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  • #1207
    Hermano
    Maître des clés

    Un guitariste joue un morceau dos aux auditeurs. Les participants notent les mots, expressions, bouts de phrases qui leur viennent à l’écoute de cette musique, puis ils doivent plier une feuille en deux et de recopier sur la partie de gauche 8 de ces mots ou expressions (10 mn).

    Les mots et expressions que j’ai choisis :

    Un cortège passe sur le sable

    Le soleil est pâle

    Ralenti magique

    Monte et s’éparpille

    Une chute grave

    Le gong rythme les pas

    Étirement du temps

    L’éclosion d’une fleur

     

    L’animateur demande ensuite d’écrire au centre d’une page la première expression retenue, de l’entourer, puis de faire tourner la feuille. Chacun doit ajouter un mot ou une expression autour de ce mot central selon la règle suivante :   on écrit son deuxième mot ou expression sur la première feuille reçue, son troisième mot ou expression sur la seconde feuille reçue, et ainsi de suite (15 mn).

    N.B. Pour qu’il y ait assez de mots à noter et qu’on puisse les noter tous, il faut choisir au départ autant de mots que de participants. 8 participants étaient présents à cet atelier, 8 mots leur ont donc été demandés.

    Ma feuille et les mots que j’ai reçus :

    S’allume en expirant

    Fêlée

    Chaleur sucrée

    Un cortège passe sur le sable

    Noblesse retenue

    Envolée de nuages

    Moi le fugitif, l’exilé, le désespéré

    Dentelle

     

    L’animateur demande maintenant d’écrire avec tout ce qui se trouve sur la feuille qui est revenue (15 mn).

    Mon texte :

    Dans la chaleur sucrée du soir un cortège passe sur le sable. C’est moi qu’on enterre, moi le fugitif, l’exilé, le désespéré.

    Une envolée de nuages occulte un instant l’horizon, des dentelles gris-bleu effilochent le ciel orange.

    La troupe avance dans une noblesse retenue. Soudain, couvrant le bruit de la mer, un chant déchiré, profond ; une voix fêlée s’allume en expirant son canto.

    Ils me portent, ils me portent loin. C’est le calme, la paix du soir, au jusant de ma peur.

     

    Chaque participant lit son texte (20 mn).

    Cette technique est intéressante car chacun peut retrouver chez les autres la phrase ou le mot qu’il a lui-même proposé, « habillé » par un contexte parfois inattendu.

     

    Le guitariste vient maintenant rejouer le même morceau face aux participants. Comme précédemment, chacun doit noter des mots, bouts de phrases, expressions, puis en choisir 8 –autant que de participants – pour les recopier sur la partie droite de la feuille où figurent déjà les 8 mots précédemment choisis (15mn).

    Les mots et expressions que j’ai choisis et écrits sur la partie droite de la feuille :

    À points serrés

    Les mécaniques du plaisir

    Digitale de fièvre

    Une ébène sonore

    Crescendo d’émotion

    Adieu mes amis

    Dans ses bras

    Vibrato majeur

     

    De la même manière, chacun est invité ensuite à écrire au centre d’une page la première expression retenue, à l’entourer, puis à faire tourner la feuille. Chaque participant doit ajouter un mot ou une expression autour de ce mot central selon la règle suivante : on écrit son deuxième mot ou expression sur la première feuille reçue, son troisième mot ou expression sur la seconde feuille reçue, et ainsi de suite (15 mn).

    Ma feuille et les mots que j’ai reçus :

    Un bras plié soutenant

    Aigu

    Reflets irisés

    À points serrés

    Ta timidité me touche autant que ta gravité

    Les cordes parlent, elles disent les mots qui vont dessus

    L’envol d’un regard

    Pouce index index index index pouce

     

    Les participants doivent écrire un texte avec ce qui se trouve sur cette dernière feuille.

    Bien que répétitive, cette consigne a permis l’écriture de textes vraiment riches et dont les participants ont été satisfaits.

    Mon texte :

    Elle poussa un cri si aigu que tout l’atelier s’arrêta. Les cinquante machines à coudre qui filaient à points serrés sur le tissu se turent toutes ensemble.

    Des reflets irisés couraient sur sa main : du sang. L’aiguille avait traversé son pouce.

    Un instant d’attention, l’envol d’un regard vers une voisine, c’était toujours ainsi que cela arrivait.

    La fille s’était tue, elle regardait sa main pendant que la contremaîtresse venait vers elle. Elle restait là, honteuse, les yeux baissés, le bras droit plié soutenant sa main gauche.

    • Ta timidité me touche autant que ta gravité, fit la contremaîtresse. File à l’infirmerie !
    • Je n’ai plus qu’à aller me pendre, lui répondit la fille.
    • Hum… les cordes parlent, elles disent les mots qui vont dessus, dit la contremaîtresse dans un accès subit d’hermétisme philosophique que personne ne comprit.

    Puis elle tourna les talons, laissa la fille et alla mettre à jour son tableau statistique du mois :   un pouce, un index, un index, un index, un index, un pouce.

     

    Chaque participant lit son texte (20 mn).

     

    L’animateur demande enfin à chacun de considérer ses deux textes et d’en écrire un troisième en mêlant, en tissant tout ce qu’ils ont pu écrire depuis le début de l’atelier. Ils devront donner un titre à leur texte (35 mn).

     

    Mon dernier texte.

    Avant la nuit (Adieu mes amis)

    Dans la chaleur sucrée du soir, les filles quittèrent enfin l’atelier. La plupart se pressèrent pour rejoindre leur foyer où les attendaient encore les tâches domestiques.

    Seul un petit groupe partit flâner un peu sur la plage toute proche. Elles aimaient se promener ainsi quelques instants quand le temps le permettait. Elles blaguaient, riaient, et s’amusaient à s’asperger en donnant de grands coups de pieds dans les flaques qui restaient à marée basse.

    La saison était assez avancée et le jour commençait déjà à décliner. Une dentelle de nuages gris-bleu jouait à effilocher le ciel orange, et elles jouaient à deviner des formes dans ces nuages. Elles profitaient ainsi de la tiédeur du soir quand nous arrivâmes en cortège, un cortège qui ressemblait à ceux des peintures noires de Goya.

    Dans le calme et la paix du soir, ils me portaient, ils me portaient avec noblesse et retenue.

    Impressionnées, les filles se turent, puis se signèrent à mon passage. Il allait faire nuit.

     

    Chaque texte est lu à haute voix par quelqu’un d’autre que son auteur (25 mn).

     

     

    Le morceau de guitare était en l’occurrence du genre flamenco, donc assez “typé”, d’un caractère bien affirmé. Cela a permis à la plupart des textes de converger dans une même ambiance, certains faisant écho à d’autres, chacun posant une touche dans un tableau finalement cohérent.

    • Ce sujet a été modifié le il y a 6 années et 7 mois par Hermano.
    #2345
    Line
    Maître des clés

    <p>Ah comme j’aurais adoré participer à cet atelier!</p>
    <p>Mais quand on n’a pas de guitariste sous la main ce qui est quand même le top du top, est-ce qu’on peut faire l’atelier avec deux morceaux différents (puisqu’il n’est pas possible de faire jouer  le même morceau par le guitariste de dos puis de face)?</p>
    <p> </p>

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