Attention : Cet atelier se déroule en deux phases séparées dans le temps.
Dans la première phase, faites une proposition selon la suggestion ci-dessous.
Dans la deuxième phase, quelques jours plus tard par exemple, saisissez-vous d’une proposition de votre choix et complétez !
Si vous n’avez pas fait de proposition pour la première phase, vous pouvez tout de même participer à la phase 2,
à condition qu’un petit choix de propositions soit déjà disponible…
Phase 1 : Proposition
- En une dizaine de lignes, chacun écrit le début d’une histoire mettant en scène
un ou plusieurs personnages qui seront décrits de manière précise. Ces premières lignes devront planter un contexte, un environnement, problématique ou pas, mais sans aller dans les arcanes d’une intrigue ou dans des révélations prématurées. Cela de façon à permettre à un autre auteur de continuer en faisant évoluer le récit à sa guise.
- Laisser quelques lignes blanches pour inviter un autre auteur à poursuivre.
- Écrire de nouveau, mais seulement 3 lignes susceptibles de faire rebondir ou d’orienter l’intrigue.
- Laisser encore quelques lignes blanches.
- Écrire encore seulement 3 lignes dans le même esprit.
Postez votre proposition dans la boite de commentaires ci-dessous.
Phase 2 : Écriture de l’histoire – possible dès qu’une ou plusieurs propositions auront été faites par les participants à cet atelier
- À partir d’une des propositions, écrire un texte qui reprend la proposition d’origine en complétant les lignes blanches (longueur du texte ajouté illimitée) et en conservant les “rebondissements” de la proposition d’origine.
Terminer le tout par une phrase
qui ouvre vers une réflexion philosophique ou une sorte de morale pour l’ensemble du texte.
- Recommencer avec une des autres propositions.
(ou avec chacune des autres propositions !).
- Et si le cœur vous en dit, écrire encore autre chose qui mélange plusieurs des histoires qui viennent d’être écrites.
Postez vos textes dans la boite de commentaires ci-dessous (1 texte par commentaire).
La journée allait être chaude, alors ils avaient décidé de profiter de la fraicheur du matin et s’étaient installés sur la terrasse pour ce premier petit-déjeuner ensemble. Sous la tonnelle couverte de jasmin, où filtraient déjà les premiers chauds rayons du soleil… ils rêvassaient.
Des moments prometteurs leur avaient été vendus par leur agence de tourisme : mer, soleil, chaleur, cocotiers…
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Sonia avait choisi l’endroit selon le vieux prétexte des poilus de 14 qui s’abritaient dans les trous d’obus, au motif qu’un obus ne tombe jamais au même endroit. Et, maintenant, ce grondement qui n’en finissait pas la faisait trembler. Julien, quant à lui, restait encore dans la torpeur de la nuit et semblait sourd à ce bruit qui inquiétait la jeune mariée.
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Ayant appris la terrible nouvelle, Marie-Amélie composa aussitôt un philtre et se lança dans les incantations magiques.
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Émilie est une jeune femme petite et belle. Jolie célibataire elle est à vingt-quatre ans professeur des Écoles et elle possède une vocation pour l’enseignement.
Malheureusement, la rentrée scolaire s’est mal passée, et puis René, son amoureux avec qui elle vivait depuis trois ans, a brusquement décidé de tout quitter pour aller s’installer au Laos. C’était mardi, il l’a appelée dans l’après-midi pour lui dire cela.
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Christian, quarante-cinq ans, est marié et a trois enfants. D’abord infirmier psychiatrique dans une maison de retraite pour déments séniles, il a décidé, après six mois d’arrêt de travail consécutifs à un remake de “Massacre à la tronçonneuse” par un vieux de l’établissement où il travaillait, d’en changer pour s’occuper d’un public qu’il espère plus agréable.
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Pour plaisanter, maladroitement, il assure à Émilie que pourtant, depuis Adam, l’Homme sait qu’il faut se méfier des pommes, … et des femmes.
“La Femme est l’avenir de l’Homme”, se reprend-elle à penser…
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Lucinda marchait le long du lac. Les écouteurs sur les oreilles, elle écoutait les Gnosiennes d’Érik Satie. Les accords harmonieux et les touches aériennes du piano étaient en harmonie avec le paysage qu’elle contemplait. Les blancheurs de l’aube laissaient maintenant la place aux reflets roses de l’aurore sur l’eau tranquille. L’élégante silhouette des pins se détachait sur le ciel clair. Elle se sentit envahie d’une grande paix. Son regard glissa sur les roseaux frangés de doré où les oiseaux commençaient à pépier.
C’est alors qu’elle aperçut une étrange tache rouge.
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L’épicière regarde avec désolation ses fruits et légumes se flétrir dans sa boutique. Désormais les rues sont vides et les rares passants se regardent en chiens de faïence.
