Important :
Lisez et effectuez les consignes qui suivent une par une sans lire les suivantes.
1 – Dans la liste suivante choisissez un élément au hasard :
Le désert
Une bénédiction papale
Un grand bonheur
Une dune de sable
Une déclaration d’amour
Un matin d’hiver
Un cœur tendre
Le rire d’un enfant
Rêver d’amour
Écrire un poème
Un vague à l’âme
2 – Dans cette deuxième liste, choisissez un élément au hasard :
Une soupe aux choux
Une centrale à béton
Un cornet de frites
Une enclume
Les cornes d’un taureau
Des crottes de lapin
Marcher sur la lune
Une cafetière
Des cuisses de poulet
Un sac à patates
3 – Vous devez maintenant écrire un premier texte cohérent qui commence par l’élément choisi dans la première liste et qui se termine par celui choisi dans la deuxième liste (ou le contraire).
4 – Sans lire la consigne n°5 ci-dessous (ce serait dommage) renouveler le choix des éléments : un dans la première liste, un dans la deuxième liste. Vous pouvez conserver les éléments choisis précédemment si vous le souhaitez.
5 – Écrivez un texte commençant par “élément de la première liste, c’est comme élément de la deuxième liste, … …” (ou l’inverse) en expliquant pourquoi, en détaillant et en argumentant.
Par exemple : des chaussettes sales, c’est comme un jour sans soleil, … …
ou
les cornes d’un taureau, c’est comme écrire un poème, … …
Bonus : S’il vous reste un peu de temps, faites un troisième tirage et écrivez :
“ élément de la première liste, c’est comme élément de la deuxième liste,”
en une seule phrase de trois lignes maximum et en 5 ou 6 minutes.
Publiez vos 2 (ou 3) textes ci-dessous dans les commentaires.
De matin d’hiver en crottes de lapin
Un matin d’hiver comme un autre, un de ces matins qui n’ont rien, rien de semblable mais rien de différent non plus, pas un matin de grand bonheur mais pas un matin triste. Il s’était levé un peu morose en chantonnant cette chanson de Claude François : “Comme d’habitude“.
Désœuvré, comme d’habitude, il avait aujourd’hui décidé de repartir à la chasse aux Pokémons-Full-Nature-V3. Son téléphone portable surchauffé lui indiquait une piste dans le bois. Il était seul, pas un concurrent dans le givre des alentours ! Il marcha longtemps. Par ce froid, il aurait préféré une soupe aux choux mais il n’avait emmené que deux cuisses de poulets qu’il avala à la va-vite avant de continuer sa quête.
Chaque fois, ce jeu devenait une sorte de course d’orientation, une découverte, celle d’un objet magique, insolite, un genre de porte-bonheur. Tu brûles, tu brûles, lui intimait son téléphone et enfin, aux creux d’un vieux saule, il trouva le porte-bonheur : une petite queue douce et blanche, là, qui l’attendait, toute ornée d’une auréole de crottes de lapin.
Une dune de sable, c’est comme une centrale à béton
Une dune de sable, c’est comme une centrale à béton, un lieu extraordinaire, inouï, pour faire l’amour.
Viens, viens te rouler dans ce limon si doux qui colle, qui colle, qui nous colle. Laissons-nous transformer en statues de sueurs et de sables, en statues de ciments liquides, livrons-nous au roulis de la bétonnière des vagues jusqu’à la sublime extase, entêtés par le vent qui souffle sur les poutrelles des oyats, acier où se collent les coquillages comme autant de sexes affamés.
Une femme en robe de mariée sur la dune, la même femme en robe de mariée, si blanche dans l’entrelacs des squelettes de fer et de rouille. Choc photographique. La centrale pleure, plie sous le poids des graviers comme la dune gémit sous le vent de sable, et la mariée m’attend là de tout son corps pour m’immerger dans cette nuit de noces minérales.
Une bénédiction papale, un moment attendu, espéré, préparé. Ernest était noyé dans la foule fervente, c’est à peine s’il apercevait la petite silhouette blanche largement encadrée par une fenêtre haute et lointaine, qui pourtant distribuait un son tonitruant sur toute la place Saint Pierre. Être enfin là, béni par Sa Sainteté, un voeu si cher et si ancien, une promesse. Les yeux clos Ernest se laissait pénétrer par cette voix descendante, modulée et endormante maintes fois entendue à la télé ou à la radio. “… Patris et Filii et Spiritu Sancti descendat super vos et maneat semper”.
