En ce début d’année, nous vous avons apporté des bonbons parce que les bonbons c’est tellement bon et puis autant commencer l’année en douceur.
Nous vous proposons donc de déguster quelques mots surannés, insolites. Voici une liste à découvrir ou à redécouvrir en vous laissant le plaisir d’imaginer leur signification. Vous trouverez les définitions tout en bas de ce texte.
- Mugueter, blézimarder, pandiculer, flagorner, adoniser, lénifier, félir, baguenauder, tintinnabuler, zonzonner
- Maringoin, calembredaine, paltoquet, bénitier, parangon, sornette, brimborion, freluquet, billevesées, mirliflore, margouillis, épousailles, prie-Dieu, plumier, cousette
- couard, cacochyme, pusillanime, primesautier, croquignolet, dégingandé, fieffé, éburnéen, ancillaire, callipyge
1- Choisissez au moins trois mots que vous écrirez sur une feuille. Pour chacun, associez des mots qui vous viennent à l’esprit en privilégiant les mots qui ont des sonorités proches. Vous aurez alors votre sac de “mots bonbons”.
2- Nous vous proposons maintenant de lire attentivement le poème « En sortant de l’école » de Jacques Prévert. Si vous préférez, vous pouvez écouter l’interprétation chantée des Frères Jacques. Dégustez les associations imagées et surréalistes de cette liste…
3- Nous vous suggérons maintenant de partir avec vos mots bonbons sur le chemin de l’école, à la manière de Prévert. Commencez votre texte par « En sortant de l’école, nous avons rencontré… » et imaginez des rencontres en piochant dans votre sac et en utilisant au moins vos trois mots et les mots associés qui vous plaisent.
Libre à vous d’utiliser tout ou partie des mots de votre sac, d’y ajouter d’autres mots insolites voire des mots farfelus de votre cru ou des mots régionaux. Pas de limite à la créativité !
4- Vous terminerez votre texte par « À pied, à cheval, en voiture et en bateau à voiles. », de la même façon que le poème.
5- Publiez votre œuvre dans les commentaires ci-dessous.
Au plaisir de vous suivre dans votre balade !
Nous espérons que cette promenade d’écriture vous régalera aussi !
DÉFINITIONS
- Mugueter : faire la cour
- Blézimarder : se couper mutuellement la parole
- Pandiculer : action d’étendre les bras vers le haut et d’allonger les jambes en bâillant
- Flagorner : flatter quelqu’un bassement et avec insistance
- Adoniser : Parer, habiller avec une recherche raffinée, excessive, on peut s’adoniser soi-même
- Lénifier : calmer, apaiser
- Félir : Menacer en soufflant à la manière des chats.
- Baguenauder : se promener en flânant
- Tintinnabuler : sonner, résonner comme une clochette, avec des sons aigus et légers.
- Zonzonner : bourdonner sourdement
- Maringouin : moustique, cousin (insecte)
- Calembredaine : propos cocasse et vain, qui ne repose sur rien
- Paltoquet : homme grossier, mufle
- Bénitier : vasque destinée à contenir l’eau bénite
- Parangon : modèle, personne accomplie qui peut servir d’exemple
- Sornette : affirmation sans fondement
- Brimborion : petit objet de peu de valeur
- Freluquet : jeune homme stupide et prétentieux / gringalet, menu
- Billevesées : stupidité, propos sans queue ni tête
- Mirliflore : jeune élégant satisfait de sa personne
- Margouillis : gâchis, boue mêlée d’ordures
- Épousailles : célébration d’un mariage
- Prie-Dieu : chaise ou banc liturgique sur lequel on s’agenouille pour prier
- Plumier : boîte rectangulaire dans laquelle on range les crayons et les stylos
- Cousette : jeune couturière ou nécessaire de couture
- Couard : lâche
- Cacochyme : en mauvaise santé, affaibli
- Pusillanime : manquant de courage, craignant les responsabilités
- Primesautier : qui décide, agit selon son premier mouvement, ses impulsions / qui est vif, alerte, plein de spontanéité
- Croquignolet : mignon, voire bizarre ou extraordinaire
- Dégingandé : qui, dans ses mouvements et dans son attitude, paraît avoir quelque chose de mal ordonné, en parlant d’une personne de haute taille
- Fieffé : qui a un vice situé au plus haut degré
- Éburnéen : qui a l’apparence, la blancheur de l’ivoire
- Ancillaire : relatif aux domestiques
- Callipyge : qui a de belles fesses
En sortant de l’école
nous avons rencontré
un paltoquet
qui flagornait
et qui baguenaudait
malgré son hoquet
Tout autour de la terre
Et tout autour de la pissotière
Qu’un hurluberlu
Prenait pour un bénitier
nous avons rencontré
Une grenouille
la fripouille
Qui se promenait en tutu
Au-dessus d’un parterre
nous avons rencontré
une sorte de coléoptère
désaxé
qui tintinnabulait
Devant un autre insecte freluquet
Au-dessus de la mer
nous avons rencontré
un maringouin
qui zonzonnait
se prenant sans doute pour un marsouin
Nous sommes revenus vite sur terre
Car de toute façon nous musardions
Aussi vite
À pied, à cheval, en voiture et en bateau à voiles.