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Ici, Fréquence Lac d’Argent, Julien Lozère en reportage à Saint-Sauveur-les-Pins : Un nouveau rebondissement dans l’affaire qui agite la ville depuis une semaine ! Monsieur le Maire Marc Lejeune a disparu ! On a retrouvé sa voiture abandonnée près du lac avec son portefeuille à l’intérieur. Celui-ci contenait ses papiers, sa carte de crédit et environ 500 euros…
Manuela est à sa caisse, répétant mécaniquement le même geste : prendre la marchandise, la passer devant la vitre de sa caisse, la reposer de l’autre côté. De toute façon Manuela n’est pas là : elle pense. Elle pense à la vie qu’elle pourrait avoir, qu’elle aura sûrement. Les clients passent devant sa caisse, transparents, comme elle est transparente pour eux. Il est loin le temps du Covid où on applaudissait les caissières, métier si utile à la société ! Au collège sa prof principale avait dit : Manuela ira loin. Dés 16 ans elle avait dû travailler pour aider mère l’élevant seule. Aujourd’hui elle rêve au prince charmant, mais il n’y a que, Monsieur André, le gérant du supermarché…
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Monsieur André est là qui se penche sur elle lascivement, la frottant de son corps pour lui expliquer la signification de certains codes.
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Sa mère lui avait dit : les hommes tous des porcs !
Les caravanes et les voitures sont astiquées., le provisions chargées, demain toute la famille se lèvera tôt et l’on attend ce départ préparé depuis longtemps. Paco est heureux, ce soir pour la dernière fois il répétera son chant flamenco pour son auditoire de la grande fête. Là bas il sait qu’il va retrouver son frère qui a choisi de changer de vie mais qui reste fidèle à ce rendez-vous annuel. Les chaises sont installées en cercle autour d’un feu de joie, on va chanter et danser car la fête commence ici, déjà on va s’imprégner de la ferveur des retrouvailles attendues, il ne faudra pas se coucher trop tard car la nuit sera courte, une longue route les attend jusqu’aux Saintes Maries de la mer.
Dans la foule bigarrée, d’où s’échappe de lieu en lieu des sons de guitare, Paco cherche son frère. Il s’attend à trouver sa haute stature, son chapeau à large bords mais il ne voit rien. Cet instant espéré où ils allaient tomber dans les bras l’un de l’autre semble retardé pour une raison inconnue.
Paco et Diego sont assis sur le bord du quai, le soleil vient de se coucher et une légère brise chargée de senteurs marines et d’odeurs de friture agite leurs cheveux longs et noirs. Paco arrache quelques notes tristes à sa guitare, le monde est en train de changer.
Émilie est une jeune femme petite et belle. Jolie célibataire elle est à vingt-quatre ans professeur des Écoles et elle possède une vocation pour l’enseignement.
Malheureusement, la rentrée scolaire s’est mal passée, et puis René, son amoureux avec qui elle vivait depuis trois ans, a brusquement décidé de tout quitter pour aller s’installer au Laos. C’était mardi, il l’a appelée dans l’après-midi pour lui dire cela.
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Le choc a été brutal. Il n’a pas pris de gants pour lui apprendre son départ. Pas une explication. Un ton sec sans chaleur. Elle n’a même pas eu le temps de réagir qu’il coupait la communication. Elle a tenté, en vain, de le rappeler, plusieurs fois. Le téléphone a sonné impitoyablement : occupé ! À cette rupture inattendue s’est ajoutée une rentrée scolaire catastrophique. Une classe venait d’être supprimée dans son école, elle était nommée dans un CM2 de 35 élèves. Elle avait déjà un CM2 l’année dernière, mais l’effectif n’était que le 24. Elle avait eu déjà beaucoup de mal avec cette classe. Chaque jour il fallait au moins un quart d’heure avant que les élèves ne se calment, ne sortent de leurs affaires et commencent à écouter. Un de ses collègues, ancien dans le métier, ne cessait de répéter : ils font partie de cette génération qui a pris la parole et ne l’a pas rendu ! Nous sommes en face d’enfants roi, ils ont été nourris, mais pas élevés. C’est à la famille d’imposer des limites à leurs enfants. La plupart ont abandonné. Toute la responsabilité repose maintenant sur l’école.
Christian, quarante-cinq ans, est marié et a trois enfants. D’abord infirmier psychiatrique dans une maison de retraite pour déments séniles, il a décidé, après six mois d’arrêt de travail consécutifs à un remake de “Massacre à la tronçonneuse” par un vieux de l’établissement où il travaillait, d’en changer pour s’occuper d’un public qu’il espère plus agréable.
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Comme éducation nationale est en manque de professeurs, Christian n’eut aucun mal à se faire engager comme professeur contractuel.
Le monde est vraiment petit il fut nommé, dans l’école d’Émilie, pour remplacer un professeur ayant démissionné pour aller élever des chèvres dans le Larzac. Leur première rencontre dans la salle des professeurs fut magique.
Cette rencontre prouve que le coup de foudre existe.
Émilie était prête pour une nouvelle idylle ayant appris par une amie que René en fait de Laos était parti avec une femme ayant deux fois son âge, mais ayant des talents cachés…
En peu de temps ils se racontèrent leurs malheurs respectifs
Pour plaisanter, maladroitement, Christian assura à Émilie que pourtant, depuis Adam, la femme sait qu’il faut se méfier des pommes, … et des hommes.
“ L’Homme est l’avenir de la Femme ”, se reprend-elle à penser…
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Avec Christian, Émilie oublia vite René avec sa couguar !
