Voici un atelier d’écriture pour changer d’air malgré le confinement !
Il est inspiré par la semaine de la langue française et de la francophonie
« Dis-moi dix mots qui ne manquent pas d’air ! »
I – Sans lire la suite des consignes, nous vous proposons de rédiger trois listes de mots :
- Liste de cinq expressions contenant le mot « air ».
- Liste de cinq mots évoquant l’air sous toutes ses formes
- Liste de cinq mots qui vous sont inspirés par l’air
II – Pour chaque expression de votre première liste, associez maintenant une situation décrite en quelques mots.
III – Puis n’hésitez pas à distribuer des noms d’oiseaux, un par mot de la 2ème liste (l’air sous toutes ses formes)
IV – Enfin, accolez un personnage à chacun des mots de la 3ème liste (ceux qui sont inspirés par l’air)
V – Écrivez maintenant un texte en utilisant au moins une situation, un nom d’oiseau, un personnage et piochez le plus possible dans les mots et expressions que vous avez trouvés dans la première phase.
Vous pouvez utiliser le style qui vous plaira : conte, poème, histoire, lettre, article de journal, etc.
Et maintenant, que le vent de l’inspiration souffle sur vous !
Merci de poster dans la boîte des commentaires vos 3 listes,
complétées par les mots des phases II, II et IV
Et bien sûr votre texte final !
Mars 2021
L’air de rien, il en avait ras la casquette. Lui, l’homme gentil, le confident de ses dames avec son air bienveillant. Sa silhouette un peu nounours invitait à se blottir contre ce ventre rembourré qui lui donnait une allure penaude, lente, lourde.
Arnaud était loin de cet ado svelte, actif, déterminé qu’il avait été et qui faisait tourbillonner les têtes d’antan. Le feu des passions avait soufflé depuis bien longtemps et avait transformé les bourrasques en zéphyr. Un jour, il avait même osé tempêter en mettant le poing sur la table familiale !
Bien sûr il avait attisé le feu des disputes.
Bien sûr il avait soufflé le chaud et le froid, et comme un camion qui vous dépasse sur l’autoroute à grande vitesse, la voiture familiale fut comme aspirée, happée, presque déroutée. Une sortie de route aurait été plus décisive mais chacun avait repris le contrôle et le cours de sa vie.
Les mois et les années l’avaient alors enrobé de la tête aux pieds, et aujourd’hui, en ce jour d’avril, sa détermination à avancer se dégonflait comme un pneu crevé où des soupirs sifflants s’échapperaient.
Parfois il sentait encore l’haleine de vautour planer en effluves autour de lui et c’est là qu’il ressentait le plus ce manque d’air du choix.
Reprendre la boucherie familiale était un cauchemar. Lui, se voyait aigle tourbillonnant dans son ciel. Cette carrière militaire dans l’aviation lui aurait ouvert les portes du rêve, de son rêve. Aujourd’hui il tanguait entre colère et raison.
« Allez, un peu d’air vous fera le plus grand bien », avait dit le toubib. « Imaginez une semaine les pieds dans l’eau, la tête dans les nuages et la chaleur sur le dos. »
De l’air, de l’air ! Oui mais pas sous cette forme, pensait-il.
Il écouta quand même le conseil et s’envola pour un pays chaud, n’importe lequel, dès l’instant que la distance le rapproche d’un air venu d’ailleurs.
A l’aube du troisième jour, sur la plage, il rencontra Nadia, pieds nus marchant sur le sable mouillé avec pour toute compagnie le vent qui chahuté dans ses cheveux défaits et se faufiler sous robe légère. Cette attitude singulière à se laisser faire le surpris.
C’est ainsi qu’un simple changement d’air devint une nouvelle inspiration pour un nouveau souffle.
Ophenix
**
Attiser le feu, sentir sa chaleur
Rafraichir les saveurs de l’oubli
Comme un air lointain venu d’ailleurs.
Extraire les souvenirs-amis
Souffler le chaud et le froid
Recueillir les sens des nuits
Et danser, planer sur nos émois
Te retrouver virevoltante
Dans ce tourbillon de joie
Frissonnante silhouette vibrante.
