Au menu de cet atelier, voici un itinéraire gourmand. Nous espérons que les textes choisis vous mettront l’eau à la bouche et que vous mijoterez de délicieux textes !
1/ Écoutez les quatre extraits suivants en notant les mots qui vous plaisent. Il doit y avoir au moins un mot par extrait. Choisissez un mot simple et non pas une expression.
- Recette de l’amour fou (Serge Gainsbourg)
- Le festin de Gervaise (Émile Zola)
- Le mariage d’Emma (Gustave Flaubert)
- L’écossage des petits pois (Philippe Delerm)
2/ Choisissez un mot par texte, soit 4 mots au total.
Faites 4 colonnes, une par mot que vous écrirez en tête de chaque colonne.
3/ Écrivez dans chaque colonne, cinq à dix mots en lien avec le mot qui est en tête de la colonne.
4/ Écrivez quatre phrases avec dans chacune, un mot pioché dans chaque colonne.
5/ Maintenant, écrivez au choix un texte en rapport avec le repas : au choix une recette, un poème, une description de repas, de ses préparatifs, etc. Ce texte devra inclure les quatre phrases que vous avez composées en étape 4.
6/ Terminez au choix par une interrogation ou une morale.
7/ Publiez vos textes dans la boîte de commentaires, en indiquant les quatre phrases concoctées en étape 4.
Au plaisir de déguster vos textes !
Incertitude
La pluie s’est arrêtée.
Le poste de radio égrène un chapelet de jolies notes qui voyagent, virevoltent, se croisent, s’enchaînent ….Un pianiste joue « Estampes » de Claude Debussy.
Installée sur le rebord de la fenêtre, la chatte surveille la cuisine.
Vincent a ramené du potager des poireaux, du céleri, des carottes, des oignons ; il a préparé un délicieux potage ; il a composé un joli bouquet de roses ; le parfum des fleurs se mêle à celui des légumes.
Sur la table de la cuisine, il dispose un plateau de fromage, et des tranches de pain blanc, gris et noir.
Il attend Cécile pour partager ce repas.
Il espère qu’elle viendra mais Cécile est toujours en retard, hésitante, incertaine…
Estampes. Claude Debussy.
https://youtu.be/IFeD2A5p854
Phrases :
Le poste de radio égrène un chapelet de jolies notes.
Un pianiste joue « Estampes » de Debussy.
Sur le rebord de la fenêtre, la chatte surveille la cuisine.
Vincent a ramené du potager des poireaux, du céleri, des carottes, des oignons.
Il a composé un joli bouquet de roses.
Pour ma part je n’ai aucune incertitude !
Ce petit texte est concis, simple et harmonieux.
L’exercice difficile est réussi !
« Un pot-au-feu sans os est une gourmandise où on peut mordre sans risque », disait en riant ma Babouchka adorée qui n’avait plus que trois dents.
Pauvre Babouchka ! Depuis qu’elle avait dû fuir son pays, de maigres soupes lui faisaient souvent regretter les délicieuses bouchées du passé, en particulier les juteuses boulettes à la viande qui accompagnaient traditionnellement les dimanches.
Du haut de mes dix ans, j’ignorais l’ingéniosité qu’elle devait déployer pour m‘offrir un festin de roi chaque mercredi.
Je sens encore sur mon palais le goût de ces boulettes où la fraîcheur du persil se mariait au goût fumé du cumin. Du bout des incisives, j’épluchais consciencieusement la belle panure dorée, puis je faisais rouler sur ma langue la mouture épaisse de la viande gorgée de sucs avant de la faire disparaître avec volupté dans mon gosier.
« Mange Aliocha, mange » disait ma grand-mère en me dévorant des yeux.
Et ceci n’était que le hors d’œuvre… Je me revois encore attaquer la carcasse du poulet, gardant le goûteux sot-l’y-laisse pour la gourmandise finale. Le jus gras et savoureux dégoulinait, collait aux doigts et à la bouche. Babouchka me tendait une jolie serviette blanche que je maculais sans vergogne.
Alors Babouchka passait tendrement la main dans ma crinière de petit fauve repu.
« Bois un peu Aliocha, il faut faire de la place pour le dessert. »
J’ai encore sur la langue le goût de son parfait au chocolat qu’elle surmontait d’un amour en cage cueilli au jardin.
« Tu as aimé, mon Aliocha ? »
« Oh oui Babouchka ! ». Et je me levais pour passer mes bras autour de son cou.
