Cette nuit, je partirai pour un long voyage,
la question qui me turlupine me le dit
comme un caillou dans ma chaussure.
Je partirai bien avant de jeter aux oiseaux de nuit
les pauvres miettes de mon sommeil.
Je partirai quand j’aurai fait des derniers faisceaux du jour
les nouveaux barreaux de ma fenêtre
et quand les nuages, ces torchons mouillés,
les auront fait briller.
Cette nuit, je partirai pour un long voyage,
sur le chemin entre deux mots, tourne un manège,
je le sens, mon vertige me le dit.
Au lieu de voyager léger,
je mets dans mon sac
le désordre jeté dans les pas sereins du jour
par deux mouettes qui se querellent pour un poisson.
Le temps trouble que j’ajoute brouille la saveur des minutes,
celles qui sont passées avec le goût du pain au sésame.
Sous une averse de reflets et d’échos
qui défie mon univers,
j’amarre la corde qui me lie au volcan.
Cette nuit, je partirai pour un long voyage,
je le sens à la souffrance, même partagée,
car elle reste entière chez celui qui la vit.
Je mets dans mon sac
les verrous du silence écris en lettres grasses,
dans l’espoir qu’elles seront le paratonnerre
des jours zébrés d’éclairs.
Comme mon désir d’être un chaman
ne a pas sa place dans mon sac,
il tourne en rond faute de savoir à quoi s’employer.
Cette nuit, je partirai pour un long voyage,
je le sens, c’est la curiosité
que provoque la porte entrebâillée qui me le dit.
Je mets dans mon sac
la bonne entente entre les objets et la poussière.
J’y mets aussi ma peur d’enfant,
quand le jour de la fête approchait,
quand mon père était pareil à une voie sans issue
où ma mère s’égarait.
Cette peur, je la dissimule
sous l’image d’une cruche éventrée
que ma mémoire rumine sans cesse.
Cette nuit, je partirai pour un long voyage,
j’en suis certain car je n’arrive pas à remplir mon sac.
La beauté exceptionnelle ainsi que la profondeur du contenu sont ressenties lorsque l’on respire profondément après chaque arrêt complet, avant de recommencer à lire.
Les vers se lisent d’une manière très agréable grâce au rythme qui se répète partout dans ce poème.
Les vers se suivent naturellement après une courte pause qui ne perturbe en rien la transmission du flux des pensées du narrateur. Ceci est fait si habilement que la ponctuation semble presque inutile. Je l’ai donc enlevée dans mes pensées. En revanche, j’ai capitalisé chaque vers afin de m’aider à ne recommencer qu’après une courte pause.
Et voilà ! J’ai été étonnée de découvrir à quel point les images et les métaphores très poétiques se sentaient à l’aise, chacune dans son propre compartiment, entourée de mots qu’elles garnissaient.
Bravo Aytek ! Je suis vraiment très impressionnée.
Je garderai ce poème dans ma boîte à trésors et si vous me le permettez, avec une mise en page qui me permettrait de savourer la plus petite des pierres précieuses dans ce bijou.
Merci pour votre présence et votre contribution.
Purana
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Cette nuit, je partirai pour un long voyage
La question qui me turlupine me le dit
Comme un caillou dans ma chaussure
Je partirai bien avant de jeter aux oiseaux de nuit
Les pauvres miettes de mon sommeil
Je partirai quand j’aurai fait des derniers faisceaux du jour
Les nouveaux barreaux de ma fenêtre
Et quand les nuages, ces torchons mouillés
Les auront fait briller
Cette nuit, je partirai pour un long voyage
Sur le chemin entre deux mots, tourne un manège
Je le sens, mon vertige me le dit
Au lieu de voyager léger
Je mets dans mon sac
Le désordre jeté dans les pas sereins du jour
Par deux mouettes qui se querellent pour un poisson
Le temps trouble que j’ajoute brouille la saveur des minutes
Celles qui sont passées avec le goût du pain au sésame
Sous une averse de reflets et d’échos
Qui défie mon univers
J’amarre la corde qui me lie au volcan
Cette nuit, je partirai pour un long voyage
Je le sens à la souffrance, même partagée
Car elle reste entière chez celui qui la vit
Je mets dans mon sac
Les verrous du silence écris en lettres grasses
Dans l’espoir qu’elles seront le paratonnerre
Des jours zébrés d’éclairs
Comme mon désir d’être un chaman
N’a pas sa place dans mon sac
Il tourne en rond faute de savoir à quoi s’employer
Cette nuit, je partirai pour un long voyage
Je le sens, c’est la curiosité
Que provoque la porte entrebâillée qui me le dit
Je mets dans mon sac
la bonne entente entre les objets et la poussière
J’y mets aussi ma peur d’enfant
Quand le jour de la fête approchait
Quand mon père était pareil à une voie sans issue
Où ma mère s’égarait
Cette peur, je la dissimule
Sous l’image d’une cruche éventrée
Que ma mémoire rumine sans cesse
Cette nuit, je partirai pour un long voyage
J’en suis certain car je n’arrive pas à remplir mon sac
Que dire après un tel commentaire “de luxe” !
