Bienvenue à toutes et à tous !
Merci d’être venus jusqu’ici pour participer à cet atelier en ligne.
Nous pouvons donc commencer…
Vous allez écrire un texte.
- Choisissez d’abord un prénom.
- Commencez votre texte par ce prénom et continuez en utilisant tous les mots de la liste suivante,
dans l’ordre où ils sont proposés et en respectant les majuscules et les minuscules,
les genres masculins ou féminins, le singulier et le pluriel et les conjugaisons des verbes.
obsession, englué, marotte, coup de feu, atmosphère, loupe, abîme, Grave,
chuintant, brouillard, méduser, déduire, Mystère, persifler, éléphant, grincèrent,
étang, Funèbre, sables mouvants, château, glacé, Pourtant.
À vous de jouer maintenant !
Publiez ensuite votre texte dans la boîte de commentaire ci-dessous (Laisser un commentaire).
Quand vous aurez envoyé votre texte,
vous recevrez un mail chaque fois qu’un nouveau participant ajoutera le sien. Pratique, non ?
Lola,
Lola tu es mon amie et c’est à ce titre que tu reçois cette lettre, terrible confidence d’une obsession qu’il m’est impossible de garder pour moi plus longtemps, qui m’enserre de ses bras visqueux et dans laquelle je suis totalement englué. Chaque nuit je fais ce rêve, ne te moque pas c’est un rêve affreux et récurrent : Je tiens une marotte, une tête de femme qui me fixe en tournant lentement son cou dans un sens et dans l’autre, dans une oscillation régulière qui agite à peine les clochettes de porcelaine accrochées à ses cheveux, son regard est méchant et accusateur, je t’assure que c’est effrayant ! Je ne sors de ce cauchemar qu’au claquement d’un coup de feu qui m’éveille en sursaut et me libère un court instant de cette atmosphère irrespirable. Cette marotte serait presque insignifiante si elle n’était grossie par une énorme loupe, installée entre elle et moi pour la rendre monstrueuse et me jeter dans un abîme d’angoisse et de terreur. Grave ! L’affaire est grave ! Je ne vis plus, mes nuits sont atroces et l’obsession de la marotte a gagné mes journées. Et je ne t’ai pas tout dit encore, les clochettes n’émettent aucun son, elles bougent doucement et leur silence est glacial, dans son mouvement lent les yeux de la marotte restent fixés sur moi en tournant dans leurs orbites et en chuintant, oui tu as bien lu, en chuintant ! Sa bouche est close mais ses yeux chuintent, c’est eux que j’entends j’en suis sûr ! Non Lola ne te dis pas que je m’enfonce dans le brouillard de la folie, je sais que mes propos ont de quoi te méduser et je n’imagine que trop ce que tu risques d’en déduire.
Mystère que ces rêves, ces images et ces sons qui nous hantent !
J’ai accueilli sans persifler tes histoires d’éléphant blanc, t’en souviens-tu ? Une nuit il te souleva sur ses énormes défenses et tu m’as dit que tes dents en grincèrent de panique. N’est-ce pas moi qui l’ai noyé dans cet étang à l’eau calme ? Calme comme ton sommeil retrouvé. Funèbre barrissement, éteint dans les sables mouvants, que du haut de la tour de ton fier château tu as sans doute oublié. Je t’en supplie Lola, c’est pour ton bien que j’ai noyé l’éléphant, mets de vraies balles dans ton revolver et sors de ton mutisme glacé, accepte de revenir dans mon cauchemar pour y neutraliser la marotte. Je sais que tu hésites. Pourtant tu aurais un grand pouvoir sur elle, elle te ressemble tant !
Comme vous le savez sans doute Lola est le diminutif de Dolores
Quelle histoire !
Sven, mon ami, souffre d’une grave obsession depuis le début de son adolescence.
Il se sent englué dans un monde désespérant de contraintes : tout doit être droit, parfait, ordonné, impeccable. Il a des tics, des phobies,des peurs inexpliquées et la marotte de tout vouloir comprendre dans les moindres détails.
Hier il a entendu un bruit fort dans les jardins ; il était convaincu qu’un coup de feu avait été tiré et que quelqu’un était mort. Pour lui, l’atmosphère est lourde ; le monde est dangereux, menaçant. Si on lui propose un aliment, il l’étudie à la loupe, pour détecter d’éventuels éléments toxiques ; « on veut m’empoisonner » pense-t-il.
Sa vie est un abîme de souffrances.
