Comme d’habitude, ne lisez pas tout, mais essayez de prendre en compte chaque consigne avant de lire la suivante.
Voici une liste d’expressions bien connues, une liste bien fournie pour vous donner le choix :
Une main de fer | dans un gant de velours |
Avoir un polichinelle | dans le tiroir |
Se faire rouler | dans la farine |
Avoir une araignée | au plafond |
Passer l’arme | à gauche |
Mettre la charrue | avant les bœufs |
Avoir péril | en la demeure |
Bâtir des châteaux | en Espagne |
Avoir le feu | au cul |
Jeter le bébé | avec l’eau du bain |
Chercher une aiguille | dans une botte de foin |
Ne pas pousser mémé | dans les orties |
Ne pas se trouver | sous le sabot d’un cheval |
Chercher midi | à quatorze heures |
Rester droit | dans ses bottes |
Avoir du pain | sur la planche |
Avoir le compas | dans l’œil |
Dormir | sur ses deux oreilles |
Avoir l’estomac | dans les talons |
Mettre tous ses œufs | dans le même panier |
Comme souvent pour les proverbes et pour les dictons, les expressions sont écrites en 2 parties.
1 – Mélanger le début d’une expression avec la fin d’une autre pour créer 5 expressions bien à vous !
Par exemple :
Avoir le compas loin du cœur.
… etc.
N.B. Vous pouvez aussi en imaginer à partir d’autres expressions que vous connaissez bien.
2 – Choisissez une de vos 5 créations
et
Choisissez aussi 3 mots dans le dernier commentaire publié ci-dessous
(dans le dernier texte écrit par un participant à cet atelier).
3 – Écrivez le texte que cela vous inspire votre nouvelle expression en utilisant les 3 mots choisis dans le dernier commentaire.
Ce texte proposera une explication, une illustration de votre expression,
et devra se terminer par un conseil ou une moralité.
4 – Publiez votre texte et son conseil ou sa moralité ci-dessous
dans les commentaires
en indiquant en tête votre expression et les 3 mots choisis.
Avoir le compas loin du cœur + (Lumière – Pianiste – Souvenir pris dans atelier précédent)
Cette expression peut revêtir différentes origines et différentes significations : elle peut prendre tout d’abord un sens géométrique, mais aussi un sens symbolique et également une signification marine.
Faisons le point.
Le sens géométrique : ce sens, apparu dès le haut Moyen-Âge, au temps des cathédrales, indiquait aux tailleurs de pierre qu’ils devaient, pour tracer leur rosace, mettre la pointe de leur compas loin du cœur du cercle principal de cette rosace, sur le cercle lui-même, un peu à l’intérieur, ou un peu à l’extérieur, puis réduire, augmenter ou même conserver l’angle du compas de façon à produire différents arcs de cercle savamment mêlés qui permettraient de capter puis de diffuser la lumière à travers les vitraux de leur dentelle de pierre. Les maîtres d’école ont gardé longtemps le souvenir de cette technique du « compas loin du cœur » pour, en guise d’exercice de détente autant que de manipulation du compas, amener leurs jeunes élèves à tracer des entrelacs de cercles réjouissants, formant des rosaces que ces chères têtes blondes pourraient ensuite s’amuser à colorier.
Le sens symbolique : selon d’autres sources on dit que l’expression « avoir le compas loin du cœur » vient d’un dicton chinois qui, lorsqu’il est complet s’énonce ainsi : « Sois heureux si ton épouse a le compas loin du cœur » qui veut dire que la meilleure épouse sera celle qui saura ne pas attiser les disputes, qui ne transpercera pas le cœur de son conjoint avec ces phrases perverses dont certaines femmes sont coutumières. Ainsi, le compas restera loin du cœur de l’époux, personne ne sera blessé, et la vie de couple restera aussi harmonieuse que la mélodie du pianiste jouant « Jésus que ma joie demeure« .
La signification maritime : vous n’êtes pas sans savoir qu’un compas est aussi un instrument utilisé pour la navigation maritime. Les marins sont parfois un peu snobs : ils pourraient dire qu’ils possèdent une boussole pour savoir toujours où est le nord et maintenir ainsi la route de leur navire, mais non, ils préfèrent se singulariser et dire « un compas », c’est plus chic ! Ils laissent la boussole aux terriens, aux pauvres bouseux qui restent sur le plancher des vaches ! Et donc, venons-en à une autre origine supposée de notre expression : comment les marins expliquent-ils ce « compas loin du cœur » ? Eh bien, voici ce que m’a confié un jour ce bougre de Kersauzon, à moins que ce ne soit Tabarly lui-même : Vous savez que, souvent, les marins quittent leur bien-aimée pour de longs mois. Les terriens – ceux qui possèdent une boussole – restent près du cœur de leur amour alors que les malheureux marins – ceux qui utilisent le compas – doivent s’éloigner très loin et battre les mers pour gagner leur vie. D’où cette expression de la marine aux longs cours : « avoir le compas loin du cœur » alors que la boussole, elle, y reste attachée !