Ophenix 01/04/2021
Jouer les filles de l’air -> En cavale
Un air d’opéra -> Au théâtre
Il ne manque pas d’air -> Assemblée politique
Air de Sainte Nitouche -> Une manipulation
Les coussins d’air -> Balade en mer
Vent -> Mouette
Souffle -> Griffon
Musique -> Rossignol
Atmosphère -> Aigle
Apparence -> Perroquet
Aile -> Icare
Éolienne -> Éole
Pneu -> Bibendum
Note -> Musicien
Avion -> Pilote
— Éole ? Ici Icare. La cible est avec toi ?
— Affirmatif. Je t’entends mal, t’es où ?
— Moi, je te reçois cinq sur cinq. Je suis encore au théâtre, je surveille les issues pour faire le nettoyage si besoin. Avec nos airs de Sainte-Nitouche les barbouzes n’y ont vu que du feu. J’attends une minute avant de lever le camp et après je file te retrouver au port.
— Affirmatif.
— La cible est tranquille ?
— Oui, chloroformée dans l’étui de la contrebasse.
— Tu nous la ficèles façon rosette de Lyon et tu surveilles. Faut pas qu’elle ne nous claque pas dans les doigts. C’est du délicat et du précieux, il a dit, le chef.
— Affirmatif. Je te laisse, elle rue dans les brancards.
*****
— Éole ? Ici Icare. Je suis au port. T’es où ?
— J’arrive ! La cible s’est réveillée plus tôt que prévu et a poussé un contre-ut.
— Pas discret ! Qu’est-ce que t’as fait ?
— Une pichenette et une dose de chloroforme…
— Pas trop forte, la pichenette, hein ? Bon sang, c’est pas par hasard que ça s’appelle l’opération Rossignol. On se méfie de ces oiseaux-là ! Amène-toi vite fait !
*****
— Éole ? Ici Icare. C’est à cette heure-ci que t’arrives ? Faut qu’on sorte du port vite fait ! Dans une demi-heure, les vraies patrouilles reprennent et on pourra plus se faire passer pour des garde-côtes !
— Je pouvais plus fermer l’étui de la contrebasse. C’est pas « Opération Rossignol » cette affaire, c’est « Opération Bibendum » !
— Je t’avais dit de vérifier les mensurations de la cantatrice ! Fallait prendre un étui de GRANDE contrebasse !
— Si c’est trop grand, c’est pas discret !
— Si c’est trop petit, ça fait tout foirer ! T’as vraiment un cerveau de piaf ! Allez, va me la chercher, qu’on la charge sur l’aéroglisseur ! On va la mettre sur coussins d’air et zioup ! on va survoler la mer comme des mouettes ! Mais qu’est-ce qui se passe Éole ? T’as l’air des mauvais jours…
— Volatile de malheur ! elle s’est envolée… Bibendum a joué les filles de l’air !
J’ai lu la consigne… mais je ne l’ai pas suivie… Le thème et quelques expressions ont suffit à me lancer dans l’écriture. Je reviendrai en faisant le bon élève.
En attendant, j’ai pris mon envol avec la fille de l’air :
L’air
La fille de l’air est partie
Elle avait un air de deux airs
Je ne savais pas
si c’était oui ou si c’était non
Pour qu’ainsi elle virevolte
qu’ai-je fait aux balcons
de ma Juliette ?
Elle a pris ses grands airs
comme à l’opéra
et m’a laissé là
Bon vent !
Depuis
sur l’air des lampions
je veille
et je chante ma chanson
Un air qu’elle connait, mais bon
Un jour
le vent la ramènera
et je prendrai
un air de reviens-moi
L’air de celui qui ne sait pas
qu’un jour elle a quitté la toile
qu’un jour elle a baissé les voiles
Ma deuxième contribution, en suivant absolument les consignes :
Jouer la fille de l’air : Tous ces débats stériles l’emmerdaient velu, elle avait préféré s’éclipser du cocktail sans rien dire pour rejoindre son amant.
S’envoyer en l’air : C’était son premier saut en parachute…
Avoir un air de deux airs (expression de ma grand-mère) : On se méfiait de lui : son air bienveillant n’inspirait pas la confiance car on sentait dans ses yeux une rage contenue. D’où venait-il ? qu’avait-il fait auparavant ?
Se foutre en l’air : Tous les jours il y pensait, mais le courage lui manquait et puis, cela en valait-il la peine ?
L’air de rien : Il fit mine de n’avoir pas vu la file d’attente et se présenta au directement au guichet.
