Avec A
J’ai bu de la bière
Dans l’ombre chaude d’un vieux fort
Avec B
J’ai devisé sous le grand chêne conversation
Et à la table près de la mer
Avec C
J’ai tant ri
De nos sottises gauloises
Avec D
J’ai martyrisé les draps
De ce grand lit King size
Avec E
J’ai pris une douche au grand air
Sur la plage de Cassy
Avec F
Un bout de sein à la piscine municipale
l’odeur La sueur d’un parking souterrain
Avec G
J’ai vidé les encriers
J’ai écrit, écrit, tant écrit
Avec H
J’ai flirté
Dans l’eau des baïnes
Avec I
J’ai voyagé longtemps
En confidence
Avec K
J’ai traversé la mer du Nord
Une nuit d’été
Avec L
J’ai parlé toute la nuit
Dans une cuisine d’Edimbourg
Avec M
Un instant de cœur
Battant au téléphone
Avec N
Nos nuits de travail
Et de restaurant d’aéroport
Avec O
Des baisers d’enfant
Sous les fleurs du pommier
Avec P
D’interminables étreintes
Dans la sacristie
Avec Q
Une vie de sac à dos
À chasser les papillons sur les cordillères
Avec R
Des nuits de vendanges
Au seuil de la mort
Avec S
Cette promenade d’après-midi
Sur le toit vernis de la cathédrale de Zagreb
Avec T…
Avec toi, j’avais tout oublié, recommencé tous les rires et toutes les extases,
le doute et la joie.
Et maintenant sans toi mais avec toi mais sans toi mais avec toi, comme dans un vieux film à 3 images par seconde, une roue de la fortune qui n’en finit pas.
J’adore ce poème, sa forme folle incluse.
Le style systématique ressemble à celui d’un journal de bord de marin, ceci jusqu’au T (oui, en majuscule !) où un changement abrupt de forme ainsi que de fond se produit.
Dans la chute, l’auteur a habilement réussi à transférer l’urgence d’en dire le plus possible en quelques lignes : il y a une précipitation, on trébuche sur ses mots, on bégaie en répétant les mêmes mots et puis, toutes les lettres qui suivent le T, font partie de ce “Toi”, y compris le Z final sans fin.
Toi, monUnisson, ma Vie, mon Why-not-right-now, l’X et l’Y de nos chromosomes, mon Zèbre, mon Zen, mon Zénith.
Fabuleux !
J’ai beaucoup aimé lire ce poème.