La petite enfance de Robin avait été heureuse ; avec ses parents et sa sœur Annie, il vivait dans une grande maison entourée d’un beau jardin ; il apprenait la clarinette.
Quand ses parents se séparèrent, il s’assombrit ; après le divorce, il devint triste et taiseux.
Il n’aimait plus l’école, ne s’intéressait plus aux sujets d’étude et ne prenait plus plaisir à côtoyer ses copains.
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Margot, la grand-mère de Robin, aimait les enfants. C’était une femme d’une grande bonté ; elle s’intéressait aux arts.
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Un jour des notes de violoncelle, une suite de J.S. Bach, lui parvinrent d’un appartement voisin.
La petite enfance de Robin avait été heureuse ; avec ses parents et sa sœur Annie, il vivait dans une grande maison entourée d’un beau jardin ; il apprenait la clarinette. Quand ses parents se séparèrent, il s’assombrit ; après le divorce, il devint triste et taiseux. Il n’aimait plus l’école, ne s’intéressait plus aux sujets d’étude et ne prenait plus plaisir à côtoyer ses copains.
Sa clarinette devint son unique compagne et il écoutait à longueur de soirées les notes claires et élégantes du concerto pour clarinette de Mozart. Douces et légères comme une plume d’oiseau, elles caressaient sa mélancolie, la nourrissaient tout en la contenant dans des limites raisonnables. Il revivait ainsi les temps heureux, porté par les harmonies gracieuses, s’envolant comme dans un rêve.
Qui pouvait comprendre sa peine ? Sa sœur Annie peut-être ? Mais maintenant elle vivait aux États-Unis où elle étudiait. Le dépaysement, les expériences nouvelles qu’elle vivait sur le campus et le décalage horaire l’éloignaient de lui. Quant à son père, il ne voulait plus lui parler. Et il échangeait le strict nécessaire avec sa mère avec laquelle il vivait. Il leur en voulait.
Alors à qui aurait-il pu parler ? D’ailleurs les mots restaient coincés dans sa gorge. Lorsqu’il avait trop de peine il se jetait à corps perdu dans ses partitions et jouait, jouait à perdre haleine.
Margot, la grand-mère de Robin, aimait les enfants. C’était une femme d’une grande bonté ; elle s’intéressait aux arts
Elle aimait beaucoup Mozart, mais son concerto lui donnait le cafard lorsque son Robin bien-aimé l’écoutait en boucle. Aussi, chaque fois qu’elle était chez sa fille, elle écoutait la clarinette de Sydney Bechet, espérant convertir son petit-fils à ce répertoire. C’était souvent tout aussi mélancolique mais la tristesse avait là une sorte de rondeur, une mélancolie dansante qui vous faisait irrésistiblement bouger en rythme, vous ramenant ainsi à la vie. Le chant plaintif de l’instrument laissait entrevoir une sorte d’espoir. Il s’autorisait même des moments de joie franche où il était impossible de ne pas danser et d’avoir le cœur joyeux.
Mais Robin ne l’entendait pas de cette oreille et continuait de se complaire dans des registres plus classiques et mélancoliques.
Un jour des notes de violoncelle, une suite de J.S. Bach, lui parvinrent d’un appartement voisin.
La délicatesse de ce morceau ravit son âme tourmentée. Il improvisa alors un duo avec le violoncelle reprenant avec brio la mélodie jouée. Surpris, celui-ci s’interrompit… puis joua un autre morceau… que Robin attrapa au vol tout aussitôt. Puis au bout d’un moment il s’arrêta. Dans la rue, les bruits semblaient en suspension… Le violoncelle était-il parti ou cherchait-il sa réplique ?
De longues minutes s’écoulèrent…
Puis des notes de piano résonnèrent, doucement suivies par le tendre violoncelle… La même séquence fut répétée trois fois telle un point d’interrogation dans l’air…
Et soudain, les notes de clarinette jaillirent clairement, allant à la rencontre du duo piano-violoncelle pour donner corps au trio de Beethoven pour ces trois instruments.
C’est ainsi que naquit une belle amitié entre Robin, Martha la violoncelliste et son frère Léo le pianiste. De ce jour, Robin joua la vie allegretto et s’il continua de voguer sur les nuages, ce fut joyeusement.
La petite enfance de Robin avait été heureuse avec ses parents et sa sœur Annie, il vivait dans une grande maison entourée d’un beau jardin ; il apprenait la clarinette.
Quand ses parents se séparèrent, il s’assombrit ; après le divorce, il devint triste et taiseux. Il n’aimait plus l’école, ne s’intéressait plus aux sujets d’étude et ne prenait plus plaisir à côtoyer ses copains. Sa grande soeur, au seuil de l’adolescence expérimentait ses talons hauts et dissimulait son chagrin dans une fuite sans fin avec d’innombrables copines. Robin trouvait sa situation injuste, comment se faisait-il que ses parents qu’il aimait tant aient pu en arriver là. Il ne comprenait rien et il leur en voulait de ne pas avoir réussi à s’entendre. Certes il avait souvent perçu de réelles tensions entre eux même s’ils avaient tenté de l’épargner mais quand ils lui annoncèrent la nouvelle ce fut pire qu’un tremblement de terre et il avait senti un immense vide s’ouvrir sous ses pieds, enfin, sa situation ne pouvait se comparer qu’aux plus grandes catastrophes. Ils ont eu beau présenter la chose sous son meilleur jour : “Vous continuerez à nous voir l’un et l’autre, nous passerons chacun du bon temps avec vous et votre mamie va prendre soin de vous en attendant que nous nous organisions…”, il en voulait au monde entier et un jour, dans une explosion de rage, il alla même jusque’à casser sa clarinette.