Un long silence se fit dans la masse recueillie puis quelques applaudissements rapidement contagieux précédèrent une immense clameur montant vers le ciel. Ernest gardait les yeux fermés, en réalité il rêvait, Ernest n’était pas sur la Place Saint Pierre mais dans la modeste cuisine de sa petite ferme, attablé devant la télé. Bercé par la voie lénifiante du Saint Père il s’était assoupi, le menton affaissé sur son col. Tout autour la foule commençait à évacuer la place, mais lui il ne bougeait pas, transporté de bonheur d’avoir pu enfin mener ce pèlerinage à son terme et obtenu ces indulgences si convoitées.
Indulgences qui lui auraient été bien utiles car Ernest s’effondra, raide mort, la tête dans son assiette, la chevelure sertie de croutons amollis et flottant dans une soupe aux choux.
Un désert c’est comme une enclume. Le soleil y tape comme le marteau sur l’enclume. Rien ne pousse dans le désert, pas plus que sur le dos d’une enclume. Le désert épuise les forces comme l’enclume le bras du forgeron. Le désert se refroidit la nuit, l’enclume aussi. L’enclume défie le temps, le désert également. Déposez une enclume au milieu d’un désert (il vous faudra pour cela un puissant dromadaire) repassez quelques siècles plus tard : l’enclume sera toujours là et le désert aussi. Enfin le désert et l’enclume ont un principe commun : la chaleur.
L’enclume dit au désert : Comme nous nous ressemblons !
Le désert répondit à l’enclume : Bien sûr et personne ne le sait !
E : Ah ! Mon cher désert, que dirais-tu d’une symphonie crépusculaire pour marteaux sur fers rouges ?
D : Oui ! Oui ! Ma chère ! Viens t’enfouir dans mon sable fin, ta symphonie tinte déjà à mes oreilles et je te susurrerai le pas des chameaux sur la dune.
E : Ah! Dédé ! Tu permets que je t’appelle Dédé ? Qu’avons nous uni nos destins plus tôt !
D : Nous nous ressemblons tant !
Une dune de sable c’est comme une centrale à béton…
C’est l’idée qui me traverse ce matin. Et me renverse.
Ton corps était doux comme une martingale de velours. Il ressemblait à une dune. Je marchais sur cette dune en prenant garde à laisser mes empreintes que tu ne pourrais effacer. Une dune, là, au milieu pour toucher les étoiles. Deux dunes, là, sœurs jumelles. Elles sont quatre pour apaiser mes désordres.
Je suivais leurs courbes douces toujours plus fort vers l’extase. Je m’arrêtais pour m’abreuver dans tes rivières. C’est qu’il faisait chaud sous ton soleil.
Je perdais pied, je m’enfonçais dans les parties sableuses et mouvantes de ton corps-dunes qui ondulait à mesure que je me perdais. Et je comptais chaque grain de ta peau comme des grains de sable qui s’empuzzlent, se cherchent, se défont, se délitent.
Puis s’effritent comme le temps, lentement, dans la veine d’un sablier.
Le matin est revenu pour te parer d’un hiver gris.
Le drap s’est posé sur tes dunes, a effacé mes empreintes. Ton corps est devenu silence tergal blanc, momie que l’amour a jaunie et rabougrie. Juste un souffle matinal qui soulève le drap pour me convaincre que la momie est en vie.
Le sable a dû tourner dans la bétonnière pour qu’il fasse si gris ce matin.
Je te parle – m’entends-tu seulement ?- je te parle du sable chaud qui recouvrait tes dunes. Je tente d’attraper tes yeux où il ne reste plus aucune trace du désert magique, aucune trace de cette nuit mirage.
C’est le matin. Tout a disparu. Tu parais plus grande aussi. Grise et froide comme une guerrière, comme une centrale avec ton silence pour seule arme qui n’en finit plus de tourner dans notre vide.
Ton corps-dunes de sable est comme une centrale à béton désormais.