Autour de ses yeux, ses rides s’animaient. Et aujourd’hui encore, aucun sourire au monde ne me semble plus éclatant que le sien.
MOTS CHOISIS DANS LES TEXTES LUS : mijoter, carcasse, chocolat, croquer
Line cette nouvelle m’a d’autant touché que j’ai connu mon arrière grand-mère tchèque que j’appelais babička.
Elle était bien vieille et constamment dans son lit, car elle avait reçu un coup de pied en trayant les vaches.
Que dire de cette nouvelle qui elle aussi est une réussite. Un français impeccable… Elle donne faim.
Vous avez mis la barre bien haute avec Nima !
Avec quelques libertés prises par rapport aux consignes… Mais bon, j’ai dégusté cet exercice ! Beaucoup !
Je donne tous les ingrédients, la recette est à la fin :
Piano
Boudin
Nougats
Facile
Orchestre
Touches
Musique
Doucement
Forte
Chopin
Gras
Sang
Grillé
Purée
Charcutier
Saucisse
Montélimar
Amandes
Pieds
Sucre
Dégouline
Fête foraine
Cool
Aisé
Simple
Fille
Bête
Abusif
1. Le chef d’orchestre, qui était aussi charcutier à ses heures, dégoulinait de sueur, autant devant la bête à abattre
que devant un parterre de musiciens prêts à attaquer l’adagio d’Albinoni.
2. Il est abusif, à Montélimar, de consommer de la purée alors que d’autres friandises nous jouent du Chopin.
3. La fille en sucre grillait tellement d’impatience qu’elle se sentait fondre doucement en caramel.
4. Ses yeux en amande étaient étoilés de touches de sang qui flottaient dans son regard comme de simples supernovas.
Quand la fille en sucre grille d’impatience,
C’est au charcutier, chef d’orchestre à ses heures,
Qu’il convient de la faire vibrer comme un violon,
Comme une bête à abattre.
Oui, il lui faut l’attaquer comme on attaque
Un adagio d’Albinoni,
Une salade de museau,
Avec une infinie douceur.
Et si, à cet instant, il dégouline de sueur,
Ému comme devant un parterre de musiciens,
Trempé comme un sauté de porc aux olives,
Alors la fille saura.
Elle verra dans ses yeux,
Dans son regard en amande,
Prêt au festin,
Flotter des étoiles de sang,
Simples supernovas de son appétit
Pour elle.
Quand il lui aura soufflé en confidence qu’à Montélimar
Des friandises jouent du Chopin,
Qu’il est abusif
D’y consommer de la purée,
Alors, la fille en sucre,
Étonnée,
Conquise,
Se sentira fondre doucement en caramel.
Merci d’avoir participé à cet atelier, semble-t-il difficile. Merci Nima d’avoir restitué un moment délicat où se mêlent roses du jardin , mets simples et goûteux, le tout enveloppé de notes subtiles.
Merci Hermano d’avoir réussi à marier avec la plus grande poésie et sensualité, truculence, terroir et envolées musicales classiques mais néanmoins passionnées. Le résultat est un texte allegretto très réjouissant !
Au lever du jour, alors que le soleil rosit tendrement les joues de la terre, le pacha s’éveille aux odeurs de l’aurore. Les serviteurs se précipitent, mettant à sa disposition ses babouches de peau fine safranées, son déshabillé de soie perlée, des brassées de nuances fleuries en bouquets dégradés aux délicates fragrances.
Les fontaines clapotent leur chuchotis. Dans les allées du jardin andalou et les vasques en volutes, il chavire les virelangues dans les oreilles attentives au son d’un luth monocorde sensible. Son sourire éclabousse une dentition blanche et parfaite.
Tout est luxe, calme et volupté. Un p’tit coin d’paradis?
Mots: calme, pacha, andalou, dentition
tout est luxe, calme et volupté
le pacha chavire la virelangue
au jardin andalou les fontaines écoulent leur clapotis
son sourire révéla une dentition blanche et parfaite
pour Nima
Belle ambiance de nature simple et du moment présent.
On s’y sent bien!
pour Hermano
Drôle, inattendu, libre et inventif……Bravo!
Merci Mondo pour cette gourmandise in-extremis. Que voilà un petit conte délicieux à la palette nuancée. Tout est raffiné, délicat, frais. Une mention spéciale pour les babouches de peau fine safranées : je veux les mêmes !