Consigne d’atelier: écrire un conte cosmogonique qui réponde à une question choisie dans une liste. Dans le cas de ce conte, la question est le titre (ou inversement !)
Au commencement du monde, Dieu créa la terre, l’air, l’eau et le feu. Avec ces matériaux le grand architecte de l’Univers créa les planètes, les étoiles et tout le système céleste.
Et tout cela en trois jours seulement.
Au quatrième jour, il fit une pause et regarda son œuvre avec satisfaction. Il testa les différents systèmes cosmiques et fut satisfait de leur articulation et de leurs performances techniques. Tout cela tournait admirablement.
Il décida alors de perfectionner son œuvre en se concentrant sur une planète pilote qu’il appela Terre.
Après avoir créé océans et continents, il inventa les arbres et les plantes et s’amusa beaucoup en imaginant des formes et des tailles plus variées les unes que les autres, du baobab au brin d’herbe.
Au cinquième et au sixième jour, il trouva que cela manquait d’animation et il créa les animaux. Il laissa libre cours à sa créativité, de la baleine à bosse aux poissons des abysses, en passant par la girafe au long cou et ses drôles de taches. À la fin du sixième jour, un peu fatigué, il inventa un nouvel animal pas très fort, pas très rapide mais avec tout de même des idées plein la tête. Puis il alla se coucher.
Au matin du septième jour, il eut la surprise de trouver tout en désordre. Le dernier animal qu’il avait créé s’était développé de façon prolifique et avait tout mis sens dessus dessous. Dieu se mit en colère et convoqua Adam, le chef de famille et Ève, sa compagne. « Cela fait six jours que je m’échine à créer un monde pour vous accueillir et en une nuit, vous mettez tout en désordre !!! Remettez-moi tout ça comme il faut immédiatement ! ».
Ève répondit : « Seigneur, votre monde est plein de ressources mais il est triste, les enfants s’ennuient ! Et nous, nous avons du mal à distinguer les plantes et les animaux, comment voulez-vous que nous rangions ? »
En effet, le monde que Dieu avait créé ne comportait que cinq couleurs : le blanc, le noir, le gris, le mat et le brillant. Dieu se gratta la tête et réfléchit longuement. Et il eut l’idée d’éclairer plus puissamment la terre. Il rapprocha le soleil et eut alors la révélation des autres couleurs. Il peignit le ciel et les océans en bleu, les forêts en vert et la terre en brun. Cela le rendit très heureux et il inventa avec frénésie le vert, le jaune, le rouge et une infinité de nuances et de combinaisons qu’il lança joyeusement par-dessus la terre, comme une poignée de confettis.
Puis, il convoqua à nouveau Adam et Ève qui arrivèrent accompagnés d’une petite fille. « Alors !» dit Dieu très fier de lui, « Vous êtes contents maintenant ? ».
« Nous vous remercions Seigneur » dit Adam, « le monde est beaucoup plus beau et facile à ranger, nous allons en prendre bien soin ».
« Et c’est beaucoup plus distrayant pour les enfants » ajouta Ève, « mais il y a encore un petit problème ».
« Ah ? » fit Dieu en se grattant la barbe.
« Oui » répondit Ève, « ma petite Ameyaltzin – qui vit dans le pays que nous appelons Aztéca – est triste car son fruit préféré est tout gris ».
Dieu sourit et se pencha vers Ameyaltzin : « De quelle couleur le voudrais-tu, petite ? ».
La fillette intimidée par la grosse voix de Dieu courut se cacher derrière sa mère. Dieu s’approcha doucement : « N’aie pas peur, donne-moi ce fruit, je vais le rendre très beau pour toi ». L’enfant le lui tendit timidement et leva la tête. « C’est bien » dit Dieu, « en ton honneur il sera de la même couleur que tes petites joues ».
Merci Loki pour le joli complément qui me rend pareille à Ameyaltzin ! Oui dans ce conte, Dieu est un bricoleur, mais de génie. Quant à Adam et Éve, inutile de dire qu’il ne faut pas leur faire confiance lorsqu’ils promettent de faire bien attention au monde. D’ailleurs Dieu était un peu fatigué lorsqu’il créa ces animaux qui se révèlent fort exigeants et peu soigneux.
Très agréable lecture que cette allégorie où l’on comprend bien les affres de Dieu, en particulier lorsque, dans les années 60, il dut inventer la télé en couleur.
J’ai beaucoup aimé le nom de la fillette : Ameyaltzin ! Mais où es tu aller chercher cela !? C’est ce genre de détail qui fait un texte prenant !
Je vais vous dire un secret : Le huitième jour, Dieu inventa… le ketchup ! et ce fut le début du commencement des publications des nutritionnistes.
Très joli conte, fécond en images qui nous ramènent à notre monde imaginaire d’enfant.
Oui, moi aussi, j’ai adoré lire ce merveilleux conte sur l’un de mes sujets préférés : Dieu, le maître de l’art du bricolage.
Bravo d’avoir découvert au moins l’un des secrets de la Création : la raison pour laquelle les choses ont obtenu leur couleur finale.
Peut-être devrions-nous laisser poètes et romanciers nous dire pourquoi la banane est tordue, le ciel si bleu, les océans si profonds, les gens si seuls au milieu de la foule, Dieu bricoleur efficace, … …
Tu écris magnifiquement, Line ! Si j’avais ton talent, je publierais des livres, les uns après les autres.
P.S. J’ai eu beaucoup de mal à trouver de quel atelier tu parles au-dessus de ton texte. Je l’ai finalement trouvé sous l’un de mes propres textes ici. Avons-nous été inspirées par le même atelier d’écriture ou est-ce que je me trompe ?
Merci de tous vos compléments si élogieux, je vais devenir de plus en plus rouge comme une tomate !
Pour répondre à vos questions: Hermano, j’ai cherché un prénom aztèque puisque la tomate est de cette origine. Je l’ai trouvé ici: https://costaeric.fr/2015/04/22/sacrifices-azteques-prenoms-azteques/ , Ameyaltzin signifie “Petit printemps”.
Purana, la consigne d’atelier d’écriture vient d’un atelier en ligne que j’ai suivi en période de confinement. Il n’y a rien à voir avec les consignes que nous publions régulièrement avec Hermano. La consigne est très simple et résumée en haut du texte.
Et un petit complément d’information sur les couleurs… Je vous recommande les ouvrages érudits mais très plaisants à lire de Michel Pastoureau historien des couleurs dans le monde occidental (ce qui est déjà un sujet énorme). Il a écrit une multitude de livres sur le sujet, le dernier étant sur le Jaune. Voici déjà un petit livre en guise d’introduction pour ceux que le sujet intéresse… https://www.babelio.com/livres/Pastoureau-Le-petit-livre-des-couleurs/39019
Je ne me lasse pas de relire ce texte !
Merci Loki. Tu as gardé une âme d’enfant 🙂 et un peu de légèreté fait du bien. Je suis cependant certaine que tu as une explication toute scientifique à cette question métaphysique…