Margot, la grand-mère de Robin, aimait les enfants. C’était une femme d’une grande bonté ; elle s’intéressait aux arts et avait fondé de grands espoirs sur son petit fils qui très tôt avait manifesté du goût et surtout d’exceptionnelles aptitudes pour la musique. Aussi fut-elle assaillie d’une immense tristesse quand elle découvrit dans le jardin les restes de l’instrument. La maison était devenue silencieuse, Robin s’enfermait dans sa chambre. Ses partitions dormaient à côté de son écran de jeux vidéo qui absorbait désormais l’essentiel de son temps. C’est dans le monde virtuel qu’il avait trouvé son refuge. Il y vidait sa rancoeur et s’évadait de sa souffrance en poursuivant des monstres qu’il détruisait avec de plus en plus d’habileté. Parfois il jouait avec un copain avec lequel il faisait d’interminables parties à distance. Ainsi passèrent de mornes semaines. Margot qui comprenait l’attitude de Robin et savait lui prodiguer un amour inconditionnel ne perdait pas espoir de le voir un jour sortir de sa torpeur. Même s’il affichait une indifférence de façade elle avait perçu un petit éclat dans son regard une fois où il se trouva en sa présence alors qu’elle écoutait un de ses morceaux préférés. Son copain l’invita à passer une journée chez lui, Robin s’y rendit et l’accueil chaleureux de la famille l’incita à y revenir, ce qu’il finit par faire de façon régulière.
Un jour des notes de violoncelle, une suite de J.S. Bach, lui parvinrent d’un appartement voisin.
“To be or not to be harassed” (Être ou ne pas être harcelée) Chacun sa version…
Sur une proposition de Loki (texte en rouge) que je me suis régalé à compléter :
Manuela est à sa caisse, répétant mécaniquement le même geste : prendre la marchandise, la passer devant la vitre de sa caisse, la reposer de l’autre côté. De toute façon Manuela n’est pas là : elle pense. Elle pense à la vie qu’elle pourrait avoir, qu’elle aura sûrement. Les clients passent devant sa caisse, transparents, comme elle est transparente pour eux. Il est loin le temps du Covid où on applaudissait les caissières, métier si utile à la société ! Au collège sa prof principale avait dit : Manuela ira loin. Dès 16 ans elle avait dû travailler pour aider mère l’élevant seule. Aujourd’hui elle rêve au prince charmant, mais il n’y a que Monsieur André, le gérant du supermarché…
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Ses collègues, autant les hommes que les femmes lui paraissent inintéressants. Elle trouve que les hommes ne savent que parler football ou rigoler de blagues salaces, quant aux femmes elles lui paraissent évaporées et trop serviles devant Monsieur André.
Tout le monde l’appelle “Monsieur André” par respect et c’est le plus ancien dans le magasin bien qu’il n’ait pas encore quarante ans et qu’il soit là depuis seulement cinq ans. On sait que Monsieur André est revenu vivre chez sa mère depuis son divorce l’an dernier. Les filles parlent souvent de lui en ricanant. C’est un grand blond qui a belle allure, mais on ne sait pas vraiment que penser de lui : il semble à la fois aimable et souriant, mais il paraît aussi capable d’une grande violence si quelqu’un ou quelque chose vient en travers de son chemin. Bref, il est à la fois attirant et inquiétant, surtout quand on voit son regard de patron trainer un peu trop sur les appas de ses jeunes employées. Mais, après tout, ce n’est qu’un homme, et c’est le patron, se disent-ils tous. Avec lui, Manuela est sur la réserve, elle n’est là que depuis quelques semaines et attend de mieux le connaître pour juger.
Hier, Monsieur André lui a demandé de rester jeudi soir après l’heure, pour lui montrer le maniement d’une nouvelle caisse enregistreuse qu’il compte bientôt acheter, et avoir son avis sur ce nouveau matériel. Manuela est à la fois fière qu’il lui fasse confiance et un peu inquiète de se retrouver seule avec lui. Elle ne sait pas quoi penser de ce type pourtant gentil et correct avec elle, mais qui ne cesse de la regarder toute la journée. C’est un bel homme après tout, et elle ne dirait peut-être pas non, mais elle a peur d’avoir peur. “Enfin, se dit-elle, nous serons seuls tous les deux sans tous ces abrutis, et je verrai bien qui est vraiment Monsieur André.”
Jeudi vers 19h30, elle arrive dans le bureau de Monsieur André et pose son sac à main et une boîte noire sur l’étagère. Elle accroche sa parka au porte-manteau derrière la porte. Il fait déjà nuit dehors ; Manuela est maintenant assise depuis dix minutes devant le clavier de la nouvelle machine et suit les instructions de son patron debout derrière elle. Il s’approche.
