS !

J’en reviens à ce travail d’artiste ! Oh ! Mon dieu ! Oh ! Doux Jésus !  Des années en haut des échelles ! Des nuits à la bougie sur des échafaudages ! Il aura mérité son paradis, c’est sûr !

J’aimerais, oui, que les autres sachent que, même si j’ai peint le corps du Christ dans toutes les positions imaginables, j’aurais bien préféré déguster des religieuses au café sur la Piazza Navona – en regardant Bernini bâtir sa fontaine -, ou bien des religieuses tout court sous les lambris de Saint-Pierre.

Oui, si j’étais Michel-Ange, plutôt que cette odeur moisie de la Sixtine, j’aimerais mieux le grand air, l’air libre ! Ce n’est pas évident de vivre comme je vis, toute la sainte journée en haut d’une échelle avec un pinceau à la main !

Je finirais par en rêver, de tous ces personnages ! Ils danseraient et s’animeraient toutes les nuits, pour les peupler de farandoles et de processions. Quelquefois, cela tournerait au cauchemar quand, m’identifiant à Saint Etienne, je serais percé de flèches (ne m’appelez plus Manufrance !) ; quand, me croyant Saint Barthélémy, je brandirais ma peau écorchée ou quand l’odeur du grill de Saint Laurent envahirait mes narines.

Heureusement, je finirais apaisé par les douces Sibylles, la Delphique surtout, à l’air si doux et si timide. Ah ! Que je l’aimerais, celle-là, que je l’aimerais tellement !

Ah ! Si j’étais Michel-Ange, je laisserais bien tout cela en plan… Au diable le Pape ! Et je m’en irais faire le mur avec la Sibylle Delphique, au bout du Saint Empire, jusqu’à Berlin ! Et je remonterais un peu le temps d’avant le joueur de violoncelle pour aller poser quelques graffitis de ma palette sur ce mur de béton triste : des piétas, des anges, des chérubins qui sauteraient dans les nuages, bien au-dessus des barbelés que j’ornerais de guirlandes dorées, d’arc en ciels radieux, de septièmes ciels.

Et au septième jour, alors, je me reposerais.