Pour ma part, je ressens de ce poème à la fois une langueur et aussi une exhortation à exorciser beaucoup de choses.
Avec enfin une volonté de se convaincre qu’il faut partir en le proclamant bien haut pour s’encourager. 🙂
Cela ne peut que me faire penser au mythe du désert, surtout celui de Nietzche, où se rend le chameau, porteur des valeurs établies et des soucis qui l’accablent. Mais ensuite, le chameau se mettra à rugir quand il deviendra lion pour tout contester, puis enfant pour tout reconstruire… Donc, il y a de l’espoir ! Beaucoup de choses se lavent dans les sables du désert. Oui, oui, cela existe, les bains de sable ! Excellents pour les rhumatismes et peut-être même pour les rhumatismes de l’âme !
Je partage l’avis de Purana sur des interlignes nécessaires pour faciliter ma lecture.
J’ai trouvé beaucoup d’images très évocatrices et très variées dans ce bon poème (si je peux m’autoriser un jugement !).
Quelques passages m’ont tout de même paru un peu trop prosaïques par rapport au reste du poème (turlupine, … car elle reste entière pour celui qui la vit).
Une petite coquille je pense : Les verrous du silence écris –> écrits en lettres grasses
Voilà, tu peux répondre, ou non, à ces commentaires qui ne sont que les miens et je dois dire n’ai aucune autorité en matière littéraire 🙄 ; et tu dois savoir que j’attends la suite impatiemment, d’autres textes si le coeur t’en dit !
Merci Aytek !
Chers amis de poésie,
Merci pour vos commentaires très généreux, mais je ne sais pas si ce poème les mérite. En tout cas
la vie est un voyage,
la poésie est un voyage,
le jour, la nuit,
un instant qui passe est un voyage
et nous, nous sommes tout le temps
dans les préparatifs de ce voyage.
text in the original language.
YOLCULUK HAZIRLIĞI
Uzun bir yolculuğa çıkacağım bu gece.
Ayakkabımdaki çakıl taşı gibi,
bir sorunun batan ucundan anlıyorum bunu.
Uykumun kırıntılarını
gece kuşlarına yem diye atmadan önce çıkacağım yola.
Günün son ışık hüzmelerini
penceremin demiri yaptıktan sonra.
Bulutlar, bu ıslak paçavralar,
demiri parlatmaya başladıktan sonra.
Uzun bir yolculuğa çıkacağım bu gece.
İki sözcük arasındaki yolda bir dönmedolap,
başımın dönmesinden anlıyorum bunu.
Yüksüz gitmek varken,
balık kavgasında iki martının
günün sakin adımlarını bozmasını koyuyorum çantama.
Dakikaların tadını bozan bulanık bir zamanı koyuyorum;
daha demincek
susamlı ekmek tadıyla dolaşıyorlardı ortalıkta.
Yankılar, yansımalar sağanağının
evrenimle boy ölçüşmesinin altına
yanardağla akrabalığımı sıkıştırıyorum.
Uzun bir yolculuğa çıkacağım bu gece.
Acıyı istediğimiz kadar paylaşalım,
en büyük payın onu yaşayanda kalmasından anlıyorum bunu.
Sessizliğin sürgüleri üzerinde yazılı
kalın harfleri koyuyorum çantama,
yıldırımları bol bir güne yıldırımsavar olurlar diye.
Bunca yük arasında
şaman olma isteğime yer bulamıyorum.
Hayır, çok yer kapladığından değil,
nerede gerekli olacağını bilmediğimden.
Uzun bir yolculuğa çıkacağım bu gece.
Aralık bir kapının uyandırdığı
meraktan anlıyorum bunu.
Eşyaların toza alışmasını koyuyorum çantama.
Çocukluğumdan kalma,
yaklaşan bayramların uyandırdıkları korkuyu koyuyorum;
anamın yolunu yitirdiği çıkmaz sokaktı babam orada.
Karnı yarılmış bir testi görüntüsünü iştahla kemiren
belleğimin altına yerleştiriyorum o korkuyu.
Uzun bir yolculuğa çıkacağım bu gece.
Çantamın bir türlü dolmamasından anlıyorum bunu.
Bonjour– heureux de retrouver quelques textes de vous ici…
J’ai eu l’occasion de vous écouter cet été à Sète, j’avais beaucoup apprécié…
meilleures pensées…