Bienvenue dans ce nouvel atelier d’écriture !
Inspiré par “Les listes de Sei Shōnagon” www.castalie.fr
I – Sans lire la suite des consignes, vous allez commencer par rédiger 2 listes de mots :
- Liste des Envies qu’on peut avoir. Écrivez 10 mots.
- Liste des Choses bien utiles. Écrivez 10 mots.
II –
- Écrivez maintenant une phrase en utilisant le premier mot de la première liste et le premier mot de la deuxième liste.
- Continuez en écrivant une seconde phrase, en rapport avec la phrase précédente, en utilisant le deuxième mot de chaque liste.
- Et ainsi de suite jusqu’à la dixième phrase qui utilisera les dixièmes mots de chaque liste, et qui sera en rapport avec la neuvième phrase.
III –
- Dans chaque phrase, entourez le mot que vous trouvez le plus poétique (pas forcément un mot appartenant aux listes de départ. Vous obtenez ainsi 10 mots.
- Arrangez ces mots et ajoutez-en d’autres pour écrire maintenant un texte “poétique” (conjuguez les verbes et accordez les adjectifs si nécessaire). Non, il ne s’agit pas de sortir les grands violons : la poésie naît souvent de rencontres inattendues… laissez courir vos plumes ou vos doigts et laissez-vous surprendre. La poésie n’est pas forcément éplorée, elle peut être étrange, surréaliste, épique, burlesque, … voire opaque !!! *
- Écrivez maintenant un dernier texte en réduisant le texte poétique que vous venez d’écrire à la moitié de sa longueur. Par exemple, si votre texte “poétique” contient 60 mots, écrivez un nouveau texte de 30 mots seulement, s’il fait 30 mots, écrivez un nouveau texte de 15 mots. Terminez en donnant un titre à ce dernier texte.
Merci de poster vos listes et vos 3 textes ci-dessous dans la boîte des commentaires.
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* À propos d’écriture poétique, vous pouvez consulter notre discussion sur ce qu’est la poésie pour chacun de nous, et y participer : Poétique ou pas poétique
Exercice trop tentant….Merci pour cette proposition qui m’a fait un bien fou !!!!
Liste 1
Marcher / Vivre / Gâteaux / Manger / Rajeunir / cigarette / sauter / parler / ressentir / déménager
Liste 2
Téléphone / PQ / livre / stylo / cahier / eau / ballon / casserole / mug / lit
Marcher sans regarder son téléphone
C’est comme vivre sans avoir accès au PQ
Des gâteaux ou des livres, elle hésitait encore une fois
Elle pouvait manger son stylo sans aucune peur
Allait-elle rajeunir et s’effondrer sur son cahier ?
Une cigarette, un verre d’eau et c’était suffisant
Elle sautait sur un ballon pour s’assoir sur la Terre
Et parler comme une casserole, elle pouvait aussi ?
Elle avait ressenti les bienfaits de la boisson cachée dans son mug
Sa décision était prise, elle déménageait dans son lit.
Une vieille qui déambule, c’est ce qu’elle est aujourd’hui
Cheveux blancs, elle vit presque cachée
Comment a-t-elle encore assez de forces pour marcher ?
C’est peut-être la peur qui lui dicte ses pas et ses actes aussi
Elle-même a peur de s’effondrer
Avaler son stylo, pleurer sur ses tristes cahiers blancs
Cigarette à la bouche, elle regarde la Terre
Plus personne à qui parler
Sa décision est prise
Elle déménage dans son lit
L’écri-vaine
Déambuler sur la crête de la Terre, cigarette à la bouche
Cachée sous ses cheveux blancs,
La peur ne lui dictait plus ses pas,
Un jour, elle a avalé son stylo
Remplir les cahiers ne suffisaient plus
« Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait. » – Mark Twain
Quand j’ai vu le libellé du sujet de l’atelier, j’ai été immédiatement rebuté par la complexité des manoeuvres proposées.
Je n’aurais pas parié un kopeck sur la réalisation !
Je m’incline, j’ai lu un texte à peu près cohérent qui répondait aux normes imposées.
Bravo !
Excellent, Laurence ! Merci d’avoir lancé l’affaire de façon aussi réussie et qui a fait mentir Loki !