Le fond de l’air est frais : Elle avait oublié sa petite laine et frissonnait de plus en plus en l’attendant. Elle se disait que c’était peut-être cela, les frissons d’amour.
:
Courant-d’air : Colibri
Vent : Vautour
Brise : Hirondelle
Éther : Colombe
Cyclone : Étourneaux
:
Légèreté : Une fée
Ambiance : Disc-jockey
Chanson : Chanteur des rues
Grimace : Clown
Accordéon : Eugène (Gégène)
La fée
Elle avait l’air d’une fée, semblant glisser sur le sol quand elle se déplaçait de groupe en groupe pour faire la conversation. Elle souriait, tendait le plateau chargé de petits-fours, lançait un mot gentil à l’un ou à l’autre, s’attardait parfois pour un instant de conversation, puis se détachait avec une esquisse de révérence pour se diriger vers le groupe suivant.
À la fois radieux et modeste, comme si son visage eut été nimbé d’une auréole, son air n’était qu’une façade. Elle jouait son rôle de maîtresse de maison à la perfection, mais cela ennuyait trop profondément la fée de cette soirée très BCBG. Elle pensait à son amant auprès de qui elle aurait préféré se trouver ce soir-là.
Alors, tout en passant de l’un à l’autre, elle avait inventé un jeu : elle s’imaginait chacun des hommes en petit garçon en culottes courtes, avec peut-être un peu de morve au nez, et quant à ces dames, elle se les représentait en fillettes à col claudine ou en kilt laissant apparaître des genoux écorchés. Cela l’aidait à passer le temps et à supporter la situation.
Parfois, elle essayait aussi de leur donner des noms d’oiseaux : celle-ci avec son pia-pia était une hirondelle alors que son voisin qui n’arrêtait pas de brasser de l’air en parlant devenait un colibri. Dans un coin de la salle, elle voyait un groupe de vautours qui semblaient s’isoler pour comploter à voix basse. Quelques étourneaux aussi, perdus au milieu de ce brouhaha, et cette colombe, si pâle, interdite et qui restait toute seule sur sa chaise. À certains ou à certaines, elle trouvait un air de deux airs et, n’aimant pas la chanson de ces oiseaux-là, ne s’attardait pas.
Pourtant, même ces jeux finissaient par lasser la fée. Elle trouvait l’ambiance pesante et, l’air de rien, décochait une grimace que personne ne voyait quand elle passait, avec une légèreté de brise, devant le petit miroir du couloir.
Quelquefois, la vanité de ces situations lui donnait l’envie de se foutre en l’air. C’était d’abord comme un petit courant d’air, insidieux, qui lui traversait la tête et finissait parfois à se muer en cyclone : elle avait envie de hurler, de tout lâcher, de tout casser.
Et ce soir, elle commençait à sentir souffler de nouveau ce vent de folie. Tous les jours, elle y pensait, mais le courage lui manquait et puis, cela valait-il la peine d’abandonner ce luxe et ce confort, tout quitter pour rejoindre définitivement son amant ? Ce soir-là, la réponse fut « Oui » et elle osa d’un coup, comme pour un saut en parachute dans l’inconnu. La soirée était maintenant bien lancée, le disc-jockey augmentait l’ambiance, le bruit de la musique et les premiers verres faisaient hausser le ton des voix de cette volière. Elle respira à fond, comme un grand coup d’accordéon pour se donner du courage, et décida de jouer la fille de l’air et de rejoindre son amant.
Dehors, elle frissonna, le fond de l’air était frais.
Un chanteur des rues fredonnait « … On les a trouvés se tenant par la main / Les yeux refermés vers d’autres matins… »
I L’air marin – l’air marin lui donnait une nouvelle énergie
l’air sérieux – l’air sérieux, il lui fait un discours de séparation imminente.
l’air de rien – l’air de rien, il grimpa à l’arrière du camion.
prendre l’air -elle sortit prendre l’air…
chambre à air – la chambre à air de son pneu arrière était trouée.
gaz
gaz carbonique
air conditionné
airbag
vapeur
air pollué -un vieil homme
manche à air -une sorcière
montgolfière – un nain
oxygène -un bébé
air gentil – une fée
III
pie
moineau
corneille
mésange
merle
Depuis la fin du mois de mars, l’air devient plus doux, le printemps se dévoile.