Isabelle
Un sac à patates, c’est comme un vague à l’âme
Un sac à patates, c’est comme un vague à l’âme, c’est mou. Mou d’une mollesse souple, qui te prend, qui t’enrobe, et qui gratte un peu quand même.
Tu ne peux t’en défaire, quelque chose qui te colle comme une soyeuse seconde peau, où tu te prélasses, un sac à l’âme, une vague à patate, l’un ou l’autre, une sorte de contenant sans contenu, comme pour prendre le vide au piège.
Un monstrueux sac à patates, un énorme vague à l’âme.
Une déclaration d’amour c’est comme marcher sur la lune.
Quand il m’a déclaré ses sentiments, ses yeux, ses mains, tout son corps crachaient des flammes multicolores, comme s’il avait traversé un feu de bois.
Moi, je me sentais comme un morceau de tissu enflammé ; mes yeux lançaient des étincelles, mes orteils dessinaient des éclairs, mon cœur était un brasier, et mes mains un bouquet de flammèches.
Nous étions comme électrocutés ; nous étions dominés par une telle énergie que nous pensions marcher sur la lune.
Quelle raison profonde de marcher sur la lune?
Ignorer le risque permet d’envisager une telle éventualité. Mais encore… le goût de l’expérimentation pour l’apesanteur, les zones de flottaison aérienne incontrôlée, la curiosité ou la sensation physique majeure au sein d’un nouvel élément, la rupture totale avec un environnement spatialisé et orienté, la découverte d’un point de vue autrement et nouvellement étranger, l’acceptation d’un lien, d’une attache, d’un ancrage afin d’éviter de se perdre, se dissoudre dans les limbes spatiales infinies, à moins que ce ne soit… un extrême désir d’écrire un poème …au clair de la terre.
Le club du 4eme âge de Vesou la Fontaine organisa cette année un voyage touristique en Turquie pour ses adhérents. Mme Charon en revint enchantée et y gagna une amie. Ainsi, chaque jeudi Mme Menu accueillait-elle en fin d’après-midi sa nouvelle compagne qui ne tarissait pas d’éloges sur sa découverte du café à l’orientale. Elle alla s’enquérir de l’objet adéquat à la droguerie -bazar du marché du samedi. Par chance, il en restait un, éblouissant, fait main, dans un caisson parmi des tasses et des verres à thé. La première mouture appréciée à sa juste valeur fut un vrai délice. Le poêlon étincelant à longue queue trônait au centre de la table.
Sur un mur du salon une carte postale du désert d’Atacama. Par la baie entrouverte un rayon d’or sur la gorge de la casserolette envoya un éventail lumineux à ce désert monochrome. Saisi autant que surpris, ébloui par tant d’audace et de beauté cuivrée martelée découpée se laissant admirer; il bouscula sa tranquillité désertique. En milieu de semaine il s’habillait impatiemment le coeur pour l’heure de la cérémonie de la cafetière turque. Fuyant la la noirceur de son placard pour une nouvelle présentation, elle mettait en émoi le désert amoureux , immobile mais en feu sur son mur de salon. Mais CHUT, c’est leur secret!
Un cornet de frites
Ca croque et ça sent bon; ça illumine le gosier, ça pepse et ça gigote au creux du ventre et du coeur; tout chaud, tout blond, odorant et sonore
C’est comme le rire d’un enfant
Les cornes d’un taureau c’est comme un matin d’hiver, rêche et gris, redoutable et hagard, las de tourner en rond jour après jour dans un calendrier perpétuel éternellement entamé, au fond de ma mémoire il me cerne et me bloque, me taraude inexorablement; je les reconnais et ne peux passer outre.
Le rire d’un enfant c’est comme les cornes d’un taureau. De sa pointe aigüe, il vous envoie au ciel et vous fait voir les étoiles. Tache claire sur les ciels sombres, il dessine les bulles d’un comic-strip qui distrait des soucis. Le rire d’un enfant, c’est comme les cornes d’un tendre taureau qui donnent un nouvel élan.
Un cornet de frites c’est comme un matin d’hiver par une belle journée à la montagne. Enrobé de blanc, sa surface immaculée semble un infini champ des possibles où l’on imprime sa trace à loisir. Au-dessus de la blanche enveloppe percent les rayons dorés des frites tels un soleil annonciateur d’une journée délicieuse. En avant pour une belle descente…