à moi maintenant :
Envies qu’on peut avoir
Choses bien utiles
1
Meurtre
Râpe à fromage
2
Parfum
Pompe à vélo
3
Sieste
Cirage
4
Caresses
Pouce
5
Coucher de soleil
Fil à coudre
6
Frites
Chaussures
7
Baignade
Fourchette
8
Cimes
Scie
9
Bruit de la mer
Tournevis
10
Bronzer
Feu
Les meurtres avaient tous été accomplis d’un coup, non de parapluie bulgare, mais d’un coup de râpe à fromage.
La pompe à vélo, retrouvée à chaque fois sur les lieux, avait servi à pulvériser sur les corps du numéro 17 de Channel. Étrange…
Les victimes, surprises pendant leur sieste, arboraient toutes sur le front une croix au cirage noir mêlé de grains de sable.
Les pouces de leur main droite, tranchés, étaient posés comme une caresse sur un coussin de satin bleu.
Des fils à coudre, attachés à leurs cils, donnaient à leurs yeux ouverts des airs de coucher de soleil.
L’odeur persistante de frites et de chaussures, chaque fois présente, expliquait peut-être la nécessité qu’avait eu l’auteur – ou les auteurs – de pulvériser du Channel sur les corps.
Après quelques investigations et enquêtes de voisinage, l’inspecteur Morris comprit que toutes les victimes faisaient partie d’un même groupe qui pratiquait la baignade tous les samedis matins de février à la plage de la Fourchette.
Un endroit où la cime de tous les arbres avait été tranchée d’un coup de scie, comme les pouces des malheureux ; le meurtrier avait-il voulu laisser un message ?
Le bruit de la mer berçait l’inspecteur qui, en s’asseyant sur le sable pour réfléchir un instant, sentit un objet sous ses fesses : un tournevis ! Là, dans le sable ! Encore étrange…
Morris considérait le tournevis avec perplexité pendant que, le feu aux joues, des inconditionnels essayaient – au mépris des recommandations médicales mais au bénéfice de leur taux en vitamine D – de bronzer au soleil de cette après-midi de fin février sur la plage de la Fourchette.
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Parapluie – corps – croix – satin bleu – cils – Channel – février – message – mer – après-midi
Est-ce un message
Courant sur le satin bleu
Que m’apporte la mer ?
Le parapluie a baissé les cils
Dans cette après-midi de février
Au soleil, des corps en croix
Laissent s’envoler leur Channel
Aux vents du rivage
Est-ce un message
Courant sur le satin bleu de la mer ?
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Parapluies de cils baissés
Message courant sur la mer
Février m’appelle
en corps et en croix
Aux satins de sable
Envies qu’on peut avoir
Choses bien utiles
Se prélasser
Brosse à dents
Une terrasse
Des lunettes
Un croissant
Un panier
Embrasser
Un crayon
Manger
Un pansement
Dormir
Des chaussures
Chocolat
Une chaise
Voyager
Une aiguille
Une robe
Une carte
Un spectacle
De l’argent
Je me prélassais au soleil au lieu de me brosser les dents : Il faisait si bon sur la terrasse, pieds en éventail et lunettes noires sur le nez !
Je somnolais en rêvant de croissants et de paniers de framboises fraîches.
Maman vint m’embrasser et me réveilla en frottant doucement mon crâne avec un crayon. « Maintenant que tu as fini de manger, il faut faire ta toilette et changer ton pansement. Tu as assez dormi comme ça ! Après, tu mettras tes chaussures et tu iras me chercher du chocolat pour faire la mousse au lieu de bayer aux corneilles sur ta chaise ! Tu profiteras du voyage pour m’acheter des aiguilles et du fil rouge pour recoudre ta robe. N’oublie pas la carte du magasin ! Il y a une loterie avec des billets de spectacle et de l’argent à gagner ! ».
Au pied de l’arbre, je rêve,
Paupières embrassées par le soleil d’avril.
Les pâquerettes font leur toilette,
Défroissant leurs collerettes
Après avoir dormi tout l’hiver.
Sur la mousse douce je voyage,
Pas besoin de carte ou d’argent
Pour partir au loin.