Bob parcourt les villages de Gaume dans sa camionnette rouge ; sur les côtés, on peut lire, en grandes lettres blanches:
GLACES DE CAROLINE.
C’est l’air de « Hello le soleil brille! » qui l’accompagne.
Il gare son véhicule à côté de la place, près de l’église, à l’ombre des marronniers.
Dès qu’ils entendent la mélodie, les enfants sortent en courant et s’agglutinent près de l’estafette.
Bob ouvre la vitre du comptoir, accueille les mômes d’un grand « bonjour! ».
Il commence la distribution de cornets, de galettes, de petits pots de crème aux fraises, au chocolat,
au citron, aux pistaches.
Petit à petit, les habitants sortent de leurs demeures ; c’est l’occasion de prendre l’air.
En file, ils attendent leur dessert. Chacun repart avec la douceur de son choix.
Sous les arbres, près du petit ruisseau, dans les prairies, dans les jardins, les villageois se réunissent,
dégustent leurs gourmandises, dansent et rient.
L’air de rien, l’arrivée de Bob marque le début des beaux jours.
La camionnette repart ; la mélodie s’affaiblit.
Au soleil couchant, tandis que l’air est plus frais, c’est la fête des oiseaux:
corneilles, pigeons, pies, merles et mésanges se régalent des miettes de biscuits.
PS La mélodie, c’est Colonel Bogey March.
Musique du film Le pont de la rivière Kwaï.
Monte-en-l’air : Cambrioleurs montant par la façade.
Un air de Sainte Nitouche : Jeune femme cachant son jeu.
Ne pas manquer d’air : Être culotté.
Air force one : Avion du président des États-Unis.
L’air de rien : Faire quelque chose comme par hasard.
Changer d’air : Changer de lieu.
Bulle : Martinet
Stratosphère : Vautour
Air liquide : Pingouin
Alizé : Hirondelle
Brise : Mouette
Zeppelin : Hindenburg
Voile : Tabarly
Girouette : tourne au vent
Parachute : Léonard de Vinci
Poumon : Koch
Donald
Donald voulait changer l’air. Rien de plus facile quand on est président des États-Unis. Il suffit de décrocher son téléphone. Le rouge, le bleu, le jaune ? Cela n’a pas d’importance. De toute façon chacun des correspondants au bout de la ligne sait que c’est une véritable girouette. Ils pallient son inconsistance. Le correspondant jaune convoqua le Force Air One.
Allez savoir pourquoi Melania ne voulait pas venir ? Malgré ses airs de grandes dames, c’était une sainte-nitouche elle avait compris les raisons de l’escapade de son mari. Il voulait s’envoyer en l’air le couple était fort libre. Pour elle s’était l’occasion d’en faire autant à domicile.
Donald d’ailleurs ne manque pas d’air, comme un de ses prédécesseurs il organise parfois dans le bureau ovale des réunions particulières avec certaines journalistes.
C’est ainsi que l’avion présidentiel décolla avec Donald seul. Affalé dans son fauteuil il était tout content de coincer la bulle, ce qui est paradoxal, car il n’en faisait guère. Le golf était le summum de ses activités.
Il sentait que ses poumons étaient encore douloureux. Décidément ce petit virus venu de Chine ne manquait pas d’air, s’en prendre à lui le président du plus grand état de du monde… Une bouteille d’air liquide était proche afin que son médecin personnel puisse intervenir. Vous allez rire il s’appelle Jimmy Koch.
Un moment l’avion fit une embardée, il avait failli rentrer dans Zeppelin aux couleurs de Joe Biden. Donald sourit, il savait qu’il ne ferait qu’une bouchée de ce vieillard cacochyme. Le pilote qui avait raté le dirigeable pensa à la catastrophe du Hindenburg.
L’avion avait atteint la stratosphère grillant au passage quelques hirondelles et vautours.
Donald commençait à s’endormir quand un officier le réveilla. La sécurité venait de l’avertir qu’un monte-en-l’air avait tenté d’escalader la façade de la Maison-Blanche.
Il avait été abattu. La police précisait qu’il n’était pas noir…
Donald soupira ! Heureusement il aurait été encore ennuyé…
Chers amis de l’Oasis. J’ai un peu tardé, après de longues hésitations à vous communiquer ce qui suit. C’est que je ne suis pas arrivé à être sérieux sur le sujet. J’espère que vous excuserez ce petit jeu sur le mot et le son « air » qui n’a rien de littéraire.