Monsieur André est là qui se penche sur elle lascivement, la frottant de son corps pour lui expliquer la signification de certains codes.
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Manuela sent son souffle dans son cou et elle aime ça, elle aime la pression de ce torse viril sur ses épaules, mais elle sait qu’il lui faudra protester un peu. D’une voix craintive, elle fait :
Pourtant, elle ne se retire pas, c’est lui qui s’éloigne un peu et fait un pas en arrière.
Monsieur André retient sa main et l’attire un peu à lui. Elle se laisse faire et vient se blottir contre son épaule. Elle reste comme cela pendant presque une minute, sans bouger et sans que lui-même ne bouge, puis elle lève la tête pour chercher ses lèvres, d’abord doucement, des baisers de papillon, puis avec de plus en plus de fougue.
Les locaux de l’entreprise sont déserts à cette heure-ci. Ils continuent comme cela de s’embrasser et de se regarder au fond des yeux pendant un long moment. Leurs mains commencent à caresser les cheveux l’un de l’autre puis les épaules, le dos.
Manuela est trop romantique pour aller plus loin sur le bureau de Monsieur Henri et trop bien élevée pour coucher le premier soir. Elle fait :
Version alternative
Monsieur André est là qui se penche sur elle lascivement, la frottant de son corps pour lui expliquer la signification de certains codes.
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Manuela sent son souffle dans son cou et ça la dégoute, elle panique en sentant la pression de ce torse viril sur ses épaules. Comme un marin en perdition, elle pense “May day, May day, May day”, mais elle retrouve rapidement son sang-froid.
Elle se lève et fait maintenant face à Monsieur André :
Elle recule jusqu’à son sac à main qu’elle a posé tout à l’heure sur l’étagère face au bureau et à côté duquel elle a aussi laissé une petite boîte noire !
Et sur ces mots, elle prend son sac et la caméra, s’empare de son manteau, bouscule Monsieur André qui se retrouve catapulté dans son confortable fauteuil de patron, dévale l’escalier et se retrouve dans la rue, haletante, avant de se perdre dans la foule d’un jeudi soir ordinaire.
Sa mère lui avait dit : les hommes tous des porcs !
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Manuela s’en souvient et se dit, pensive :
Sa mère lui avait dit : les hommes tous des porcs !
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Manuela s’en souvient et se dit :
Elle a bien raison, ma mère ! Ah ! Comme les temps ont changé… Ô tempora, Ô mores !
P.S.
Il n’y a qu’un pas du Capitole à la roche Tarpéienne…
C’est une bonne idée de proposer deux versions au texte !
arx Tarpeia Capitoli proxima
Aux Saintes Maries, sur une proposition de Chamans
N.B. Pendant votre lecture, merci d’écouter ceci, pas trop fort…
Les caravanes et les voitures sont astiquées, les provisions chargées, demain toute la famille se lèvera tôt et l’on attend ce départ préparé depuis longtemps. Paco est heureux, ce soir pour la dernière fois il répétera son chant flamenco pour son auditoire de la grande fête. Là-bas il sait qu’il va retrouver son frère qui a choisi de changer de vie mais qui reste fidèle à ce rendez-vous annuel. Les chaises sont installées en cercle autour d’un feu de joie, on va chanter et danser car la fête commence ici, déjà on va s’imprégner de la ferveur des retrouvailles attendues, il ne faudra pas se coucher trop tard car la nuit sera courte, une longue route les attend jusqu’aux Saintes Maries de la mer.
Le campement, installé au Chemin de Labarde, au Nord de Bordeaux, est en effervescence en cette veille du départ. On est le 22 mai, les journées sont déjà longues et chaudes. Demain le départ, pour avoir le temps de s’installer et d’être fins prêts pour la fête et pour la petite prestation de Paco le 24, vendredi prochain. Pendant une semaine les enfants n’iront pas à l’école, les instituteurs n’aiment pas trop, mais c’est comme ça : pas négociable. Ils emmènent même Robin, un copain d’école de leur fils Agustín, malgré les protestations de sa grand-mère Margot qui continue de voir les gitans comme des voleurs de poules !
Il est 22 heures et la nuit est tombée depuis quelque temps, mais le temps est lourd et il fait encore chaud. Paco a décidé de répéter pendant encore une heure avec sa famille et quelques voisins. On a allumé un feu et on entend des voix qui s’interpellent en espagnol dans le soir, puis c’est le silence et, après quelques notes de guitare, le chant de Paco s’élance, poignant. La guitare accélère, ralentit, s’affole de nouveau. On entend claquer les mains et les castagnettes, et voilà que Manuela, la femme de Paco, s’avance dans sa tenue de gitane et entame une danse de flamenco encore plus fascinante dans la lueur des flammes qui accompagnent son corps.
Je dois dire que Manuela travaille à Bacalan dans un supermarché et qu’elle ne revêt cette belle tenue traditionnelle de gitane que pour les grands évènements. D’habitude, elle est en chemisier et en jeans. “Ah ! si Monsieur André savait ! S’il me voyait danser comme cela !” se dit-elle en continuant de plus belle à défier les flammes.
