Ils étaient tous les deux très très habités par des paysages différents.
Lui, vert, la mer en hiver.
Elle, confectionnant compulsivement du matin au soir puis du soir au matin des origatas multiples et colorés pleins ou vides selon l’humeur, ce qu’elle avait sous la main, dans ses tiroirs : “les cadeaux entretiennent l’amitié” se plaisait-elle à penser.
Lui, ce fut un sacré chic type du temps où les affaires marchaient, où le quartier vivait, où les voisins animaient la chambre voisine, s’aimaient, chantaient, se disputaient…
Elle, sensible à la colorature des attitudes locales lorsqu’elle se mêlait à la foule, un seul espoir l’habitait : elle allait quitter Shanghaï et les angoisses urbaines : “Je ne sais pas encore comment mais je vais trouver !“.
Elle enfila son trench-coat, sauta dans ses escarpins, vaporisa dans son cou le dernier parfum du jour, noua ce foulard de soie sauvage qui lui venait de sa mère sur sa chevelure de jais. Elle vérifia du dos de la main la présence du portable en poche.
Alors… se fit entendre l’indicatif de la voix chaude et vivante de Marilyn qu’elle abrégea tandis qu’une voix inconnue poursuivit : ” Allôôô… …. Allôôô ma chère, je vous croise depuis un temps certain ; j’ai récupéré vos coordonnées “chez Marcel” où je prenais un p’tit noir. Je sors d’un rêve eurasien dans lequel ma Bentley longe la ligne médiane d’une route verdoyante. Ce rêve, je souhaiterais le poursuivre avec vous parmi les bœufs à longues cornes, les formes douces et les nuages bas. Il m’a semblé que vous pourriez avoir un quelconque lien avec ce coin du monde à la paisible lenteur où j’aimerais me languir avec vous. Nous poursuivrions à deux ce périple que je fus seul à débuter. Je vous propose de le partager avec moi, incessamment très vite. J’attends votre réponse et ne peux plus attendre.“
Elle en fut abasourdie. Certes, elle cultivait l’envie de s’échapper, de voyager, l’excitation de quitter momentanément cette vie d’habitudes, de colorer différemment son imaginaire, d’imprimer sa rétine d’une luminosité différente, d’engranger des nuits atypiques, mais… la nouveauté aussi radicalement proposée, elle ne s’y attendait pas… et… de qui donc émanait donc cette initiative incroyable ?
“Je revois le client prostré sous l’applique devant son quotidien, la secrétaire pressée qui donne systématiquement son coup de fil matinal, le PDG ahuri au regard de bulot à lunettes d’écaille sous son feutre mou ; ne reste que lui… ben oui ! Le quidam timide encore ensommeillé dans le col de son chandail pétrole irlandais… oui, ce pourrait être lui…“
Elle éjecta ses pompes, fit glisser le foulard, ôta le manteau, tomba à la renverse sur la banquette. Souvent, elle s’y endormait en chien de fusil. Elle entra instamment les deux pieds dans un sommeil sans fond : sur le siège passager de la Bentley d’Oscar – ainsi fut-il nommé par le barman – elle s’abandonnait à la régularité de la vitesse et du ronronnement du moteur, la voix douce et monocorde de son chauffeur emplissant ses oreilles d’une texture feutrée frôlant les prairies herbeuses d’une Mongolie lointaine. Le ton tranché heurta ses oreilles “Z’avez pas peur… j’veux dire de revenir toute seule après ?”
Elle sursauta, incommodée soudain par une sueur perlant les pommettes. D’emblée, un impérieux désir de quitter l’habitacle et son occupant, le rêve sur le point de virer au cauchemar.
Elle s’entendit dire à voix haute “D’toutes façons j’ai peur de rien, moi !“
Réveil abrupt immédiat. Lissage de la mèche noire qui barrait son regard, action sur la touche du portable. Une ambiance d’aéroport envahit son pavillon d’oreille, elle amplifia, puis fit : “Allô, je suis la dame de Shanghaï. Puisque c’est l’année du rat et que tu envisageais que nous naviguions en eaux communes, retrouvons-nous pour une distante traversée devant la flèche de la cathédrale. Je tiendrai un parapluie aux fleurs d’automne, alors nous pourrons partir…“
Denyse
Atelier d’écriture du 22 mai à Villenave d’Ornon
Le scénario de cet atelier d’écriture : https://www.oasisdepoesie.org/forums/topic/bd-aventures/
Cette petite histoire commence par une belle introduction.
J’étais ravie d’explorer et de rechercher le sens de quelques expressions qui étaient nouvelles pour moi.
Cependant, afin d’apprécier certains passages, j’ai dû consulter mon professeur de français. Ce dernier m’a aidé à saisir certaines phrases. Malheureusement, bien qu’il ait fait de son mieux, il n’a pas réussi à satisfaire ma curiosité à propos certains passages :
Elle vérifia du dos de la main la présence du portable en poche.
Pourquoi avec le dos de sa main ??
On dirait un moyen peu pratique de vérifier la présence de quelque chose dans sa poche.
Alors… se fit entendre l’indicatif de la voix chaude et vivante de Marilyn qu’elle abrégea tandis qu’une voix inconnue poursuivit…
Mais… d’où vient cette Marylin ??
La dame de Shanghaï, a-t-elle entendu la douce voix de son amie de l’Ouest, Marylin ?
Elle a interrompu sa conversation avec Marylin dès qu’elle a entendu cette “Allôôô… …. Allôôô ma chère …” de cet homme impatient ?
Quel genre de portables magiques porte-elle, notre dame de Shanghaï ?
Il m’a semblé que vous pourriez avoir un quelconque lien…
Je crains que ce “quelconque” rende ce passage un peu maladroit.
Il y a d’autres petites choses, mais je m’arrête ici.
Comme je l’ai dit plus tôt, je commente les textes écrits lors des ateliers comme je le fais avec tous les autres (posts).
En tenant compte des règles du jeu, ce texte peut être lu et commenté sous une lumière différente.
J’aime bien l’écriture et le vocabulaire (les origatas, le foulard de soie sauvage, la texture feutrée,…) de cette histoire mais on sent que l’animateur t’a fait quelques misères avec ses consignes abruptes qui rendent parfois le texte vraiment étonnant par ses rebondissements ! (Rires !)