Texte issu de l’atelier de Villenave d’Ornon sur les prophéties chinoises (mars 24)
Par un beau matin de printemps Perle de Jade dessina sur une grande feuille de papier un gigantesque mandala, si grand qu’elle pouvait s’y promener en posant l’un devant l’autre ses petits pieds nus. Lorsqu’elle eut dessiné de longues nervures noires et concentriques, elle entreprit de les colorer à l’aide d’un gros pinceau qu’elle peinait à faire tenir dans ses mains d’enfant. Elle choisit un magnifique vert émeraude, de la même couleur que les champs de thé de son père. Puis elle y plaça deux des figurines offertes par sa mère pour le Nouvel An. Elle choisit ses préférées, le superbe dragon de bois à la robe rouge feu et le fidèle chien de terre au regard doux et elle s’amusa à les faire dialoguer.
– Oh, oh ! fit le dragon, bonjour ami chien, que viens-tu faire ici ?
– Noble dragon, je viens sentir les feuilles de thé car mon flair me permet de détecter les plus parfumées.
– Que voilà une occupation utile, je te félicite ! le maître doit te faire une grande confiance !
– Assurément noble dragon et je m’efforce de faire au mieux pour ne pas le décevoir, mais que nous vaut l’honneur de ta visite ?
– L’Empereur m’a envoyé pour goûter les feuilles de thé et choisir celles qui seront dignes de sa maisonnée.
– Je te retourne le compliment ami dragon. Notre empereur doit te faire une grande confiance car le thé, boisson noble par excellence, est offert à tous ses illustres visiteurs. Il convient donc que ceux-ci soient parfaitement traités et qu’ils reviennent chez eux émerveillés par la qualité de leur séjour !
– Tu dis vrai, ami chien et tu me sembles plein de sagesse. Allons causer autour d’une tasse de thé.
– Avec plaisir noble dragon. Laisse-moi t’offrir un de nos plus subtils Oolong, délicatement fumé aux feuilles de goyavier.
Ainsi fut fait. Chien et Dragon se réunirent autour de la dînette en porcelaine de Perle de Jade et discutèrent de l’avenir.
– Vois-tu, dit le dragon, je souhaite que l’année qui vient conforte la puissance de notre empereur et affaiblisse ses ennemis.
– Et moi, dit le chien, je souhaite protéger mon maître et sa famille et leur apporter la chaleur de mon amitié fidèle.
– Voilà un beau programme ami chien ! Je te propose d’apporter ma protection à la famille de ton maître si tu t’engages à servir fidèlement mon maître, le veux-tu bien ?
– Noble dragon, je te remercie de ta proposition. Je serais heureux de plaire à ton maître et de placer ma famille bien-aimée sous sa très haute protection. Mais dis-moi comment je pourrais le servir sans abandonner ceux que j’aime plus que tout ?
Le dragon réfléchit et répondit :
– Dans ce cas, qu’ils te suivent à la cour !
– Merci de cette offre généreuse mais notre famille n’est pas une famille de courtisans. Elle préfère servir notre empereur bien-aimé en cultivant avec soin et amour les théiers qui permettront de ravir son palais et éblouir ses hôtes.
Le dragon, étonné devant tant de sage abnégation et de sens du devoir répondit :
– Soit ami chien ! Restez donc ici, toi et ta famille et faites prospérer notre beau pays. Je vous invite tous pour les prochaines festivités du Nouvel An et proposerai à l’empereur de faire une tournée de nos sujets méritants dont vous ferez part
De ce jour, la famille décida de mettre le portrait du chien sur ses sacs de thé. Cette histoire se passait à l’époque Ming mais aujourd’hui encore, « le chien au cœur d’or » est le thé préféré des grands de ce monde.
Bien que je sois un accroc du café, j’ai beaucoup apprécié cette nouvelle pleine de charme et de poésie.
« le chien au cœur d’or » est le thé préféré des grands de ce monde.
Ce thé existe-t-il réellement ou est-il issu de l’imagination de l’auteur ?
Ce conte est charmant. Léger comme une effluve de bon thé. Le chien et le dragon y rivalisent d’une exquise politesse toute chinoise.
Villenave t’aura inspirée.
J’ai la même question que Loki.
Merci Loki et Chamans pour vos commentaires appréciatifs. Le thé du chien au coeur d’or est sorti de mon imagination, stimulée par les thés Mariage Frères aux noms imagés (Black Leopard, Montagne d’or, etc.)…
Perdu dans ces labyrinthes odorants,
et charmé par ce langage d’une courtoisie toute orientale,
autant que par la sagesse qui en émane,
je flotte dans la zénitude…