Nous allons commencer cet atelier avec quelques poèmes.
1 – Écoutez d’abord les 4 poèmes ci-dessous en notant les mots qui vous plaisent :
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- Poisson blanc aveugle (Purana)
- Fugit amor (Tanagra)
- Préparatifs de voyage (Aytek)
- Il y a (Apollinaire) encore un qui mériterait de s’inscrire sur le site !
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2 – Tracer maintenant 2 colonnes sur une page, puis :
- Choisissez un mot parmi ceux que vous avez notés
et écrivez-le en haut de la première colonne. - Écrivez maintenant, toujours dans la première colonne et en dessous de votre premier mot,
des mots qui vous viennent en lien avec de l’univers de ce mot. (entre 5 et 10 mots).
- Écrivez, en haut de la deuxième colonne, un mot le plus éloigné possible de cet univers.
- Écrivez ensuite dans la deuxième colonne
les mots ou expressions que vous inspire ce deuxième univers (entre 5 et 10 mots).
3 – Écrivez plusieurs phrases.
Chacune doit utiliser un mot de la première colonne et un mot de la deuxième colonne.
4 – Écrivez maintenant un texte en 8 minutes en utilisant tous les mots de ces 2 colonnes.
5 – Tracez 2 nouvelles colonnes sur une feuille.
- Choisissez un verbe dans le texte que vous venez de rédiger
et écrivez-le en tête de la première colonne. - Trouvez un verbe en opposition (pas forcément dans votre texte)
et écrivez le en tête de la deuxième colonne. - Dans chaque colonne, écrivez maintenant des mots par association d’idées.
6 – Écrivez enfin un texte qui mette en tension (en opposition) les deux verbes choisis,
en utilisant ou pas les mots des 2 colonnes, selon votre inspiration.
7 – Publiez les textes que vous avez écrits pendant cet atelier, ci-dessous dans la boîte de commentaire.
Le mot choisi : vertige
Je m’approchais de la falaise avec assurance.
Un vacillement incontrôlable lui fit perdre l’équilibre
La proximité de l’abîme altérait sa confiance
Un violent vertige le saisit, il en perdit toute assurance
Au bord de ce gouffre sans fond, son assise lui sembla fragile
En présence du vide sa lucidité lui échappait
Il ressentit soudainement un profond malaise et une sorte de vacillement lui fit perdre son équilibre. Lui, l’homme respecté pour sa stabilité, son assurance, dont on vantait la lucidité. Lui à qui l’on accordait sa confiance, lui le socle dont on ne doutait jamais de la solidité, voilà que son assise se dérobait. Il se sentait au bord d’une haute falaise, le gouffre le fascinait par un puissant vertige et le vide l’invitait à se laisser aller aux délices des profondeurs. Mais que la longue chute dans l’abîme devait être douce !
Protéger. Dérober
L’homme s’était entouré de mille précautions et le trésor était défendu, protégé, sécurisé. Ses coffres offraient toutes les garanties d’inviolabilité que permettaient les moyens techniques les plus avancés, il avait érigé des murs, recruté des nervis aussi serviles qu’aguerris, libéré des chiens de garde fous furieux et monté un faisceau de projecteurs qui balayaient la nuit. Cette fortune lui assurait son équilibre de puissant respecté, lui garantissait pouvoir, crainte et domination, elle était devenue sa vie car sans elle il n’existerait pas. Il la défendait donc, légitimement, contre toute tentative d’où qu’elle vienne et notamment de ces gueux organisés en bande, ces misérables loqueteux qui prétendent à leur part de richesse.
Lui, il n’avait qu’une idée en tête : lui dérober son trésor. D’ailleurs était-ce son trésor ? C’était un trésor, bien sûr ! Mais où était-il écrit que c’était le sien ? Par quel jeu de coutumes, de traditions, d’usages, voire de lois imbéciles pouvait-il s’en déclarer propriétaire ? Qui obligeait Serane à souscrire à tous ces préjugés idiots, ces règles érigées et admises par une société incapable de prendre en compte les besoins réels de chacun, et qui assuraient à certains la jouissance sans fin de richesses acquises aux dépens des autres ? La décision était prise, Serane allait lui subtiliser son trésor., le lui enlever, le lui ravir. Oh ! Il ne s’agissait pas de vengeance ni de sévices infligés, il souffrirait bien sûr, mais la volupté dont Serane se laissait envelopper ne tenait pas à cette douleur, celle-ci n’était pas l’objectif mais une inévitable conséquence, relativement mineure d’ailleurs au regard du malheur de tous les méprisés. Non, il avait juste le sentiment de caresser la justice comme une belle dame qui secrètement frissonnerait d’excitation.
Il saurait trouver les moyens de la séduire.