Dans la foule bigarrée, d’où s’échappe de lieu en lieu des sons de guitare, Paco cherche son frère. Il s’attend à trouver sa haute stature, son chapeau à large bords mais il ne voit rien. Cet instant espéré où ils allaient tomber dans les bras l’un de l’autre semble retardé pour une raison inconnue.
La route a été longue depuis Bordeaux, environ une dizaine d’heures. C’est de nouveau le soir mais l’air de la mer rend l’atmosphère plus fraîche. Paco a installé sa caravane, les enfants jouent, ils ont retrouvé quelques copains de l’année dernière où il avait tant plu. Heureusement, la météo est meilleure aujourd’hui et la fête sera belle. Encore presque deux jours, Paco aura le temps de se reposer et de répéter encore un peu. Mais, d’abord, il doit trouver José María, son frère, qui vient d’Alsace avec sa caravane rouge. Paco commence à chercher cette couleur parmi les centaines de caravanes déjà installées là. Il y a seulement deux caravanes rouges, mais pas celle de son frère. Son frère, beaucoup plus jeune que lui, encore célibataire et qui envisage, Paco ne comprend toujours pas pourquoi, d’aller s’installer au Japon et d’y installer une boîte de flamenco. Une folie ! Mais comment va-t-il se débrouiller au Japon !? Paco imagine en souriant les geishas se livrant à un flamenco endiablé… !
– “Bon, se dit-il, il ne doit pas encore être arrivé… mais son téléphone ne répond pas, c’est bizarre.” Et Paco retourne à son campement pour le repas du soir.
Alors que la nuit est déjà tombée, un homme s’approche de la caravane de Paco et Manuela. “Bonsoir, dit l’homme, je suis Diego et c’est José María qui m’envoie. Tu es bien Paco, son frère ?”.
– “Oui, c’est bien moi, fait Paco inquiet, qu’est-ce qui se passe ?”
– “Eh bien, fait Diego, ton frère n’a pas voulu perturber ton voyage, c’est pour ça qu’il ne t’a rien dit et qu’il m’envoie t’expliquer pourquoi il n’est pas là.”
– “Mais qu’est-ce que tu attends ? Dis-moi ce qui se passe !”
– “Eh bien, ton frère a rencontré une jeune japonaise, il y a quelques temps, elle s’appelle Nikumi, mais elle se fait appeler Lucinda. Il l’a rencontrée au Lac d’Annecy l’été dernier, tu y étais toi aussi et je crois bien que tu l’as déjà vue.”
– “Oui… Peut-être… Je ne me souviens pas vraiment… Et alors !”
– “Pendant l’hiver Lucinda, ou plutôt Nikumi, est venu s’installer à Colmar pour ouvrir un magasin de sushis et de spécialités japonaises, et ils se sont retrouvés… Tu vois la suite… ?”
– “Heu… pas très bien, en fait.”
– “Eh bien, je vais te faire court : il se sont mis ensemble depuis le mois de février, ton frère a commencé des cours de japonais, il est très amoureux, et à l’heure ou je te parle, il doit atterrir sur l’aéroport de Tokyo.”
– “Madre! Lo hizó! Il l’a fait, il l’a donc fait ! s’étonne Paco, abasourdi.
Dans sa tête se mélangent les guitares, les geishas et les flamencas, les tapas et les sushis, les aéroports et les caravanes, les délicats haïkus et les fiévreux flamencos, le Fuji Yama et la Sierra Nevada, Picasso et Kitagawa, García Lorca et Mishima, Almodóvar et Kurosawa. Seules les chevelures restent d’un noir d’ébène. Paco reste pensif un long moment, il regrette de ne pas voir son frère cette fois-ci. Quand le reverra-t-il de nouveau ? Diego, le messager, respecte le silence, il est là, accroupi sur le sol à regarder Paco et il attend qu’il reprenne ses esprits.
– “Viens”, lui fait Paco au bout de plusieurs minutes, et il prend sa guitare.
Paco et Diego sont assis sur le bord du quai, le soleil vient de se coucher et une légère brise chargée de senteurs marines et d’odeurs de friture agite leurs cheveux longs et noirs. Paco arrache quelques notes tristes à sa guitare, le monde est en train de changer.
Lucinda marchait le long du lac. Les écouteurs sur les oreilles, elle écoutait les Gnosiennes d’Érik Satie. Les accords harmonieux et les touches aériennes du piano étaient en harmonie avec le paysage qu’elle contemplait. Les blancheurs de l’aube laissaient maintenant la place aux reflets roses de l’aurore sur l’eau tranquille. L’élégante silhouette des pins se détachait sur le ciel clair. Elle se sentit envahie d’une grande paix. Son regard glissa sur les roseaux frangés de doré où les oiseaux commençaient à pépier.
C’est alors qu’elle aperçut une étrange tache rouge.
……..
Elle s’approcha du lac pour mieux apercevoir cette étrange tache rouge.
Sa première réaction fut de penser que cette tache pouvait provenir d’un gibier, tel qu’un canard abattu par un chasseur.
Rien ne flottait à la surface. Cette hypothèse était peu crédible, car elle aurait entendu des coups de feu. Quoique ses écouteurs sous les oreilles auraient atténué le bruit.