Je sens que, comme moi vous allez faire vôtre cette belle expression, que vous allez aussi l’interpréter à votre façon, mais jamais, jamais, ne plantez un compas dans un cœur, gardez toujours le compas loin du cœur.
Une main de fer au cul – snobs – perverse – manipulation
C’est là que les ennuis commencent…se dit Lola en voyant son professeur se lever du fauteuil pour venir s’asseoir à côté d’elle dans le sofa.
– Voyez-vous, ma chère Lola, dit-il en déplaçant sa tasse de chocolat pour la positionner de l’autre côté de la table, voyez-vous, la théorie que vous avancez est très intéressante et se rapproche du point de vue bergsonien sur le temps qui passe…
La suite des paroles du professeur se perdit dans les limbes. Lola était absorbée par l’énorme verrue qui ornait le nez de l’homme, désormais assis à 10 centimètres d’elle, bien trop engagé dans sa zone d’intimité. Elle pouvait sentir son odeur de transpiration et d’eau de Cologne et elle avait maintenant une vue de premier plan sur les poignets douteux de sa chemise.
« Comment vais-je m’en dépêtrer ? Dire que je l’ai choisi comme directeur de thèse parce que je pensais qu’un mec aussi moche ne me calculerait même pas ! »
« Quel joli petit lot !» se disait le professeur en se pourléchant d’avance, « je vais lui sortir le grand jeu, elle va être éblouie par mon esprit la petite… Mais ne faisons pas fuir cette bergère mignonne à croquer… »
Lola tritura machinalement son capuchon rouge et recula désespérément vers le côté opposé du sofa, mais l’accoudoir se rapprochait dangereusement. Les longues mains du professeur touchaient presque ses cuisses. Des mains d’intellectuel blanches, le seul aspect soigné de sa personne. Il aimait les mettre en évidence dans les émissions snobs et littéraires où il était fréquemment convié. Mais cette fois-ci, elles lui firent l’effet d’une murène, prête à l’attaquer.
Dans un réflexe de survie, elle se leva, mais déjà la bête vorace agrippait fermement son entrejambe. Lola sidérée, ouvrit la bouche pour hurler mais aucun son ne sortit. Puis, elle tenta de se dégager, mais la murène s’enroula autour de ses épaules pour la forcer à se rasseoir. Une murène perverse à la voix mielleuse : Je sens que nous allons faire de grandes choses ensemble, mon petit. Je sens en vous du potentiel, vous ne voudriez pas le gâcher, non ? Je connais du monde ici, un petit mot de moi et pour vous, ce peut être « bonne réputation dans les orties ! »
Cette manipulation enrobée dans un dicton déformé fit sombrer le cerveau de Lola dans la soumission. Tant d’efforts, tant d’obstacles surmontés pour arriver jusqu’à cette thèse ! Elle ne voulait pas que tout s’écroule si près du but !
Dans son esprit maintenant déconnecté de son corps émergea un autre dicton « Main de fer au cul, fait basculer la vertu ».
Pour ne pas mettre en danger votre intégrité, soyez constamment vigilants dans les relations où les niveaux de pouvoir sont déséquilibrés. Faites-vous accompagner si possible.
RESTER DROIT à GAUCHE- professeur, efforts, paroles.
Ernest avait grandi dans un village du Borinage ; sa famille était pauvre ; le repas se limitait souvent à une soupe et à un quignon de pain ; les sorties étaient rares, et les dépenses calculées au moindre
cent. Bon élève, intelligent, curieux, travailleur, il était apprécié par ses professeurs.
Grâce à ses efforts, il devint ingénieur et trouva un poste dans une usine de sidérurgie ; il milita dans le syndicat socialiste de la région.
L’homme était admiré par ses camarades pour ses attitudes généreuses, pour ses extraordinaires compétences en mathématiques, en physique et en chimie et pour son empathie.
Au cours du temps, il mena de front ses activités professionnelles et politiques avec brio.
A 49 ans, il était devenu un des plus gros piliers du parti socialiste de la région.
Cindy, sa fille cadette, était tombée amoureuse d’un jeune homme grand, fort, à la voix grave et aux paroles enchanteresses.
Elle apprit qu’il était mêlé à des réseaux criminels et qu’il serait bientôt emprisonné durant plusieurs années. Elle vint trouver son père et lui demanda d’intervenir auprès de la justice.