VOYAGE IMMOBILE
Paupières embrassées par le soleil ,
Sur la mousse douce je voyage,
Pas besoin de carte ou d’argent
Pour partir loin…
I Listes:
Ce qu’on peut avoir: sortir-respirer-chocolat-forêt-nature-amour-dormir-aimer-musique-amoureux.
Ce qui peut être utile: peigne-casserole-crayon-bic-papier-carnet-cahier-lit-train-tram.
II
Il sortit le peigne du tiroir de la commode.
Il respira un bon coup et vit la casserole brûler.
Il mangea le chocolat et prit son crayon.
Il chercha son bic dans la forêt.
Il dessina la nature sur un papier.
Il découvrit l’amour dans ce carnet de croquis.
Il dormit sur son cahier.
Il se mit au lit et rêva qu‘elle l’aimait.
Une musique accompagnait le passage du train où elle était.
Lui, très amoureux, la regardait dans le tram.
III
Il sortit de la ville et se dirigea vers la forêt, las, triste, et désemparé.
Un immense besoin d’amour s’empara de tout son être.
Il s’assit dans l’herbe et se mit à dessiner les arbres, les feuilles, les champignons sur une page de son carnet de croquis.
Il s’endormit.
Il rêva qu’elle était dans le train, assise en face de lui, très amoureuse.
Une douce musique les unissait.
Rêve
Las, triste, il sortit de la ville;
il se dirigea vers la forêt, dévoré par un immense besoin d’amour.
Il se coucha dans l’herbe;
il rêva: elle était près de lui; elle l’aimait.
Envies :
Rajeunir – Voyage – Printemps – Convivialité – Vin – Enthousiasme – Vitalité – Liberté – Saint Honoré – Paris
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Choses utiles :
Tirebouchon – Souliers – Voiture – Ordinateur – Toit – Lumière – Eau – Vêtements – Air – Bois
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Texte 1
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Vite ! Ouvrir la bouteille de jouvence et rajeunir jusqu’à l’ivresse ! Quelques tours d’un tirebouchon vissé à la hâte et déjà quelques rides s’effacent. Un voyage de rêve, ses souliers qui connaissent tous les chemins vers la jeunesse le conduisent jusqu’à ses vertes années. Au printemps de sa vie, assis aux côtés de son père, dans la voiture de son enfance, cheveux aux vent, bercé par le ronronnement du moteur, il survole ce paysage familier. Comme il est loin des fausses convivialités étalées sur l’écran de son ordinateur de solitude. Ce vin produit un miracle, l’auto est décapotée, son toit de bâche replié à l’arrière. Le soleil est haut sur la route des vacances, son coeur se gonfle d’enthousiasme, retrouver ses grands parents et ses copains de l’été, il ferme les yeux pour goûter ces instants de plénitude, une intense lumière traverse ses paupières pour projeter sur un écran rose des images heureuses, dont il sent confusément qu’elles lui manqueront un jour. Cette irrépressible vitalité dont il n’a guère conscience, elle est comme l’eau vive, claire et rapide du ruisseau gargouillant à l’ombre des hêtres et dont il perçoit déjà le chant. Le ruisseau ! La liberté d’offrir ses vêtements à l’herbe fraîchement fauchée, pour descendre dans l’eau, sur les pierres glissantes, en feignant bien sûr de ne pas la trouver glaciale.
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La tête appuyée à l’intérieur de son coude, près de la bouteille vidée, il dort affalé sur son bureau. Sur sa chaîne hifi Papageno répète en boucle son aria, son voeu. Il s’éveille péniblement dans la pénombre de fin du jour. Demain il ira, en passant, s’acheter son Saint-Honoré dominical et partira prendre un bol d’air. Il fuira hors de Paris, dans les bois, pour un pique nique en solitaire, peut-être du côté de Meudon.
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3ème liste de mots :
Jouvence – Chemins – Paysage – Solitude – Vin – Lumière – Ruisseau – Herbe – Pénombre – Bois.
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Texte 2
Il divague sur des chemins obstrués, sa solitude cernée d’horizons irréels et, à la fontaine de jouvence, il se désaltère d’illusoires retours.
Vin ami, vin ennemi, diffuse ta lumière sombre que je vois le ruisseau, que je vois les brins d’herbe qu’il charrie et s’enfuient, ballotés entre les roches moussues.
La pénombre des bois happe tous les sentiers. Je bois.