Je ne résiste pas à l’envie de publier un court commentaire :
Un enfermement évoqué dans ces lignes et un style qui me rappellent “L’automne du patriarche” de García Márquez.
J’en prendrais bien encore quelques lignes !
Voilà un texte qui mériterait bien d’être publié dans la rubrique Textes d’atelier ou Nouvelles.
Merci Chamans, pour ces textes et pour ta promptitude !
Plus envie de tourner en rond.
Elle décide de ne plus se laisser happer par les idées noires, d’envisager la lutte contre la déprime, la prendre à bras le corps.
Un changement dans les teintes de son appartement s’impose. Elle qui a adopté le look branché jusque là. Peu importe. Impératif
de quitter au plus vite ce gris béton pourvoyeur de cafard en âmes plombées.
Elle n’y parviendra pas seule.
Ne se sentant ni la force ni l’autonomie d’imaginer une telle bascule, elle s’accroche à la sonnette de la voisine. Un échange
salvateur lui portera secours et réconfort.
Yasmina l’accueille en babouches jaune curry, un grand sourire sur un air de raï festif, dans un parfum infiltrant de thé aux épices.
Elle lui offre de la conduire dans un entrepôt de couleurs.
Indécise enfin engagée pour un abricot éclatant, elle le projette dans son intérieur; le soleil agite sa torpeur.
Du soin coloré pour son âme sensible, rompue à l’habitude d’une mélancolie lascive.
Ravie de te retrouver Mondo ! Merci pour ce texte scandé, aux coupures surprenantes. J’aime tes images évocatrices : “s’accrocher à la sonnette”, “pourvoyeur de cafard en âmes plombées” , “le soleil agite sa torpeur”.
Merci pour ce “soin coloré” qui nous fait du bien !
Mes mots : vaguemestre => soleil en opposition
Sur un papier orange j’ai écrit les mots qui me brûleraient les lèvres.
Orange, comme le feu qui me consume en pensant à toi.
Encore une fois, j’ai repensé à toi et à nos chers moments partagés. Une vague de chaleur et de joie m’a submergée. Le cœur battant, j’ai signé ma missive et je l’ai glissée dans une enveloppe joliment timbrée.
Par la fenêtre, j’ai regardé les tournesols déployer leurs corolles flamboyantes vers le soleil. Toi, tu as apporté l’été dans ma vie et je ne peux me résoudre à risquer de te perdre, à ranger notre histoire au rayon des souvenirs.
J’ai imaginé le voyage de ma lettre, depuis la boîte postale jaune, au-delà des champs, des rivières, vers ta ville… enfin déposée par le facteur chez toi, là où les enfants jouent dans le jardin.
Alors, j’ai froissé ma lettre en boule.
Froisser => Étirer
Froissés, la tôle, le tissu, le papier
Étirés le bronze, l’argile
Repliés le fil, le corps
Tendus la toile, le corps encor.
Tutus froissés, pas de quatre au cordeau
Pierre burinée, si lisse au toucher.
Apparente légèreté
Corps à corps avec la matière,
Geste cent fois répété,
Tension vers le ciel
Capturer un moment rare
Pour l’éternité.
Atelier Opposition
Mourir et renaître. Observer les ronds dans l’eau.
Mouvement cyclique.
Sans bruit.
Sans fil.
Sans altérer la patience du sable
qui fut jadis géant minéral.
Sans guider la force du caillou
vers son crissement intemporel.
Mourir et renaître.
Sans aile, en étoile d’un soir…
et voir
Ophénix 28/09/2021
**
Une averse d’échos.
Tout semble sous surveillance,
bienveillante ? malfaisante ?
Mains dans les poches, lacets défaits,
Visage découvert,
il s’en moque.
Il avance, dos vouté sous la cascade des années.
Il s’en moque, si ses os se cristallisent en révolte,
si la porte n’est qu’entrebâillée,
s’il tourne le dos aux barreaux protecteurs qui si longtemps l’ont jaugé, filtré.
Une averse d’échos tente une nouvelle infiltration
dans les rouages de son mental.
Il s’agite comme un ancien prisonnier qui s’extirpe du passé
Dans un instant de doute,
il va jusqu’à s’espionner lui-même.
Puis dans un souffle libère ce qui doit être libéré
et avance sur sa nouvelle route
que lui, veut tracer.
Ophénix
28/09/202
Aveugle vs Tarte aux pommes
· Un bandeau de pâte feuilletée en forme de cœur donnait à son gâteau une touche romantique qui lui plaisait beaucoup.
· Il faisait noir comme dans un four.
· Bien que cela fût formellement interdit, il choisissait à tâtons les fruits à l’étalage.
· Pour le jour de mon anniversaire, ma mère avait prévu de nous faire tous jouer à Colin-Maillard.
