Atelier du 27 Novembre à Villenave d’Ornon

Lettre de Lucette

 Ma chère Héloïse,

Ô ma douce amie

sous les donjons de ce Bourg

combien ai-je rêvé

aux courbes sensuelles

de ta silhouette galbée.

Ô ma douce amie

ton rire cristallin

chante le temps

aux cascades de nos sources

pour l’éternité.

Ô ma douce amie

les sons du vent

entre les arches de pierre

dessinent les courbes de ton corps.

Ô ma douce amie

te retrouver

te serrer

dans la voute de mes bras

ma chaleur pénètre ton cœur.

Ô ma douce amie

reçois mon amour

encore et encore

à jamais

pour l’infini.

Ton Philémon

Réponse de Maryline à la lettre de Lucette …

Mais tu ne connais pas l’envers du décor… Moi, qui connais bien ce lieu, je peux te dire que les fantômes hantent cet endroit. En effet, au temps des croisades, les chevaliers teutoniques massacrèrent les habitants de ce village car ils avaient refusé de se soumettre. On raconte que le siège fut terrible. Depuis les mâchicoulis de la poix brûlante fut versée sur les assaillants. Mais ceux-ci ne faiblirent pas et grimpèrent inexorablement en grappes serrées à l’assaut des murailles. Armés de masses d’armes et d’épées tranchantes ils défoncèrent et découpèrent moultes têtes et jambes. Les morceaux volaient dans un ciel gonflé comme une panse d’âne qui pendait très bas, menaçante au-dessus des têtes. Les chevaliers teutoniques essuyèrent beaucoup de pertes mais ils grouillaient comme des mouches et finalement, ils parvinrent à pénétrer dans la citadelle ; Ahanant, grognant sous leurs armures maculées de sang, ils s’en donnèrent à cœur joie, transperçant et tranchant les honnêtes citoyens de Belvès, violant les femmes, embrochant les nourrissons, faisant main basse sur les trésors de la cathédrale avant d’y enfermer les derniers survivants et d’y mettre le feu en poussant des cris déments !

Voilà pourquoi, cher Philémon, les fantômes hantent les rues et les ruines de Belvès les soirs de lune rousse. Ces jours-là on aperçoit le fantôme du châtelain et son linceul ensanglanté, celui de la châtelaine qui se tord les mains en hurlant vers le ciel rouge pendant qu’une ribambelle de squelettes danse sur la place du lavoir en s’entrechoquant !

Je connais cette histoire depuis fort longtemps et crois-moi, ce n’est pas une légende, car il m’est arrivé lorsque j’étais enfant d’assister à cette diabolique sarabande. Aussi, imagine quel fut mon effroi, cher Philémon, lorsque je reçus ta carte postale ! Je vois là un signe que notre relation est maudite. C’est pourquoi, cher Philémon, je souhaite y mettre un terme dès aujourd’hui !

Héloïse