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Texte 3
Chemins obstrués.
Horizons irréels et noirs éclats
Ivresse
Gazouille le ruisseau le poème est trahi
Les brins d’herbe défilent et les années aussi
Impasse.
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Merci Hermano, pour ces conseils utiles, et merci d’avoir rendu ma contribution un peu plus présentable.
J’aime beaucoup me plier à ces exercices contraints et découvrir ensuite ce que chacun a réussi à faire, avec une imagination surprenante et une si riche diversité.
Moi aussi, j’aime beaucoup réaliser ce genre d’atelier.
Il y a là à la fois beaucoup de liberté d’expression et une espèce de fil qui me guide et me soutient (les contraintes).
Merci Hermano.
Bravo à vous pour ces excellentes contributions !
Dans un dernier exercice, je me suis régalé, à mélanger tout cela.
Vous pouvez lire ici et nous dire ce que vous en pensez… https://www.oasisdepoesie.org/ecrire-ensemble/ateliers-collectifs/daisy/medley-de-poemes/
Cet atelier reste évidemment ouvert. Merci à toutes celles et ceux qui voudront continuer à nous offrir leurs contributions.
« Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait. » – Mark Twain
Quand j’ai vu le libellé du sujet de l’atelier, j’ai été immédiatement rebuté par la complexité des manœuvres proposées.
Je n’aurais pas parié un kopeck sur la réalisation !
Laurence, Nima, Chamans, Line, Hermano l’ont fait !
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Mais j’avoue que si j’avais été motivé j’aurais pu le faire (SGDG !), mais je n’aime pas les contraintes et préfère partir d’une idée.
J’ai rédigé deux listes de mots à partir d’un extrait de
À la recherche du temps perdu, Tome 7 : Le Temps retrouvé
Si quelqu’un à le courage de poursuivre l’exercice… Du Proust redonne-t-il du Proust ?
Envies qu’on peut avoir
Choses bien utiles
Souvenir
Oubli
Contracter
Lien
Chaînon
Minute
Place
Age
Distances
Isolement
Pointé
Sommet
Respirer
air
Précisément
Autrefois
Poètes
Paradis
Sensation
Renouvellement
Elève Loki, vous avez déjà tout faux dès la première question !
Il ne s’agit pas de deux listes de mots au hasard, mais bien :
d’une part d’une liste des choses dont on peut avoir envie,
et d’autre part d’une liste de choses bien utiles.
Toutefois, pour vous convaincre que l’exercice n’est nullement l’Himalaya que vous craignez, j’ai tenté ci-dessous la deuxième question en respectant les consignes qui y figurent et en utilisant vos mots choisis au hasard :
Seul l’oubli est volontaire, le souvenir est naturel. Comme un lien qu’on aurait contracté pour toujours avec la mémoire. Un chaînon indéfectible dans les minutes du notaire de nos vies. Qu’on pourra rappeler quand l’âge viendra prendre la place de notre fougueuse jeunesse. Même l’isolement, même les distances ne sauront nous faire oublier. Le doigt pointé au sommet de notre tête, nous nous rappellerons. Nous nous rappellerons jusqu’au parfum de l’air que nous avons respiré. Et même, très précisément, certains de nos agissements d’autrefois. Oui, la mémoire garde tout, et au paradis des poètes nous saurons encore réciter les poèmes, chanter les chansons apprises dans l’enfance. N’est-ce pas là une belle sensation, le renouvellement d’une éternelle jeunesse ?
Hermano, effectivement l’élève Loki est turbulent et c’est volontairement qu’il n’a pas suivi les consignes.
A priori ce n’est pas grave puisque tu as concocté à partir des deux listes un texte cohérent. Il est aussi valable que les autres textes que j’ai pu lire. Evidemment ce n’est pas du Proust, mais il fallait s’en douter !
Je pense que chacun s’amuse et c’est le principal ! Voilà bien une occupation qui tombe à point en cette période de confinement.
Cela me rappelle le mouvement Oulipo.
L’Ouvroir de littérature potentielle, généralement désigné par son acronyme OuLiPo (ou Oulipo), est un groupe de littérature inventive et innovante qui naît au XXe siècle . Il a pour but de découvrir de nouvelles potentialités du langage et de moderniser l’expression à travers des jeux d’écriture.