Son épouse, une femme aimante, intelligente, terre à terre, avait entendu la conversation ;
« Abstiens -toi de t’immiscer dans une affaire aussi glauque, mon chéri !
Reste droit à gauche, camarade ! »
« Mettre la charrue dans les orties »
Route – Vie – Détente
Qui n’a pas débusqué un jour, en parcourant la campagne, une vieille charrue assaillie par les orties. Qui ne s’est attardé alors quelques instants sur le vieil outil relégué dans l’oubli, livré à la rouille et à une lente disparition sous ces plantes velues qui tiennent les humains à distance. Symbole d’une activité passée. Et qui n’a pas eu une pensée pour l’homme disparu qui sa vie durant a creusé son sillon avec cette machine ?
« Mettre la charrue dans les orties » est une expression très ancienne. Un consensus semble s’être établi parmi les spécialistes pour lui attribuer une origine romaine. On la retrouve en effet tout autour de la Méditerranée dans plusieurs langues et sous différentes variantes, par exemple en Espagne « Devolver la herramienta a la naturaleza », littéralement « Rendre l’outil à la nature ». Pour en savoir plus on pourra se reporter avec profit à l’excellent ouvrage de Gustave Costecalde « Vestiges de romanité dans la tradition orale paysanne », un travail d’enquête minutieux d’une exceptionnelle richesse.
Pendant de longs siècles, alors que les paysans ne pouvaient prétendre à une honnête retraite, leurs travaux n’étaient interrompus que par la mort ou l’impotence de la vieillesse qui la précédait de peu.
« Mettre la charrue dans les orties » signifiait tout simplement soit mourir soit être dans l’imminence de la mort. Il a mis la charrue dans les orties : c’est fini il ne reviendra plus jamais aux champs.
Bien entendu il ne faut pas prendre l’expression au pied de la lettre car la même charrue pouvait servir encore à plusieurs générations après le départ du patriarche. Il faut seulement y voir le symbole d’une route parvenue à son terme, d’une vie de labeur qui s’achève.
Mais le dicton a évolué. Aujourd’hui la cessation d’activité d’un agriculteur a d’autres causes et elle peut, par exemple, ouvrir une période de détente bien méritée et la relégation de l’outil ne signifie plus la fin de l’existence. D’autant que, comme l’objecteront certains, délaisser un outil n’implique plus la cessation de l’activité afférente, tant les progrès sont rapides et son remplacement nécessaire pour se plier aux exigences de la modernité.
Son sens ancien a donc été progressivement abandonné mais l’expression est restée. Nous savons tous les grandes difficultés auxquelles sont confrontés, de nos jours, certains de nos paysans poussés à la faillite et même parfois au suicide. D’où un glissement récent dans notre langue : « Mettre la charrue dans les orties » signifie aujourd’hui avoir décidé de tout abandonner. Il a mis la charrue dans les orties : il a laissé tombé, il a vendu son exploitation. Parfois, comme on l’a vu, tout simplement et de façon moins tragique : il a pris sa retraite.
Un dicton venu d’un temps lointain qui laisse deviner une revanche de la nature, pourtant devenue improbable.
Magnifique Chamans !
Je suis resté cloué par ton texte.
Je me suis dit : ce texte sorti du contexte « Drôles d’expressions » et proposé, par exemple dans une conférence au Collège de France ou sur France culture pourrait tromper son public tant sa vraisemblance semble évidente et l’analyse de l’expression ne pouvant être que l’oeuvre d’un érudit.
Bravo ! Je vais le relire plusieurs fois en ayant à chaque fois l’impression de me cultiver…alors que ce n’est qu’un canular.
Merci Loki. Je me suis en effet exercé avec un certain plaisir à parodier le ton docte de ceux qui savent. Je suis content que cela t’ai amusé.
Chercher midi en Espagne – Espagne, mort, campagne
L’origine de cette expression remonte à la guerre napoléonienne en Espagne. Les grognards souffraient beaucoup de la chaleur sous leur bonnet en fourrure. « Pourquoi notre Empereur est-il venu chercher midi en Espagne ? » devint une expression courante dans les rangs de la Grande Armée. Elle devint rapidement synonyme de « rechercher la difficulté ».
La défaite cuisante – au propre comme au figuré -et surtout les nombreux morts au combat, firent glisser le sens de l’expression vers « rechercher à tel point la difficulté que l’échec ne puisse qu’être complet ».
Après le retour des grognards dans leur famille, cette expression fut largement popularisée dans les campagnes françaises.
Moralité : abstenez-vous de rechercher la difficulté pour la gloriole, cela se retournera contre vous