Ce qui l’intrigua ensuite, ce fut une odeur un peu forte, proche de l’ozone. Elle avait souvent senti cette odeur à la suite d’un orage. Aujourd’hui cette odeur était plus intense et plus le temps passait, elle se sentait oppressée. Un mal de tête commençait à gagner son cerveau. Était-ce les Gnosiennes d’Érik Satie ou cette fragrance inattendue ?
Sans chercher à résoudre ce problème, elle retourna au village, afin de prendre un Doliprane.
D’emblée en arrivant au centre du bourg, elle ressentit une atmosphère anormale. Une atmosphère électrique semblait entourer les maisons et l’odeur particulière qu’elle avait détectée au bord du lac était présente. Ce qui la frappa immédiatement.
C’est que l’épicière regardait avec désolation ses fruits et légumes se flétrir dans sa boutique. Désormais les rues étaient vides et les rares passants se regardaient en chiens de faïence.
………
Ce jour-là il eut une recrudescence de maux de tête, de gens nauséeux et les urgences de la ville à côté firent le plein.
On attribua cette épidémie à la propagation d’un nouveau virus provenant sans aucun doute de la Chine.
La gazette du pays fit la première page de cette épidémie, et peu à peu les choses redevinrent normales.
Et pourtant…
Ici, Fréquence Lac d’Argent, Julien Lozère en reportage à Saint-Sauveur-les-Pins : Un nouveau rebondissement dans l’affaire qui agite la ville depuis une semaine ! Monsieur le Maire Marc Lejeune a disparu ! On a retrouvé sa voiture abandonnée près du lac avec son portefeuille à l’intérieur. Celui-ci contenait ses papiers, sa carte de crédit et environ 500 euros…
Le ministre de la Défense était furieux ! Il venait de recevoir un coup de fil du Président de la République qui ne l’était pas, moins.
La France expérimentait une nouvelle arme chimique à utiliser sur un théâtre d’opérations.
Un crétin d’officier, chargé de transporter ces armes dans son avion avait malencontreusement lâché un obus au-dessus du lac d’argent.
Cet abruti, sans en référer à ses supérieurs, il avait pris l’initiative d’aller faire liquider par des nervis, le maire de Saint-Sauveur-les Pins, pensant ainsi neutraliser un témoin gênant.
Il dort actuellement dans une prison militaire à Cayenne. Heureusement que l’eau du lac avait dilué partiellement le principe actif de l’arme chimique, sinon cela aurait été une catastrophe !
Émilie est une jeune femme petite et belle. Jolie célibataire elle est à vingt-quatre ans professeur des Écoles et elle possède une vocation pour l’enseignement.
Malheureusement, la rentrée scolaire s’est mal passée, et puis René, son amoureux avec qui elle vivait depuis trois ans, a brusquement décidé de tout quitter pour aller s’installer au Laos. C’était mardi, il l’a appelée dans l’après-midi pour lui dire cela.
Elle est restée sous le choc, tiraillée entre haine et chagrin. Elle ne s’est douté de rien et elle en veut à mort à René de s’être montré aussi hypocrite. La veille de son coup de fil ils passaient encore une soirée en amoureux dans un de leurs restaurants de prédilection. Il est vrai qu’il avait préféré rentrer tôt pour dormir prétextant une grande fatigue, sans pour autant éveiller de soupçons, elle avait en lui une confiance sans limites.
Pour couronner le tout cette cruelle déception amoureuse se cumule avec des ennuis au travail. Emilie, encore débutante dans le métier, a passé une année scolaire de rêve avec une classe de CM1 qui a confirmé sa passion pour l’enseignement, les retours des élèves et de leurs familles ont été enthousiastes. Un vrai bonheur. Aussi à la rentrée s’est-elle présentée dans les meilleurs dispositions à la nouvelle directrice de cet important centre scolaire, mais ce fut pour apprendre abruptement qu’on lui a ôté cette classe qu’elle devait suivre en CM2 et pour laquelle elle a conçu de grands projets. La décision lui fut annoncée tardivement, sans ménagement et sans explications, la cerise sur le gâteau étant que cette classe a été confiée à la compagne de la directrice.
Pour Emilie la coupe est pleine et toute motivation s’est envolée, elle se rend chaque jour à son collège comme une automate.
Christian, quarante-cinq ans, est marié et a trois enfants. D’abord infirmier psychiatrique dans une maison de retraite pour déments séniles, il a décidé, après six mois d’arrêt de travail consécutifs à un remake de “Massacre à la tronçonneuse” par un vieux de l’établissement où il travaillait, d’en changer pour s’occuper d’un public qu’il espère plus agréable.
Christian est arrivé deux semaines après la rentrée, recruté comme contractuel pour ce nouveau métier dont il n’a aucune pratique. Emilie s’est tout de suite rapprochée de lui pour le rassurer et l’aider dans cette phase toujours délicate de prise de contact avec les enfants et les collègues. Très rapidement ils ont sympathisé. Après quelques jours, alors qu’à ses yeux tout semble plutôt bien se passer Christian est convoqué par la directrice qui lui fait vertement comprendre que ses initiatives pédagogiques ne sont pas les bienvenues et qu’il doit rapidement corriger le tir dans le sens d’une plus grande fermeté, les élèves sont là pour apprendre à obéir, ce n’est pas dans la mollesse que l’on peut progresser. Christian n’a pas l’habitude d’être traité ainsi, lui qui a quitté son ancien établissement en héros pour s’être courageusement interposé devant un résident en pleine crise de démence qui avait réussi à s’emparer de la tronçonneuse du jardinier. De l’avis de tous son intervention, qui lui a coûté un profonde blessure, a évité une véritable boucherie.