I
Ne pas manquer d’air
L’air de rien
Un air de deux airs
Jouer les filles de l’air
S’envoyer en l’air
Légèreté
Respiration
Imitation
Chanson
Mélodie
Vent
Fraîcheur
Campagne
Opéra
Avion
II
Kevin ? Juste un ami ? Un copain ? Tu ne manques pas d’air !
L’enfant continuait, l’air de rien, à tirer la queue du chat
Mais non ! Moi je n’y suis pour rien ! Lui dit-il d’un air de deux airs.
Quant au coupable, après son méfait, il a joué les filles de l’air.
Un petit bosquet discret, ombragé, moussu vert et frais était l’endroit idéal pour s’envoyer en l’air
III
Légèreté du colibri
La respiration saccadée du moineau dans les griffes du chat
Il avait dressé son perroquet pour qu’il excelle dans l’imitation des insultes
Connard, abruti, imbécile, gros niaiseux, pintade, dinde, oie blanche, vieille pie, bon je m’arrête là, on connaît la chanson !
L’ancienne mélodie portait un étrange message.
C’est dans la salle du conseil de la mairie de Rhémont que le commissaire Daniel Lémiche* avait donné rendez-vous aux journalistes pour une courte conférence à propos de l’affaire qui, depuis quelques jours, alimentait toutes les conversations de la petite bourgade. Les relations étaient un peu tendues entre Lémiche et la presse malgré l’amitié sincère qui le liait à Hubert Lahune, responsable de la rubrique « Faits divers » au Col vert de la Giselle, le canard local.
Le commissaire savourait à l’avance la façon dont il allait se payer la tête de tous ces journaleux qui, à l’exception très remarquée d’Hubert, n’avaient jamais hésité à lui gâcher une enquête pour un petit scoop.
C’est donc avec un air tranquille et affectant une bonhommie parfaitement simulée qu’il ouvrit la séance :
« Mesdames messieurs, je vous remercie sincèrement d’avoir répondu aussi nombreux à notre invitation, vous savez avec quel plaisir je vais pouvoir répondre à vos questions, mais auparavant permettez moi de vous retracer cette affaire à grands traits et de vous faire part de son dénouement, à la suite de l’enquête que mes collaborateurs et moi-même avons menée tambour battant»
Le silence se fit parmi les journalistes un peu surpris par cet inhabituel assaut d’amabilité, ce silence eût été total si un léger courant d’air n’eût animé le battement des rideaux contre les fenêtres ouvertes en cet après midi d’été caniculaire.
« Vous savez tous que celui que nous appelons Antoine a récemment récidivé en s’échappant de la résidence Belair, établissement psychiatrique où il a été assigné à la suite de l’assassinat de la très regrettée Anne-Lise Syntès, le tribunal l’ayant considéré comme irresponsable de ses actes. Il il y a quelques jours il a donc joué les filles de l’air et l’individu, remarquablement intelligent, reste très dangereux sous ses airs sympathiques. Nous nous sommes donc immédiatement mobilisés pour le retrouver afin de rassurer une population légitimement anxieuse de savoir libre comme l’air un malade mental capable des pires exactions. La situation était sérieuse car l’homme a une autre envergure qu’un simple monte-en-l’air. Heureusement, par défi et par jeu, il a multiplié les indices. Une pompe à air par-ci, un filtre à air par là, les pistes étaient si nombreuses, que nous avions l’impression que, l’air de rien, Antoine cherchait à nous enfumer. Mais nous avons su rester vigilants et je suis fier de vous annoncer aujourd’hui que nous avons mis un terme à sa courte cavale. Pourtant il nous avait encore filé entre les doigts alors qu’il s’apprêtait à investir le centre de plein air. Pensant avoir évité le pire en l’obligeant à fuir, nous avons poussé un ouf de soulagement en retrouvant sa piste en direction de l’aérodrome. On distinguait au loin la manche à air bien gonflée qui lui servait de repère à travers champs. Sa condition physique nous a tous étonnés et, je dois vous l’avouer, cette course poursuite nous fut extrêmement pénible tant l’air manquait à nos poumons »
C’est alors que du fond de la salle un journaliste l’interrompit sans ménagement :
« Commissaire, on a assez joué, cela fait à peine trois minutes que vous parlez et vous avez déjà prononcé le mot « air » une douzaine de fois, qu’est ce que cela signifie, vous avez fait un pari avec vos acolytes ? »
Lémiche afficha un large sourire, il avait au moins réussi à en énerver un.