· Tout le monde sait que le chien jaune doré adoré de Mickey s’appelle Pluto !
· L’inconnue à la peau couleur cannelle faisait se retourner toutes les têtes.
· Madame ! Il n’y a aucun danger à malaxer la pâte avec ce robot ménager de dernière génération : il saura vous masser à merveille !
· Le chef de rang poussait un charriot couvert de desserts éblouissants, des rouges, des bleus des mauves, un vrai feu d’artifice !
· La rédac chef, par pure déontologie, avait décidé de jeter le black-out sur les côtés croustillants de cette affaire.
· Le vide-greniers se terminait, il ne lui restait plus qu’une canne blanche et un moule à tarte… 😊
La moitié de l’Amérique du Nord était touchée par cette panne d’électricité. C’était le black-out, le noir complet, et pourtant elle devait terminer la tarte aux pommes, le dessert qu’elle avait prévu pour l’anniversaire du petit. Elle se mit à malaxer à tâtons la farine et le beurre, et c’est à ce moment-là que cet idiot de chien commença de hurler à la mort. Comme si elle avait un bandeau sur les yeux, elle éplucha et coupa les fruits et partit à l’inconnu chercher dans son placard la cannelle et le moule à tarte. Fabriqué ainsi à l’aveugle, ce ne serait certes pas un dessert éblouissant et la pâte ne serait peut-être pas vraiment feuilletée, aussi croustillante que d’habitude, avec ce beau jaune doré si appétissant… mais bon, elle aurait essayé !
Elle se prit à rire : les cannes blanches qu’elle s’était procurées pour faire jouer les enfants à Colin-Maillard seraient vraiment de circonstance ! Le chien était toujours dans ses pieds en train de hurler, un vrai danger qu’elle repoussa d’un coup de talon avant d’enfourner la tarte et de se rendre compte, damned ! que son four était électrique !
Fabriquer vs Démonter
Tel Sisyphe, il érigeait chaque jour le chapiteau de son cirque ambulant, carcasse de barres de fer emboîtées les unes aux autres, recouvertes d’une épaisse toile imperméable, le tout surmonté d’une jolie boule rouge et, tel Sisyphe, il lui fallait chaque matin écrouler la structure et la toile, les ranger dans le camion et repartir vers un autre village. Finalement, il avait adopté ce nom de Sisyphe comme nom d’artiste et ainsi allait sa vie.
Un jour, toujours bourlinguant et arrivé au fil de ses pérégrinations sur une petite île grecque, Sisyphe rencontra une femme qui devint son âme sœur. Comme ils se comprenaient tous les deux ! Comme ils avaient tant de choses en commun ! Comme elle savait son supplice d’avoir à recommencer jour après jour, à faire et à défaire, à créer puis à détruire, encore et encore. C’était son lot à elle aussi, un déchirement dont jamais elle ne se départait. Oui, chaque jour qui passait, Pénélope tissait sans fin la même toile qu’elle défaisait chaque nuit. On s’habitue à tout… même à la corde !
L’histoire, la légende, le mythe, laissent ces deux-là à leur misérable destin, mais on m’a dit que la fidélité de Pénélope n’est effectivement qu’un mythe (je suis tellement déçu), que pendant qu’Ulysse combattait les cyclopes, Sisyphe et Pénélope sont tombés amoureux, que le vieil Argos a pris Sisyphe pour son maître et a accepté de se produire dans un numéro de chien savant, et que Télémaque n’en a jamais rien su ni Homère non plus !
1-
Assise sur un banc, dans un parc, une femme âgée pleure ; elle voudrait tellement lâcher ses souffrances.
Elle écrit à un amoureux de sa jeunesse.
Elle dit adieu aux guerres, aux cimetières remplis de croix, aux violences.
Elle veut retrouver la saveur des minutes, l’oiseau blanc de la paix et le ballet des papillons aux mille couleurs.
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2-
Petite fille, Clo voulait courir, sauter, danser comme les animaux de la forêt.
En elle, il y avait joie, lumière, désir de liberté.
Sa mère, une dame élégante et très sévère, réprouvait ces envies ; elle les nommait “folies”.
En grandissant, sa vie devint difficile ; elle était ballotée entre ses désirs et l’envie de correspondre aux critères maternels.
Elle dessinait des envolées d’oiseaux, de papillons, de cerf volants.
Elle écrivait des contes et des poèmes remplis de couleurs.
Quand elle eut vingt ans, elle partit vivre dans une petite maison, près des forêts d’Ardennes ; autour de la maison, un grand jardin
accueillait des pommiers, des poiriers, un potager, des asters, des marguerites, du muguet, et des pois de senteur.
Je lui rends visite de temps en temps ; je pense qu’elle retrouve la joie, la lumière et la liberté.