Atelier du 6 décembre 2018, Paris. Texte de Dominique. Proposition d’écriture: https://www.oasisdepoesie.org/forums/topic/plongez-dans-la-couleur/
La salle est vaste, haute, remplie de petites chaises et de petites tables bien rangées les unes à coté des autres. Elles sont nombreuses, me semblent innombrables, tant j’ai du mal à voir le bout des rangées. L’odeur de cette salle est nouvelle pour moi. Elle me fait penser à celle qui reste dans la cuisine après la cuisson d’un gâteau. Elle est douce, accueillante, paisible. Je me sens calme, heureuse d’entrer dans ce lieu avec d’autres enfants que je ne connais pas.
Une femme nous accompagne. Elle est maigre, sèche, avec des yeux très noirs et brillants de douceur et un sourire éclatant.
Je m’installe au milieu d’une rangée, à la place qu’elle m’a désignée. Je me sens très entourée et seule à la fois. C’est la première fois que je me sens autant entourée, à mon aise avec les autres, même si je ne leur parle pas.
Je regarde très attentivement cette femme qui, avec des gestes larges et dansants, circule devant les tables, parle posément à tous et à chacun de nous.
Et voilà qu’elle distribue et pose sur chacune des tables, des barres de couleur : bleues, vertes, rouges, jaunes. Je les touche, elles sont tièdes, molles et me donnent envie de mordre dedans.
La consigne est lâchée : « faites une tarte aux cerises ». Je saisis la barre jaune et je coupe un morceau de cette matière soupe que mes doigts modèlent : j’attendris la couleur, enfonce me doigts pour avoir le plaisir de les retirer et de laisser une marque, un creux dans ce jaune qui me sourit, joyeux et s’amuse avec moi. Je fais un petit cercle, je l’agrandis en tirant sur les bords. Je cuisine cette douceur jaune et suis fière d’en faire une forme plutôt ronde et plate.
Avec la barre de couleur rouge, je fais des cerises qui ont la taille de pommes, en proportion du fond de tarte. Je les trouve réussies, rondes, posées sur le jaune comme sur un coussin d’or.
Je me sens fière, joyeuse. J’ai encore cette sensation en moi, lorsque j’écris ces lignes.
C’est mon premier jour d’école, à jamais jaune et rouge, doux, tendre et tiède.
Salut Dominique,
J’ai adoré lire ce petit texte rempli de couleurs, d’odeurs, de doux bruits et de textures.
Les verbes au présent permettent à ce bref retour en arrière de se faire sentir ici et maintenant.
La chute avec « à jamais jaune et rouge, doux, tendre et tiède » est magnifique !
Merci à toi,
Purana
Vraiment bien écrit, je trouve.
J’y ressens bien les sentiments d’étonnement et d’inquiétude qui traversent l’enfant, puis son abandon dans cette nouvelle activité tactile et chaude, et enfin la joie d’avoir réussi cette première épreuve initiatique !
Et bien sûr, j’adore cette conlusion.