Le rayon de Lune
Ce soir, un rayon de Lune est entré par la porte-fenêtre. Elle était restée ouverte au clair de la façade. Il ne s’est pas gêné, s’imposant sans frapper.
Ses ailes veloutées, doux papillon de nuit, portaient encore un peu de poussière des astres, et c’était tellement beau que les vitres ont versé de pleins seaux d’eau de larmes.
La nuit avait ôté, sans doute pour l’attirer, sa robe de ténèbres au fin drapé de moire. Elle était là, toute nue, posant comme Arletty dans Les enfants du Paradis. J’en étais effarée.
Mais le rayon de Lune avait préféré la cachette sans apprêt de mon tendre logis. Quel honneur, et quel plaisir de contempler son petit cœur battant dans le silence complice !
J’approchai une main prudente. Il accepta la caresse. C’était chaud, bizarrement, et soyeux comme un museau de biche.
J’avais l’impression de plonger mes doigts dans un quartier de Lune. J’étais émerveillée. Lui non plus. Au bout d’un instant, après avoir inspecté les lieux rapidement telle une brosse lumineuse, le rayon de Lune fit demi-tour et repartit par où il était venu.
Sans doute d’autres cieux à visiter.
Un peu déçue, je me consolai néanmoins rapidement de ce départ précipité. Après tout, nul n’a jamais possédé de rayon de Lune en guise d’animal familier ! Et puis, ce n’est pas non plus quelque chose que l’on vend ou que l’on achète, c’est donc un objet sans valeur, si ce n’est sentimentale, un colifichet.
Mais les colifichets, qui s’en préoccupe, à part les midinettes un peu creuses d’en haut, n’est-ce pas ?
N’en parlons plus.
FIN
Alba merci de ce réconfort !
Il y a bien que je n’ai vu un rayon de Lune, le ciel de Paris est si gris même la nuit, que la Lune quand elle apparait est voilée…
Quand tu as mis ta main dans le rayon j’ai eu des réminiscences de souvenirs d’enfance !
Éternelle enfance en effet, Loki !
Merci pour cette lecture !
Un texte que je trouve fort poétique, plein de légèreté et de délicatesse, et qui me donne envie de caresser moi aussi ce rayon de lune tellement bien personnifié ici.
Pour moi, la conclusion/rationalisation (Un peu déçue… …) est en rupture avec le reste du texte qui m’avait plongé dans la rêverie et je ne trouve pas cette fin vraiment nécessaire, mais ce n’est que mon point de vue ! 🙂
Rien n’est nécessaire dans l’écriture, ce sont juste des textes personnels qui intéresseront peut-être autrui !
Voici un très joli texte, poétique et bien rythmé :
“Ses ailes veloutées, doux papillon de nuit, portaient encore un peu de poussière des astres, et c’était tellement beau que les vitres ont versé de pleins seaux d’eau de larmes”
C’est de la prose mais l’alexandrin est sous-jacent. Un texte ondulant, qui rend douce et caressante la rectitude du rayon, suscite et épouse la variation des émotions, en personnifiant un rayon de lune pour en faire un ami, juste la durée d’un instant fugace.
C’est bien, Alba, quand tu ouvres ton âme de midinette.
Je suis ravie que tu apprécies ce texte, même écrit par une midinette, selon toi !
Ah ! Pardon ! J’ai pris la phrase “Mais les colifichets, qui s’en préoccupe, à part les midinettes un peu creuses d’en haut, n’est-ce pas ?” comme une auto-dérision. Et donc cela n’impliquait nullement que je te prenne pour une midinette.
Excuses