« Vous m’avez l’air bien en colère mon cher Monsieur ! Et me semblez bien amer ! Tout ce que je viens de vous dire est rigoureusement exact, mais je vous prie de bien vouloir m’excuser de ne pas avoir pensé à vous consulter au préalable sur le choix de mon vocabulaire» Dit-il en insistant lourdement sur toutes les syllabes en « air ».
Plusieurs rires fusèrent dans la salle, il faut dire que le journaliste qui venait de prendre la parole était le seul représentant de la presse nationale. Mais après cette manifestation d’un vieux réflexe provincial un peu puéril une jeune pigiste, exprimant un sentiment unanime, s’interrogea à voix basse sur cette étonnante inflation lexicale. « Manque pas d’air ce Lémiche, où veut-il en venir ? », tout en constatant qu’elle était en train de se laisser contaminer.
« Je poursuis, donc, et vous allez mieux me comprendre. Vous le savez, il nous l’a dramatiquement démontré par le passé, Antoine est un joueur. C’est l’inspecteur d’Huyres qui, connaissant mieux son profil psychologique,* fut le premier à relier son évasion au thème de l’air. Dès lors tous ces indices devinrent clairs et quand nous l’avons vu se diriger vers l’aérodrome nous avons vite compris qu’il chercherait à nous échapper par cette voie, je veux dire la voie des airs. Nous avons prévenu par téléphone les responsables de l’aéroclub leur demandant qu’aucun de leurs avions ne puisse prendre l’air, le temps que nous venions cueillir le fuyard, ce que nous avons fait. »
« A-t-il eu le temps de commettre quelques méfaits pendant cette folle équipée ? »
« Aucun, et je pense qu’il n’en avait pas l’intention, il a juste voulu que l’on s’intéresse à lui. Il n’a pas eu l’air surpris et n’a offert aucune résistance quand nous l’avons interpelé, son unique objectif était je crois de faire passer un message»
« Quel genre de message ? »
« Quelque chose d’étrange qu’il nous a livré sur l’air de la Paimpolaise et que voici :
L’air deviendra votre ennemi
Et tous vous vous en méfierez
Par lui viendra la pandémie
Masqués vous vous avancerez
Théâtres cinés
Et restos fermés
J’aime Rhémont et sa rivière
Mais j’aime moins son commissaire
A qui j’ai trop souvent affaire
Pourtant je lui dédie cet air
Manifestement Antoine n’est pas un poète, mais selon lui un jour prochain l’air que nous respirons deviendra un vrai danger, un genre de poison. Voilà, vous voyez bien que tout cela n’est pas très sérieux et qu’il dit n’importe quoi. J’espère que vous ne m’en voudrez pas d’avoir pris la liberté de jouer un peu avec vous, il n’y a finalement là rien de tragique et mieux vaut en rire. Antoine est un illuminé, vous allez donc pouvoir largement rassurer vos lecteurs.Tout est bien qui finit bien. Ah ! Un dernier détail. Le nom complet de notre homme est Antoine Igor Razeneca et donc ses initiales : A.I.R. »
* Le Commissaire Daniel Lémiche a déjà pointé son nez dans les ateliers d’écriture : « Une énigmatique affaire » et « Le vase de Soissons »
Chair Chaman,
D’aucuns diront que tu ne manques pas d’air avec tes jeux de mots et s’offusqueront de lire que ton commissaire Daniel Lémiche à l’air (oh !) de mener les débats avec les journalistes. Mais que diraient-ils si tu avais prénommé ton commissaire Prosper ?
Je pense que tes textes sont effectivement des bols d’air, les Hollandais diraient des polders (à moins que ce soient les Alsaciens…) en cette période délétère et nous n’avons pas besoin d’intubation pour en profiter !
Merci Loki pour cette amicale solidarité dans ce petit écart de conduite.
Merci pour vos textes dans cet atelier d’écriture !
Un nouvel opus est sous presse pour la semaine prochaine.
Vous pouvez, si vous voulez recevoir quelque commentaire, publier maintenant votre texte dans la rubrique « Atelier d »écriture » ou dans une des autres rubriques. Encore merci à vous !