Atelier du 27 Novembre à Villenave d’Ornon
Lettre de Maryline
Ma chère Juliette,
Nous voici aujourd’hui en Corse sous un ciel bleu d’azur. Nous allons nous baigner tous les jours dans une crique. Sable et bateaux blancs, mer d’huile, ici tout n’est que calme et harmonie. Le soleil darde la plage de ses rayons ardents et le soir il enflamme l’horizon.
Nos soirées sont trépidantes et souvent nous allons danser sur les rythmes endiablés des guitares manouches. Ces musiciens ont vraiment la musique dans le sang !
La gastronomie corse enchante nos papilles ; au restaurant, nous avons fait la connaissance de deux Italiens. Cheveux de jais et yeux de velours dans un teint hâlé, ils sont vraiment très charmants et dansent à merveille.
Nous sommes vraiment enchantées de ce séjour paradisiaque et voudrions que ces vacances n’aient plus de fin !
Nous espérons que tu ne t’ennuies pas trop au bureau et dans la grisaille parisienne ;
Nous t’embrassons bien fort.
Lili et Mumu
Réponse de Denyse à la lettre de Maryline
Mais tu ne connais pas l’envers du décor, moi qui connais bien ce lieu, je puis t’assurer qu’il n’a rien de paradisiaque. Il fut un temps où, fracassant de voix rauques, d’ordres militaires, de moteurs incessants, de sirènes ininterrompues et stridentes, d’aboiements hargneux et menaçants, il abritait dans son azur et cette crique aux blanches goélettes, un camp de détention pour Manouches.
Leurs instruments désaccordés larmoyaient sur leur patrie perdue, les membres de leurs familles affamés dans le froid, leur identité confisquée par un retrait de leurs carnets d’itinérance.
A la libération, le soleil enflammait l’horizon de son sang liquoreux : il s’agissait de tout détruire par le feu jusqu’à ce que la puanteur de la ville calcinée imprégnât le pays.
Ce bastion maritime fonctionnait sous autorité italienne ; certains d’entre eux, nostalgiques du lieu, y reviennent parfois.
Imagine la grisaille parisienne sur la guirlande clignotante de Noël de la tour Eiffel que j’aperçois de mon balcon…
Je t’embrasse
Denyse
Avec tout le respect que je vous dois, je crains que vous ne connaissiez pas la Corse comme moi. Si vous saviez, vous ne seriez pas aussi partisanes à juger de cette île extraordinaire.
Oui, la Corse est spectaculaire, cependant, il ne s’agit pas seulement d’une île de beauté car elle est très venteuse. C’est vrai que cela peut être perçu comme une grâce divine lors des chaudes journées d’été. Pourtant, les vents forts et persistants peuvent être une menace.
Le Mistral venant du nord-ouest est parfois assez fort et souffle vers la côte est et le détroit de Bonifacio. Là-bas, la houle créée par le vent peut devenir grande et saccadée si bien que même les marins les plus expérimentés peuvent attraper lamentablement le mal de mer.
Le Libeccio qui souffle du sud-ouest est un vent humide. Il est souvent accompagné d’une pluie qui peut gâcher votre séjour sur cette île.
Si vous voulez connaître tous les visages de la Corse, les beaux et les laids, il vous faut l’approcher par la mer.
Faites-le de préférence la nuit après une chaude journée ensoleillée puisque les vents d’ouest diminuent généralement la nuit. L’air chaud et humide mélangé à l’odeur du thym, du romarin et de la lavande est une sensation à ne jamais oublier. Il n’y a aucun bruit si ce n’est celui de la coque se déplaçant doucement dans l’eau calme et parfois, le cri d’une mouette au rythme circadien perturbé.
Regarde Bonifacio !
Regarde son cadre exotique au sommet d’une falaise au dessus de canapés de calcaire !
Regarde comme les maisons au sommet semblent être sur le point de s’effondrer dans la mer !
C’est à la fois beau et effrayant.
L’entrée du port est si étroite que l’on a envie de tourner la barre et de rester en mer jusqu’à l’aube de peur d’être heurté contre les rochers par les vents forts et les eaux violentes.
Une fois à terre, vous pouvez commencer votre voyage de découverte de la nature et d’autres villes.
Préparez-vous, néanmoins, à la bruyante vie des soirs sur le rivage et aux insupportables voix stridentes des “chanteurs” à travers les haut-parleurs.
Les touristes sont partout. Quant aux beaux machos aux cheveux bouclés et brillants, aux yeux noirs scintillants, vous devrez les rechercher avec une torche. Il est difficile de les trouver dans la foule qui vous submerge. Il faut d’abord écarter les Français venant du continent, les Italiens, les Allemands, les Britanniques, les Hollandais, les Chinois, les …
Non, n’allez pas à Bastia pour dormir. Pour cela, déposez plutôt l’ancre à l’île d’Elbe, près du lit royal de Sa Majesté Napoléon.
Merci pour vos textes inspirants,
Purana
Chacun voit la Corse avec ses yeux.
Moi ma “Corse” fut une heureuse surprise…
Je quittais Marseille plein de préjugés (et plein des fumées envoyé par le ferrry), la Corse s’était les attentats des Nationalistes, l’hostilité des habitants envers les continentaux (hostilité comparable à celle des Basques), les prix variant en fonction du client : Corses ou non-Corses. Je tremblais pour ma voiture, un de mes amis IPR dans l’académie de Nice m’ayant dit qu’il louait une voiture immatriculée en Corse, quand il venait inspecter dans les lycées et collèges, la sienne ayant été dégradée. Pour moi la Corse c’était “Colomba” de Prosper Mérimée, les souteneurs parisiens remplacés aujourd’hui par les Magrébins, les Bulgares et les Ukrainiens. C’était aussi Napoléon, Tino Rossi, les hommes politiques à l’accent roulant et aux pratiques douteuses.
Rien de tout cela ! Des gens charmants, un pays merveilleux dont la beauté rude et escarpée enchante la visiteur. Un périple enchanteur Ajaccio, Porto, les Calanques, Ota, Sartène, Propiano, Bonifacio, etc.