Grave, il erre, cet après-midi, dans un chemin du parc voisin ; il y observe les cailloux, les soupèse, les compare, les étudie, les caresse, les lisse dans ses mains ; il leur donne de petits noms et leur parle comme à des enfants en chuintant.
Quand il décide de repartir pour retourner chez lui, un épais brouillard a recouvert toute la région ; il se sent emprisonné ; cette brume va le méduser. Pétrifié, tremblant de froid et de peur, il ne retrouve plus son chemin. Selon son mode de pensée, il va en déduire que sa vie est finie, qu’il n’y a plus rien à faire.
A quelques mètres de là, dans une prairie, un petit avion atterrit à cause des conditions atmosphériques ; sa forme ressemble à celle des jets Mystère. Le pilote se demande où il est ; il voudrait de l’aide et des indications ; il a aperçu Sven et commence à le questionner ; comme ce dernier ne répond pas, il en vient à le persifler cruellement :
– A quelle espèce d’animaux appartiens-tu ?
– pourquoi tournes-tu en rond comme un éléphant au cirque ?
– Que fais-tu là ?
Mon ami Sven ne répond pas ; quand il est en proie à ses troubles, contrarié, irrité, il ne comprend plus le langage humain, rentre en lui-même et se referme. Comme le ton du pilote est ironique, il est d’autant plus perturbé, comme il l’était après ce rêve d’il y a longtemps :
il fut enfermé dans la cave d’un château par une bande de truands ;
ils le mirent dans un coffre en bois dont les charnières grincèrent ; ils emportèrent la malle au milieu de l’étang.
Funèbre destin !
Une de ses jeunes amies informée de cette affreuse histoire, partit vers l’étang pour le délivrer ; mais il fallait traverser des sables mouvants. La jeune téméraire s’y enlisa et ne parvint jamais à son but.
Le pilote constate qu’aucune réponse ne lui parvient de la part de l’homme égaré. Il lui parle en anglais, en espagnol, dans d’autres langues ; pas de réaction ; Sven est dans un état de sidération comme après son ancien rêve ; frissonnant, glacé, il marche comme un robot.
Pourtant la température est clémente ; le pilote essaie encore de lui poser des questions ; il ne comprend pas la situation ; après ces essais infructueux, il perd patience, s’énerve. A bout de nerfs, il prend son flingue et tire sur Sven ; celui-ci tombe inanimé ; le pilote s’enfuit avec son engin.
Mais quelle imagination vous avez !
Chamans un texte que je qualifierais de “burlesque” et qui m’a vraiment enchanté.
Nima : mes respects ! Un petit bijou sans déroger aux consignes d’écriture ! Bravo !
Quelle histoire !
Pénélope, au prénom prédestiné, attendait toujours.
Toutes les nuits, dans une sorte d’obsession nocturne, elle tissait les mots avant de les publier sur la toile. Et chaque soir, elle revenait attendre quelque commentaire, quelque message amical, elle s’appliquait à réparer quelque accroc à l’un de ses textes, à exhiber un mot nouveau resté si longtemps englué dans les dictionnaires.
Non, cela n’était pas vraiment une marotte, mais plutôt une façon d’attendre et d’espérer qu’une nuit, une âme sœur… une véritable âme sœur viendrait la rejoindre.
Et puis, une nuit d’avril vers trois heures du matin, quand Saturne et Vénus se disputaient le ciel, ce fut comme un coup de feu, un coup de tonnerre, ou plutôt comme un coup de foudre. Il était là, elle ne connaissait ni son nom ni son visage mais il était là et l’atmosphère sur la toile avait changé pour elle. Nul besoin d’une loupe pour le scruter davantage, elle préférait rester discrète et ne pas tomber dans l’abîme des séductions faciles.
Grave ! il m’arrive enfin quelque chose de vraiment grave ! Pénélope se sentait heureuse, transportée, et ni le volet chuintant sinistrement ni même le brouillard épais et froid qui venait de cacher les étoiles n’auraient su perturber sa belle émotion. Il était là, celui qu’elle attendait, et elle se laissa vite méduser par cette langue si souple, si belle, par cet esprit si brillant ! Fallait-il en déduire qu’elle était amoureuse ? C’est la question qu’elle se posait en continuant à pianoter sur son clavier pour lire encore et encore les poèmes de cet homme et formuler quelque commentaire qu’elle voulait subtil et élogieux. Mais, sous ce pseudo étrange, était-ce bien un homme, et qui était-il ? Mystère !