Bien sûr, à la première récré, il en parle rapidement à Emilie et ils se fixent un rendez-vous le lendemain, mercredi, chez elle, pour disposer de plus de temps et préparer la riposte. Avant d’aborder les problèmes professionnels Christian qui a le coeur lourd se livre également sur sa vie privée, sa femme est en train de le quitter. Il pense surtout à sa fille et ses deux garçons qu’il aime par dessus tout. Emilie se confie à son tour et lui lâche toute la haine dont elle ne se serait jamais crue capable et qui l’envahit nuit et jour contre René et la directrice. Une obsession. Quand Christian lui prend la main elle ne la retire pas. Ainsi passe une douce après-midi de tendre complicité, de défoulement sexuel dont ils avaient besoin l’un et l’autre. Il n’y est pas question d’amour, les blessures sont trop fraîches, mais d’un moment d’union réconfortante de deux êtres malmenés par la vie. Avant de partir Christian se saisit d’une pomme laissée sur la table, la jette en l’air et la rattrape à la manière d’un jongleur. “Notre péché” dit-il dans un demi-sourire.
Le cadavre de la directrice du centre scolaire Isaac Newton a été trouvé au bas d’un escalier. La présence d’un trognon de pomme à ses côtés a orienté tout le monde vers l’hypothèse d’une malencontreuse glissade, la gravité ayant fait le reste en précipitant le corps de la malheureuse au bas des marches.
Christian n’éprouve même pas le besoin de simuler le remords auprès de sa jeune collègue. Les deux se sentent au contraire envahis par un fort sentiment de juste libération et par la certitude que leur sort est désormais lié.
Pour plaisanter, maladroitement, il assure à Émilie que pourtant, depuis Adam, l’Homme sait qu’il faut se méfier des pommes, … et des femmes.
“La Femme est l’avenir de l’Homme”, se reprend-elle à penser…
Je vous trouve tous très inspirés.
Bravo !
Je partage l’enthousiasme d’Hermano. Votre imagination et votre humour me ravissent ! Une belle production de sept histoires, précédées de “starters” bien fournis, riches mais pas trop enfermants, la preuve par votre production. J’aime bien aussi lorsque les personnages se rassemblent pour d’improbables rapprochements du type tapas/sushis. Merci pour ce réjouissant melting-pot !
Manuela est à sa caisse, répétant mécaniquement le même geste : prendre la marchandise, la passer devant la vitre de sa caisse, la reposer de l’autre côté. De toute façon Manuela n’est pas là : elle pense. Elle pense à la vie qu’elle pourrait avoir, qu’elle aura sûrement. Les clients passent devant sa caisse, transparents, comme elle est transparente pour eux. Il est loin le temps du Covid où on applaudissait les caissières, métier si utile à la société ! Au collège sa prof principale avait dit : Manuela ira loin. Dés 16 ans elle avait dû travailler pour aider mère l’élevant seule. Aujourd’hui elle rêve au prince charmant, mais il n’y a que, Monsieur André, le gérant du supermarché…
En fait, Manuela n’apprécie pas du tout Monsieur André ; elle est une jeune fille raisonnable, très débrouillarde, maligne, organisée comme du papier à musique et frappée au coin du bon sens ; elle n’a pas envie de se rapprocher d’un homme juste pour ” tirer un coup” et sûrement pas de celui -là. Elle rêve d’un homme avec qui elle partagerait des choses ; elle souhaite construire un amour qui durerait et créer une famille. Elle a déjà vécu plusieurs expériences de harcèlement ; organisée, déterminée, elle a mis au point un plan de défense ; mais elle se garde bien d’exprimer ses souhaits et ses stratégies à ses collègues. Au boulot, elle fait ce qu’on lui demande ; elle se montre polie, serviable mais pas trop ( faut pas la prendre pour une bonne poire!). Avec le gérant, elle garde des distances. Quand Monsieur André lui propose de rester après les heures de travail pour lui donner des explications supplémentaires, elle se dit: ” c’est cousu de fil blanc!”. Elle prépare la séance ; elle se procure une bombe de gel au poivre qu’elle cache dans une poche de son sac à main. A l’heure dite, elle entre dans le bureau du gérant et s’assied sur la chaise la plus éloignée de la sienne. Elle accroche son sac à main à la chaise. L’homme se rapproche d’elle petit à petit sous prétexte de myopie.Monsieur André est là qui se penche sur elle lascivement, la frottant de son corps pour lui expliquer la signification de certains codes.
– Oui, dit Manuela, j’ai bien compris la signification des codes ; je vais les noter dans mon smartphone ; elle saisit alors la bombe de défense et asperge très généreusement son interlocuteur de gel au poivre. Elle s’enfuit et laisse Monsieur André, seul dans son bureau ; il éternue sans arrêt.
Elle repense à ce que sa mère lui avait dit: ” les hommes tous des porcs”