Je te veux, riait-elle !
Il traversait les prés.
La grande fille sautait les montagnes.
C’est moi qui t’aurai bientôt ! Je le sais !
Tu seras mienne
dans le parfum des lilas !
C’est moi qui te prendrai !
Tu seras à moi
sur la dalle de pierre !
Déjà, je sens ton ventre palpiter
Où es-tu, ma belle ? Où es-tu ?
Chut !
Je m’approche, … Je viens, …
Allonge-toi…
Ferme les yeux… Ne dis plus rien…
Maintenant !
Là !
Et la grande fille reposa doucement sa grande faux.
” Fragments d’un discours amoureux”
Las, la belle camarade se change en camarde.
Très joli poème qui est en même temps une nouvelle à chute.
La dalle de pierre est un indice qui intrigue un peu… (les lilas semblent plus confortables tout de même !)
Tel est pris qui croyait prendre dans cette histoire d’amour à mort…
Je vois bien une chanson de Brassens sur le thème, lui qui aimait parler d’amour et ne rechignait pas à inviter la Camarde dans ses textes.
Avant tout, je tiens à te remercier pour cette mise en page et la police. Ils justifient l’omission de tous les “il”s et les “elle’s qui auraient pu gâcher la saveur poétique du texte, du moins pour moi. Ils ont fait de ce dialogue un poème unique plutôt qu’un “autre texte” ou le fragment d’une nouvelle.
En revanche, je trouve la mise en page ainsi que la police de la première strophe plutôt déroutantes. Si ce passage ainsi que la dernière ligne, sont prononcés par le narrateur, ils méritent de suivre les mêmes codes visuels, non ?
Très beau poème bien qu’assez sauvage et voire agité. Un amore particolare !
Oui, il s’agit bien d’un poème qui laisse d’ailleurs place à beaucoup de suppositions : la jeune fille représente la mort, la dalle de pierre représente-t-elle la stèle d’une tombe ? Et quand elle pose sa faux, tue-t-elle celui qui pensait la “prendre” alors que c’est elle qui aura le dernier mot ?
Très intéressant en tout cas !
Quand mon âme pure et la tienne auront quitté notre corps, on placera une brique sous notre tête. Et, un jour, un briquetier pétrira tes cendres et les miennes.
[Omar Khayyam ; 1048-1131]
Merci à vous d’avoir lu et commenté cette “fantaisie” que je n’ai pas publiée sous la rubrique “Poèmes” mais plutôt sous “Autres textes”.
Et merci pour votre indulgence pour ce texte peut-être mal terminé…
Oui, tu as raison Purana, la présentation de la première strophe est un peu incohérente. En fait, j’ai voulu mettre en italique ce qui concernait la fille et en caractères standard ce qui concernait l’homme, mais cela aurait dû rester le cas pour le dialogue seulement et pas pour la narration, tu as tout a fait raison.
Pour ce qui concerne cette “chasse à l’homme”, je ne saurais pas trop expliquer et je crois que j’ai voulu délibérément que le texte reste ambigu :
Un jeu entre l’homme et la mort, d’autant plus excitant qu’il se joue avec la mort, une poursuite épique, comme une prise de risque qui augmente la jouissance, l’adrénaline.
Une ou deux annonces au milieu du texte pour alerter le lecteur : le parfum des lilas (mauves comme le deuil, bien sûr) et surtout la dalle de pierre, froide et qui évoque bien sûr la mort.
Quant à la fin de cette poursuite, je ne sais pas si la faucheuse a posé sa faux après avoir emporté l’homme dans la mort ou si elle a renoncé et préféré poser sa faux pour se livrer à une sorte d’accouplement gothique et mystique avec l’Homme, pour une autre mort qui serait une rémission, une connaissance biblique, une “petite mort” provisoire. C’est à vous de le dire.
Vous comprenez pourquoi je qualifie ce texte de “fantaisie”… !
Encore merci de votre passage !
Quant à Omar Khayyam : چه رمانتیک Ma… che romantico! Un romantisme absolu ! J’adore cette image !
Un peu dans le même esprit que celui de ce texte, je viens de découvrir cette chanson que je ne connaissais pas de Jacques Brel : “J’arrive !“
… et je ne résiste pas à l’envie de vous la faire partager :
les paroles : https://genius.com/Jacques-brel-jarrive-lyrics
la chanson : https://www.youtube.com/watch?v=9QRgNW4G0i4
Merci Hermano pour cette chanson magnifique. Brel sait parler d’amour comme nul autre avec un étonnant sens du tragique. Ici encore, il n’y a qu’un pas de l’amour à la mort. Et l’amor latin sonne étrangement à nos oreilles.
Mais qu’est-ce que j’aurais bien aimé
Encore une fois remplir d’étoiles
Un corps qui tremble et tomber mort
Brûlé d’amour, le cœur en cendres