Elle n’osa pas se confier à ses amies du mercredi soir, elle craignait trop de les entendre persifler dans son dos en riant sottement : “La Pénélope a trouvé son Ulysse ! ” ou “Eh bien, elle va pouvoir jouer les sirènes, ou les Circées ! “, ou encore… Non ! les laisser ainsi se moquer de cet amour naissant aurait été pire que de mettre un éléphant dans un magasin de porcelaine !
Semaine après semaine, elle avait échangé quelques messages plutôt neutres et un peu convenus avec cet homme – car il s’agissait bien d’un homme – qui lui répondait toujours rapidement et poliment, mais elle n’avait pas osé lui déclarer des sentiments qui ne cessaient de croitre.
Elle ne savait à qui parler de cet état nouveau qui la troublait profondément. Alors, comme elle aimait écrire, elle décida de se confier désormais chaque nuit à la page blanche. Cela commençait ainsi :
“Soudain, ce fut une libération : les volets grincèrent et les fenêtres s’ouvrirent à la volée sur un univers que je n’espérais plus, et l’avenir m’apparut soudain lisse et tranquille comme un étang. Moi, qui étais si longtemps restée dans cette attente. Funèbre attente dont je ne sortais plus, solitude de sables mouvants dans lesquels je m’enfonçais chaque nuit autant avec délice qu’avec dégoût.
Oui, je t’ai reconnu, tu m’as reconnue, et je veux vivre avec toi, vivre enfin dans un château, laisser cet univers de papier glacé… qui rime sans rimer à rien. Ensemble, ouvrons un monde, notre monde ! Rejoins-moi !“
Pénélope osa envoyer au nouvel élu de son cœur ces premières lignes enflammées, excessives, au lyrisme désuet, dont le style ressemblait un peu à celui de George Sand écrivant à Musset, ou à celui d’une amoureuse à la Jane Austen. Elle attendit toute la nuit une réponse, pendant des heures, en proie à la plus grande des excitations, mais aussi dévorée par le doute.
Pourtant, au petit matin, n’en pouvant plus, fatiguée de cette dernière nuit d’attente fébrile, elle s’endormit à la table de sa terrasse, sous le chêne, où elle était venue écouter l’aube se lever avec le chant des oiseaux.
Une nouvelle aube, car quand Pénélope se réveilla, quelqu’un tenait sa main. Lui.
Camille ne vivait plus que par et pour son obsession; englué dans les sables mouvants de sa nouvelle marotte, il repassait en boucle les indices qui le confortaient dans sa conviction.
Tout avait commencé par ce coup de feu, après une nuit de pluie violente. Il s’était précipité dehors. L’atmosphère était lourde d’humidité. Grossies par des gouttes d’eau formant loupe, les nervures des aulnes dessinaient des signes cabalistiques. Il avait foncé comme un dératé en direction de la détonation avant de s’arrêter à bout de souffle au bord de l’abîme, là où la falaise plonge brusquement dans le lit de la rivière. À cet endroit la forêt était épaisse et sombre et les bruits assourdis. Grave et tendu, il scruta le silence et n’entendit que le vent chuintant dans les branchages. Le brouillard qui l’enveloppa soudain le pétrifia. Méduser était le terme plus exact tant il eut la certitude d’être l’objet d’une colère divine. À vouloir observer, décrypter, déduire, il approchait de trop près le Mystère, celui qu’on habille d’une majuscule car il touche de très près la Vie et la Mort. Ses compagnons avaient beau se moquer de lui et persifler, c’était bien là une nouvelle preuve qu’il approchait de la Vérité. Pauvres sots aveugles et sourds qui n’auraient pas distingué un éléphant dans un magasin de porcelaine ! Mais qu’allait-il advenir de lui à présent ? Sous la chape de brume il fut pris d’une suée et ses dents grincèrent. Le moindre bruit prenait des proportions démesurées, il avait perdu tout repère et n’osait plus bouger car il se savait proche de l’abîme. Trempé, tétanisé, il finit par s’évanouir de peur. Lorsqu’il se réveilla, un jour sombre s’était levé. Il se releva et rebroussa chemin aussi vite qu’il put. Il longea l’étang dont les rives bordées de roseaux étaient hantées des cris lugubres d’oiseaux de mauvais augure. Funèbre était leur chant qui le glaça jusqu’aux os. Il faillit s’embourber dans les sables mouvants avant de rejoindre le château solitaire et glacé. À n’en pas douter, ceci était un avertissement. Pourtant il était bien décidé à percer le secret des fantômes de ses ancêtres.