En sortant de l’école…
En sortant de l’école, nous avons rencontré
des mésanges charbonnières, des moineaux, des pigeons,
une jolie merlette qui nourrissait ses oisillons,
des perruches vertes perchées tout en haut des tilleuls.
Dans l’étang, des grenouilles qui rigolaient, des canards qui voyageaient
suivis de leurs poussins , en file indienne ;
trois lapins qui s’enfuyaient, un chasseur en colère piqué par un maringouin.
Dans les jardins des œillets roses, rouges, blancs, des roses aux parfums délicats,
des anémones, des jonquilles, des campanules, des gueules de loup, des freesias,
des lobélias, des marguerites, des pivoines,des pâquerettes, des crocus.
Dans les potagers des oignons, des poireaux, des carottes, du persil, de l’oseille,
des laitues, des tomates et des courgettes,
un jardinier élégant et fier comme Artaban.
Dans un parc, sur un banc,
une jeune cousette muguetée par un freluquet,
après toutes ses sornettes,
rêvait d’une vie meilleure, de voyages mirobolants
avec un prince charmant,
un homme bienveillant,
de la musique, de l’amour,
à pied, à cheval, en voiture et en bateau à voile.
En sortant de l’école
nous avons rencontré
un vieux clown bigarré
dont les gants blancs disaient
venez baguenauder
sur mon fil d’araignée
Madame l’araignée
toutes pattes baguées
de diamants indigos
dansait le rigodon
et s’offrit en chantant
au bec noir d’une pie
qui nous prit sur son dos
La pie vint se poser
dans un champ de muguet
comme il était midi
la brise a invité
des millions de clochettes
à tintinnabuler
un mistral parfumé
nous a tous emballés
et roulés dans des cieux
teintés et nébuleux
jusqu’au palais du roi
Chef des calembredaines
patron des calembours
tournant sur un manège
où il brinquebalait
le roi nous régala
de vers alambiqués
enfin il nous fit grâce
d’un lot de coloquintes
Prenez ces calebasses
toutes bien calibrées
elles vous guideront
au pays des cabris
on nous y acclama
de bravos de olas
Au pays des cabris
on sautait on riait
et nos billevesées
passaient pour des maximes
doctement zonzonnées
par de vieux parangons
Puis on est revenu
par des chemins fleuris
certains virevoltant
avec les maringouins
d’autres au gré du vent
à pied à cheval en voiture
et en bateau à voiles.
En sortant de l’école
Nous avons rencontré
Trois pigeons badauds
Baguenaudant
Et picorant le blé cadeau
De vieilles dames démodées
Et en passant le pont
Nous avons rencontré
Un premier ministre primesautier
Sortant des primaires
Le printemps en sautoir
Et avec dans sa poche
Un serpent de sornettes
En arrivant sur le quai
Nous avons rencontré
Un vieux corsaire
Qui lisait son bréviaire
À genoux par terre
Dans une pose ancillaire
Et puis, comme on s’était éloignés
On a eu peur du croquemitaine
Et on s’est dépêchés d’rentrer
À pied à cheval en voiture
Et en bateau à voiles.
en sortant de l’école nous avons rencontré
Paulette la bleuette qui zonzonnait la cousette
pour toute la maisonnée
Eliette la fleurette qui jouait du cornet
sans piston la pauvrette car il était cassé
nous avons rencontré Colette et sa malette
jouant à la dinette qui rejoignait pressée le gros flot du métro
dans le flot du métro nous avons rencontré Suzette femmelette
qui cuisait quelques crêpes
avec grains de beauté pour un peu de monnaie
sur une scène en coeur garnie de belles couleurs
oh là là quel chantier
et puis dans cette scène vint tout apprêté poudré et parfumé
un petit clown en sucre rose caramélisé
à l’oeil luisant à la houpette enflammée
il se mit à jouer
il se mit à parler à sourire et à rire
il se mit à conter du jour et de la nuit
d’hier et d’aujourd’hui
et nous on écoutait et on applaudissait
de l’espoir pour demain
en sortant de l’école nous avons rencontré
un champ de poésie de pensées d’utopies et de possibles aussi
dont nous nous sommes nourris et nous avons tout pris et puis
comme Paulette seulette quêtait notre amitié
nous avons partagé et l’avons embarquée
à pied à cheval en voiture et en bateau à voiles